Alors qu'un sommet entre l'Union européenne et la Turquie sur la question des migrants est en cours à Bruxelles, de nombreuses sources indiquent qu'Ankara accueille les réfugiés à l'arme de guerre. « Dès 2014, on recevait des rapports indiquant que les garde-frontières turcs tiraient sur les réfugiés. » Andrew Gardner vit à Istanbul depuis dix ans. Ce chercheur pour Amnesty International connaît bien le dossier.

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© ReutersLes otages des pourparlers, des guerres, des politiciens, de l'UE seront toujours les réfugiés pris dans un engrenage qui ne semble pas avoir de solution
Depuis des mois, des témoignages de réfugiés, ONG et médecins syriens font état d'exactions commises à la frontière syrio-turque. Les familles qui fuient le conflit en Syrie seraient régulièrement accueillies par tirs et coups. Les rapports font froids dans le dos.

La position officielle turque veut que sa frontière soit ouverte aux réfugiés syriens. Dans les faits, il semble que les choses soient un peu différentes. «La Turquie laisse majoritairement passer les syriens qui ont des passeports. Cela représente peu de monde» souligne Andrew Gardner. Avec plus de 2,5 millions de réfugiés syriens sur son territoire, il semble qu'Ankara ait décidé de fermer la porte. Récemment, un pic d'incidents à été observé à la frontière selon l'activiste.

Témoignages effrayants

Aktham Alwany, journaliste syrien âgé de 28 ans, a tenté de se rendre chez le voisin. Il raconte avoir été passé à tabac à deux reprises alors qu'il tentait de rendre visite à sa mère atteinte d'un cancer. Il a finalement pu se rendre en Turquie en payant... un garde-frontière. Son expérience l'a décidé à passer derrière la caméra pour réaliser un reportage. Au cours du tournage, il a rencontré des réfugiés qui ont été attaqués par des chiens ou ont vu leurs os brisés en tentant de passer de l'autre côté. Un mère a même raconté avoir perdu sa fille. Elle s'est faite transpercé par une balle.

Aktham Alwany n'est pas le seul à avoir obtenu pareilles confessions. «Selon les docteurs syriens, deux ou trois personnes se font chaque jour tirer dessus en essayant de passer la frontière» relate Andrew Gardner. Ali al-Saloum est un de ces docteurs. Chirurgien à l'hôpital d'Azaz, ville toute proche de la frontière avec la Turquie, il raconte avoir eu à faire à tout type de victimes. Des personnes âgées jusqu'à une petite fille d'un an... atteinte d'une balle dans la tête.
«Avant, c'était plutôt rare. Quand cela se produisait, on avait à faire à des gens blessés à la jambe ou au bras. Puis certains ont commencé à se faire tuer» se souvient-il.
Le chirurgien se montre ironique : «Ce qui est cocasse, c'est que nous n'avons pas le matériel ou les spécialistes nécessaires pour gérer les cas les plus graves. Donc on les transfère en Turquie.»