Assemblée
L'hémicycle de l'Assemblée nationale, le 18 juin 2015. Crédits photo : BERTRAND GUAY/AFP
L'article premier du projet de révision constitutionnelle a été adopté à 22 heures lundi soir en l'absence de 441 députés. Un amendement socialiste a par ailleurs suscité l'ire de Manuel Valls.

C'est un important premier pas qui vient d'être franchi. Tandis que le projet de révision constitutionnelle porté par l'exécutif ne cesse de déchirer la classe politique, l'Assemblée nationale a finalement adopté l'inscription de l'état d'urgence dans le texte suprême tard lundi soir. Par 103 voix contre 26 et 7 abstentions, ce vote s'est fait après plusieurs heures de débat au sein de l'hémicycle. Mais, surtout, il s'est fait en l'absence de 441 députés - ce qui représente plus de trois-quarts des élus du palais Bourbon.

Sur LCP, la députée écologiste Cécile Duflot s'est émue de cette faible affluence lors d'une réforme pourtant très importante. «Je trouve d'abord que la tenue de ce débat est un peu triste. 441 parlementaires absents au moment où on constitutionnalise l'état d'urgence... C'est une décision lourde, grave, ça ne peut pas ne pas poser question», a-t-elle déploré. Idem pour le député PS de Seine-et-Marne, Eduardo Rihan-Cypel, qui regrettait dès 16 heures, photo à l'appui, que «cette révision de la Constitution (ne) passionne (pas ses) collègues».


«On ouvre trop de problématiques», déplore Valls

Autre point d'achoppement soulevé dans la nuit: l'introduction d'un amendement interdisant la dissolution de l'Assemblée nationale «pendant toute la durée de l'état d'urgence». Déposé contre l'avis du gouvernement par le député PS de l'Hérault, Sébastien Denaja, cet ajout a d'abord été adopté par les élus présents. Avant d'être finalement voté en même temps que l'article premier dans sa globalité. Le député les Républicains (LR) des Alpes-Maritimes, Éric Ciotti, a immédiatement dénoncé une «faute grave» sur Twitter.

Une vision que le premier ministre Manuel Valls a semblé partager à demi-mots. S'il a tenu à rappeler que le gouvernement était «extrêmement respectueux des amendements déposés de part et d'autre et prêt à toutes les discussions», le locataire de Matignon n'a pas caché son hostilité à cette mesure. «Il faudra sans doute revenir (dessus). On ouvre trop de problématiques. (...) Il faut rester au cadre tel qu'il a été défini, sortir de ce cadre posera d'autres problèmes», a-t-il martelé «dans un souci d'unité et de rassemblement».

Un député fond en larmes pendant les débats

Les débats de nuit dans l'hémicycle sont souvent le théâtre de scènes inhabituelles. Mais si l'ambiance intimiste des heures tardives se prête plus aux fous rires fatigués qu'aux ditatribes endiablées, elle n'inhibe pas les émotions pour autant. Ainsi le député centriste de la Marne, Charles de Courson, a fondu en larmes lors des débats portant sur l'article 2 du projet de révision constitutionnelle. «La déchéance de nationalité limitée aux seules binationaux (...) était inacceptable parce qu'elle était contraire à l'unité de notre Nation», a-t-il d'abord tancé. Avant d'invoquer «la mémoire de (son) grand-père, (...) député qui avait voté contre les plein-pouvoirs au maréchal Pétain». Et de rappeler ensuite que son père, résistant, «avait été qualifié de terroriste par l'occupant nazi».