En plein conflit avec les Etats-Unis à propos du projet de bouclier antimissile US en Europe, le président russe Dmitri Medvedev laisse désormais carrément planer le spectre d'une nouvelle "guerre froide".

Trois petits mois et puis s'en va ? Il y en tout cas de quoi se poser la question. Devant un parterre de 800 journalistes du monde entier, le président russe Dmitri Medvedev a en effet évoqué l'éventuel abandon par son pays du traité de désarmement nucléaire signé avec les Etats-Unis (il y a trois mois, donc). Un véritable missile diplomatique, qui plus est lancé en des termes pour le moins virulents : "Ce serait un très mauvais scénario qui nous ferait revenir à l'époque de la guerre froide."

La raison de son courroux ? Disons plutôt "les raisons"... En cause tout d'abord, la nouvelle version du bouclier antimissile que les Américains entendent déployer sur le Vieux Continent. Le message de M. Medvedev a, en l'occurrence, le mérite de la clarté : hors de question pour la Russie d'accepter que le dispositif se trouve sous seul contrôle occidental, alors qu'il devrait couvrir une partie de son territoire...

"J'espère que nous arriverons à coopérer, faute de quoi, nous devrions prendre des mesures de rétorsion... Il s'agirait alors de développer le potentiel offensif de nos capacités nucléaires. Ce qui pourrait mettre à mal tout ce qui a été fait ces dernières années, y compris le traité de réduction des arsenaux nucléaires stratégiques", a-t-il développé, toujours sur le même ton. En résumé, Moscou souhaite faire partie intégrante de ce système de défense contre la menace iranienne, mais s'agace tout de même de cette nouvelle présence des Etats-Unis dans son ancienne zone d'influence.

"Illusions"

Egalement en jeu, l'échéance de l'élection présidentielle russe en mars 2012. Si Vladimir Poutine et lui s'escriment toujours à préserver les apparences de leur alliance politique, toute la Russie bruisse déjà d'un duel à venir. Et leurs divergences, notamment en ce qui concerne la modernisation du pays, ne sont déjà plus un secret pour personne... Un contexte qui a de quoi pousser le président russe à faire vibrer la fibre patriotique de ses compatriotes sur la scène internationale.

"Personne ne reste au pouvoir pour toujours. Ceux qui entretiennent ce genre d'illusions finissent mal", a d'ailleurs lâché Dmitri Medvedev au cours de cette même conférence de presse, dans ce que l'opinion publique considère comme une allusion à peine voilée à son Premier ministre, actuellement à la manoeuvre pour rendre possible sa candidature. Lequel n'a pas pris la peine de réagir à ce roulement de mécaniques. Au contraire des Etats-Unis, dont le département d'Etat a réaffirmé sa volonté de "coopérer avec la Russie"... Avant une éventuelle guerre froide, les prochains mois s'annoncent donc plutôt chauds.