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L'ancien président de la République Nicolas Sarkozy a été mis en examen ce jeudi à Bordeaux pour abus de faiblesse à l'encontre de l'héritière de l'Oréal Liliane Bettencourt. Son avocat Me Thierry Herzog a annoncé son intention de «former immédiatement un recours».

Cette décision du juge d'instruction Jean-Michel Gentil a été prise à l'issue d'une confrontation à laquelle ont participé au moins quatre membres du personnel de Liliane Bettencourt : l'ex-majordome Pascal Bonnefoy, une ancienne femme de chambre, Dominique Gaspard, l'infirmière Henriette Youpatchou, et un autre maître d'hôtel, selon le récit qu'en a fait Pascal Bonnefoy à son avocat Me Antoine Gillot.


Le parquet rappelle que Sarkozy est présumé innocent


Le parquet de Bordeaux a confirmé cette mise en examen prononcée par les juges d'instruction bordelais en charge du dossier. «Dans le cadre de l'information judiciaire suivie à raison de faits d'abus de faiblesse, d'abus de confiance aggravés, d'escroqueries aggravées au préjudice de Mme Liliane Bettencourt, trois magistrats instructeurs co-saisis, ont, ce jour 21 mars 2013, recueilli l'audition de M. Nicolas Sarkozy, lequel était assisté de Maître Thierry Herzog, avocat au Barreau de Paris», annonce le parquet dans son communiqué.

«Au terme de cet acte, M. Nicolas Sarkozy, qui bénéficie de la présomption d'innocence - s'est vu notifier une mise en examen du chef d'abus de faiblesse commis en février 2007 et courant 2007 au préjudice de Mme Liliane Bettencourt Schuller», conclut ce communiqué.

Une décision «incohérente et injuste» selon l'avocat de Sarkozy

Me Thierry Herzog, l'avocat de Nicolas Sarkozy, a qualifié cette mise en examen de décision «incohérente sur le plan juridique et injuste». «Je saisirai en conséquence immédiatement la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Bordeaux pour former un recours et pour demander la nullité, notamment de cette mise en examen», a-t-il déclaré.

La journée a été longue pour l'ex-président qui a quitté le palais de justice de Bordeaux peu avant 22 heures. La confrontation avec des membres du personnel de la milliardaire avait débuté en début d'après-midi, elle s'est terminée vers 17 heures. Il s'agissait pour le juge Gentil de vérifier combien de fois l'ancien président avait pu se rendre au domicile de Liliane Bettencourt pendant sa campagne présidentielle de 2007, et s'il l'a rencontrée à cette occasion. C'est en tout cas ce qu'affirment plusieurs membres du personnel.

Puis Nicolas Sarkozy est resté encore un long moment avec le juge d'instruction Jean-Michel Gentil. Seul cette fois.

Seize personnes ont déjà été mises en examen par le juge Gentil et ses deux collègues depuis deux ans et demi dans cette affaire, partie d'une plainte, déposée fin 2007 par Françoise Bettencourt Meyers, la fille de Liliane, pour des abus de faiblesse à l'encontre de sa mère. La clôture définitive du dossier par le magistrat, qui a déjà demandé plusieurs fois sa mutation dans d'autres tribunaux, est attendue incessamment, et la confrontation de ce jeudi pourrait être le dernier acte important de son enquête.

Enquête sur le financement de la campagne de 2007

Le juge d'instruction Jean-Michel Gentil et ses deux collègues, Cécile Ramonatxo et Valérie Noël, enquêtent sur un éventuel financement illégal de la campagne électorale de Nicolas Sarkozy en 2007, du vivant de l'ancien ministre André Bettencourt, époux de la femme la plus riche de France, décédé en novembre 2007. Ils veulent savoir s'il a bénéficié d'une partie des 4 M€ en liquide que l'ancien homme de confiance des Bettencourt, Patrice de Maistre, avait fait revenir depuis un compte suisse des milliardaires. Ce dernier, ainsi qu'Eric Woerth, ancien ministre et ex-trésorier de la campagne de 2007, ont été mis en examen dans cette affaire.

Nicolas Sarkozy, convoqué dans le cadre du dossier des abus de faiblesse dont aurait été victime Liliane Bettencourt depuis septembre 2006, avait été placé sous le statut de témoin assisté par le juge le 22 novembre 2012, à l'issue de douze heures d'audition. Il a toujours affirmé s'être rendu au domicile des Bettencourt une seule fois pendant sa campagne présidentielle de 2007, pour y rencontrer brièvement André Bettencourt

Le juge Gentil a multiplié les auditions avec le personnel de la milliardaire, jusqu'à fin février de cette année, car certains ont déclaré avoir vu M. Sarkozy au moins deux fois pendant cette période, et certains assurent qu'il avait rencontré Mme Bettencourt à ces occasions. Selon Mme Gaspard, Mme Bettencourt était même «toute contente de l'avoir vu», a indiqué en janvier «Libération». Un chauffeur, rapportant les paroles d'une gouvernante décédée, a même assuré que celle-ci lui a «dit textuellement qu'il était venu demander de l'argent, des sous, à monsieur et madame».