Ishinomaki
Une rue d'Ishinomaki dévastée après le séisme et le tsunami qui ont frappé le Japon en mars 2011. Joe Iwasa/Yomiuri Shimbu/AP/SIPA
Au Japon, une sociologue a recueilli pour sa thèse les récits de plusieurs chauffeurs de taxi d'Ishinomaki, ville portuaire ravagée par le tsunami de 2011, qui affirment avoir pris des fantômes comme passagers.

Au Japon, dans les zones ravagées par le tsunami en 2011 où près de 16000 personnes ont trouvé la mort, le fait de voir des fantômes est si courant qu'il est considéré comme un syndrome de l'état de stress post-traumatique (ESPT). Des exorcistes traditionnels shintoïstes sont même appelés au chevet des victimes harcelées par les spectres des défunts.

Mais cinq ans après la catastrophe, les témoignages continuent d'affluer au point que l'on s'interroge sur la nature de ces visions, simple expression des souffrances passées où véritable phénomène paranormal. Yuka Kudo, une étudiante en sociologie de l'université de Tohoku Gakuin à Sendai, s'est penchée sur la question dans le cadre de sa thèse. Elle a notamment interrogé une catégorie de la population particulièrement touchée par ces apparitions : les chauffeurs de taxi. A Ishinomaki, ville de 146000 habitants où 3100 personnes ont trouvé la mort au cours du séisme et du tsunami, sept chauffeurs de taxis sur les 100 interrogés, ont assuré avoir pris dans leur voiture un passager fantôme.

« Est-ce que je suis morte ? »

Le nombre de chauffeurs concernés est assez significatif mais leurs récits sont encore plus impressionnants. Un chauffeur raconte avoir pris dans son taxi une femme, près de la gare d'Ishinomaki, quelques mois après la tragédie. Sa passagère a demandé à être conduite dans le district de Minamisoma, entièrement rasé par le raz de marée. « Mais il n'y a plus rien de debout là-bas ! » a lancé le chauffeur, étonné. La réponse de la jeune femme lui a glacé le sang : « Est-ce que je suis morte ? ». Le conducteur s'est retourné. Il n'y avait plus personne sur la banquette arrière. Un autre chauffeur dit avoir conduit un homme d'une vingtaine d'années à sa destination. A l'arrivée le taxi était vide.

Etrangement, aucun des témoins ne considère ces rencontres comme une expérience traumatisante. « Au contraire, s'étonne Yuka Kudo, c'est un instant qu'ils chérissent, ils se sentent privilégiés. » Les chauffeurs ont d'ailleurs noté ces rencontres dans leur carnet de bord. Autre point commun : ces passagers spectraux étaient tous très jeunes d'apparence. « Comme si leur jeunesse rendait plus amère leur chagrin d'être trop tôt partis » songe la sociologue, qui apparaît ébranlée par la puissance de conviction des chauffeurs de taxi.

Dames blanches et autostoppeuses fantômes

Ces témoignages rappellent les innombrables récits d'autostoppeurs fantômes en provenance d'un peu partout dans le monde mais aussi en France. L'un des cas les plus documentés est survenu en 1981 près de Montpellier. Quatre jeunes gens ont pris en autostop une femme vêtue de blanc et silencieuse. Au bout d'un kilomètre, sur portion de la route dangereuse, la passagère a crié « Attention au virage, attention au virage ! »... avant de s'évaporer comme une bulle de savon. Très secoués, les quatre amis - deux hommes et deux femmes-, se sont précipités à la gendarmerie pour raconter leur histoire. Les témoins, qui n'avaient ni bu ni consommé de substances illicites ont été pris au sérieux par la maréchaussée, qui a consigné leur récit. Par la suite, l'universitaire, spécialiste de la parapsychologie, Yves Lignon a pu rencontrer l'un d'entre eux et a conclu à sa sincérité.