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Il y a quelques jours, Benoît Rittaud, professeur de mathématiques à l'université Paris XIII et habitué de nos colonnes, a donné une conférence à l'Assemblée nationale sur la peur exponentielle dans le domaine du réchauffement climatique. Elle s'inscrit dans le cadre du collectif des climato-optimistes (le nom pourrait évoluer dans les prochaines semaines), qui vise à porter la contradiction aux thèses défendues par le GIEC d'ici la COP21, pour en limiter les effets potentiellement désastreux.

Qu'est-ce que la peur exponentielle ?

Nous invitons les lecteurs qui voudraient approfondir la question à se reporter à la lecture des articles suivants (celui-ci et celui-là). Nous pouvons résumer ce concept en expliquant qu'il s'agit d'un néo-malthusianisme, fondé sur l'idée que les progrès économiques et techniques, sans cesse en accélération, devraient finir par se heurter à la réalité d'un monde aux ressources limitées, provoquant l'effondrement de la civilisation.

À travers quatre idées largement répandues sur la question climatique, Benoît Rittaud va prendre des données officielles et montrer qu'elles sont ainsi largement exagérées, voire mensongères.

Sur la question du réchauffement en lui-même

Courbes satellitaires à l'appui (produites par l'Université d'Alabama), Benoît Rittaud remarque une tendance au réchauffement, légère mais indiscutable, d'environ un degré par siècle (graphique 1), inférieur au rythme de deux degrés considéré par le GIEC comme le maximum à ne pas franchir. Deux constats peuvent être tirés de ce graphique. D'une part cette tendance ne connaît aucune accélération particulière ces 30 dernières années par rapport au début du siècle, comme le montre le même graphique sur une plus longue période, et ce malgré la quantité sans cesse plus importante de carbone et autre gaz à effet de serre rejetés dans l'atmosphère. D'autre part, on observe le fameux « plateau » qui a été abondamment discuté, et qui selon certains serait le signe d'une pause dans le réchauffement depuis environ 17 ans.

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© Inconnu
En longue période (graphique 2), on peut donc tirer le même constat. Entre 1910 et 1940, il se produit un réchauffement régulier ; selon Benoît Rittaud, il est peu probable que les humains en soient responsables, du fait de la faiblesse relative des émissions de GES. La hausse passée est très voisine en durée et en intensité de celle observée depuis 1970, malgré des émissions de carbone bien inférieures à ce qu'elles sont aujourd'hui. Il y a même une période de stagnation entre 1940 et 1970, en pleine période d'industrialisation occidentale.

Bien entendu la lecture d'un ou plusieurs graphiques ne constitue en aucun cas une preuve scientifique permettant d'affirmer ou d'infirmer la cause anthropique du réchauffement. « Ce qui compte, c'est la mise au jour d'un mécanisme climatique précis et irréfutable qui permette de comprendre précisément l'interaction des différents éléments en jeu. Or, s'il existe sur ce point de nombreuses pistes de réflexion, aucune n'est capable d'expliquer de manière indiscutable pourquoi la terre se réchauffe », explique Benoît Rittaud.

Seconde question, le niveau des océans

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La hausse mesurée est équivalente à environ 30 cm par siècle (Church, J. A., and N. J. White (2011), « Sea-level rise from the late 19th to the early 21st century », Surv. Geophys., 32, 585 - 602, doi:10.1007/s10712- 011-9119-1) si l'on observe depuis 1980. D'autres données (graphique 3) de plus longue période montrent une élévation d'environ 20 cm par siècle. Ceci pourrait laisser penser précisément à une accélération en fin de période, mais il n'en est rien car les deux données ne reposent pas exactement sur la même base. On remarque une très grande régularité de la tendance, qui ne montre aucune accélération particulière quelle que soit l'échelle de temps considérée. « Nous sommes en présence d'un phénomène qui s'étale sur le temps long et qui ne démontre aucune implication spécifique de l'être humain sur cette évolution ». Il faut donc bien s'attendre à une élévation du niveau des mers pour le siècle en cours, mais il n'y a aucune raison de penser que l'être humain ne saura pas s'y adapter, comme il l'a fait au siècle précédent.

La banquise fond. Peut-être mais laquelle ?

Chaque année émergent de nouvelles craintes de disparition de la banquise Arctique en été. S'il s'est effectivement produit une chute de son étendue de 1996 à 2007, celle-ci ne se poursuit plus depuis. Rappelons qu'Al Gore avait prédit la fin de la banquise d'ici 2013, ce qui ne s'est pas produit. Il est malheureusement impossible de connaître l'état de la banquise avant le début du XXe siècle, même s'il existe un certain nombre de témoignages parcellaires des navigateurs.

Ce qui est certain en revanche est que la banquise Antarctique n'a jamais été aussi grande depuis les mesures du début du XXème siècle. Plus important encore, la somme de la perte et de la hausse donne une très grande stabilité. Le décrochage vers le bas de 2007 à 2012, utilisé par les réchauffistes comme élément de preuve a été rattrapé depuis.

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Autre élément souvent cité, la fréquence des événements extrêmes

À chaque événement un peu violent, est mis en cause le réchauffement. Celui-ci serait responsable d'une augmentation significative des « dérèglements climatiques », provoquant tempêtes, cyclones, et même tremblements de terre comme n'hésitait pas à l'affirmer François Hollande lors de sa visite aux Philippines. Il n'en est pourtant rien. Si l'on traduit ces événements en termes d'énergie dégagée, et que l'on observe depuis 1970, on obtient le graphique suivant :

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Comment avec des faits nets peut-on faire naître la peur climatique ?

En 2014, a été rendu à la ministre Ségolène Royal un rapport rédigé sous la direction de Jean Jouzel, Climat de france au XXIème siècle. Et, comme d'habitude, le chiffre le plus alarmant a été retenu, à savoir un potentiel réchauffement de 5° pour l'été 2100. Le rapport présente plus en détail 3 scénarios possibles en fonction de la concentration en carbone ; et Benoît Rittaud y pointe un certain nombre d'incohérences. En particulier, les scénarios les plus réchauffistes ne sont pas ceux où la concentration en carbone est la plus importante, comme l'indique ce tableau extrait du rapport :

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Un autre raccourci étonnant effectué par les rédacteurs, est celui de la carte de France du climat d'ici la fin du siècle. L'un des modèles présente un axe de réchauffement Nord/Sud, un autre présente un axe Est/Ouest, ce qui, dans la synthèse, donne : « les modèles s'accordent sur la répartition croissante de l'augmentation de température selon un axe Nord-Ouest/Sud-Est... »

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Et la peur exponentielle dans tout ça ?

Benoît Rittaud termine sa conférence par un certain nombre d'extraits de discours, d'articles etc. venus de tous horizons et qui ont en commun d'être produits par des personnes exprimant leur crainte des conséquences du développement humain sur le climat. Les quelques extraits suivants sont très proches sur le fond :
- Le pape François, dans son encyclique « Laudato si' » : « l'accélération continuelle des changements de l'humanité et de la planète... »... « cela suppose le mensonge de la disponibilité infinie des biens de la planète, qui conduit à la 'presser' jusqu'aux limites et même au-delà des limites. »
- Philip Abelson, Science (1968) : « notre ennemi le plus dur est l'inexorable exponentielle. »
- Robert Lattès, préface à Halte à la croissance ? (1972) : « nous sommes impitoyablement menacés par ces phénomènes multiplicateurs qui, tels les neutrons d'une bombe atomique ou les cellules d'un cancer, engendrent en tout la saturation. »
- Donella Meadows, The Global Citizen (1991) : « la raison pour laquelle les environnementalistes sont souvent si sombres, c'est qu'ils savent ce que le mot exponentiel signifie. »
Les exemples sont légion qui montrent que cette vieille peur de la croissance trouve sa plus belle expression dans la lutte contre le réchauffement climatique. De plus en plus irrationnelles, ces prises de position ne sont malheureusement pas sans conséquence. Alors que le « marché du climat » est estimé à plus de 47.000 milliards de dollars d'ici la fin de siècle, gageons que si rien n'est fait pour s'opposer à ce nouvel obscurantisme, nous allons assister à un véritable réchauffement... fiscaliste.