C'était il y a pile deux ans, et malgré les manœuvres des lobbys pro nucléaire tentant d'imposer le silence, la catastrophe de Fukushima reste encore dans toutes les mémoires.

exlosion Fukushima
© Inconnu
Tout comme à Tchernobyl, (ou à Penly), c'est une fois de plus l'erreur humaine qui est à l'origine de la catastrophe, démontrant que toutes les sécurités du monde ne peuvent empêcher un accident majeur, et tirant la conclusion qu'aucun pays ne devrait être autorisé à produire de l'énergie avec une technologie représentant potentiellement un danger majeur.

Une autre leçon pourrait être tirée de cette catastrophe : de Three miles Island, à Fukushima, en passant par Tchernobyl, chacun de ses accidents a dépassé en violence le précédent, ce qui n'augure rien pour la suite, et comme les principaux pays ou le nucléaire est solidement implanté ont chacun eu leur accident, il ne reste plus guère que la France a avoir échappé provisoirement à l'accident majeur.

Or, d'après l'IRSN, s'il se produisait en France, il coûterait entre 171 et 939 milliards. lien

La Cour des Comptes et l'ASN, (autorité de sureté nucléaire) ne disent pas autre chose dans un rapport paru en janvier 2012 en déclarant : « les estimations préliminaires de l'IRSN montrent un coût moyen compris entre 70 Milliards d'euros (...) à Three Miles Island en 1979, et 600 milliards d'euros à 1000 milliards d'euros pour accident très grave comme ceux de Tchernobyl ou de Fukushima ». lien (page 425)

Aujourd'hui, c'est une certitude, Fukushima aura des effets dévastateurs bien au-delà de Tchernobyl.

Pourtant, ce n'est pas ce que disaient les « experts » en la matière, comme par exemple James Stubbins, qui, peu de temps après l'accident avait affirmé : « la probabilité qu'il y ait un feu important comme à Tchernobyl où une importante émission radioactive comme à Tchernobyl je pense que c'est fondamentalement impossible ». lien

Aujourd'hui encore, une importante partie de la population du secteur pollué habite toujours sur place, seul ceux qui habitaient dans le rayon de 20 km ayant été évacués, avec leurs enfants sous surveillance. lien

D'après la CRIIRAD « en l'absence de mesures de protection appropriées, des centaines de milliers de personnes auront encore subi en 2012 des doses de radiation inacceptables ». lien

Comme l'un des produits radioactifs relâché, le césium 137, ne décroit de moitié qu'au bout de 30 ans, on peut logiquement s'attendre à la multiplication des cas de leucémie, ou de cancers, au fil des années.

Les experts de l'OMS viennent d'ailleurs de faire état du risque d'une augmentation de certains cancers dans la préfecture de Fukushima : 6 % pour le cancer du sein, 7 % pour la leucémie, et 70 % pour le cancer de la thyroïde. lien

D'autre part, les réfugiés de la région sinistrée ont décidé d'intenter le 11 mars, une « class-action » pour obtenir enfin une indemnisation mensuelle de 400 € chacun, à compter du jour de leur évacuation. lien

Dans le reste du monde, les médias se font très discrets sur cette catastrophe qui perdure au Japon, et pourtant, la situation est de plus en plus critique : « l'arrêt à froid » décrété le 16 décembre 2011 ressemble de plus en plus à une opération de communication, les containers d'eau continuent de se remplir, TEPCO est encore incapable de déterminer l'état du combustible fondu, et il doit continuellement refroidir ce qui reste des réacteurs, provocant une production considérable d'eau radioactive, laquelle est stockée dans d'énormes réservoirs.

Les réacteurs 1, 2, et 3 rejettent toujours de l'ordre de 10 millions de becquerels à l'heure, et les fuites se multiplient sur les 4 km de tuyaux déployés pour évacuer l'eau contaminée. lien

Les réservoirs prévus sur le site ont une capacité totale de 257 000 tonnes, et le 11 décembre, les 237 000 tonnes étant atteints, Tepco à déboisé de nouvelles surfaces afin de pouvoir stocker jusqu'à 700 000 tonnes d'eau radioactive d'ici 3 ans, sauf qu'il faudra encore tenir 40 ans. lien

Cela représentera des milliers de containers, puisque depuis le début de la catastrophe, ce sont 500 tonnes d'eau radioactive qui sont produites chaque jour, ce qui signifie qu'en 21 mois, 315 000 tonnes d'eau radioactive ont été relâchées, et une bonne partie de cette eau est aujourd'hui dans l'océan. lien

Il faut croire que l'installation due à AREVA qui devait permettre une dépollution partielle de l'eau connait quelques défaillances. lien

En effet, 400 tonnes d'eau continuent chaque jour à s'infiltrer dans le sol, et d'après Shunichi Suziki, directeur général de Tepco, il faudra peut-être 4 ans pour régler ce problème, ce qui ralentit d'autant plus le retrait du combustible qui baigne dans les piscines, piscines dont une, celle du réacteur n°4 pose le plus de problème : pleine de trop d'assemblages, encombrée de poutrelles tombées sur le fond, et risquant de ne pas résister au prochain séisme, malgré les consolidations, même si Tepco affirme qu'elle va tenir le coup. lien

On pourrait aussi s'inquiéter des fumées remarquées sur le site, qui pourraient venir d'incinération illégale de déchets radioactifs. lien

Le gouvernement japonais a demandé à l'exploitant de revoir son calendrier, car le nettoyage du site pourrait prendre entre 30 et 40 ans, et la seule fermeture des réacteurs pourrait couter au moins 80 milliards d'euros. lien

Par tirage au sort, le 6 mars dernier, quelques médias ont été autorisés à visiter le site dévasté. Ils ont constaté l'irréalité de l'arrêt à froid, réacteurs et piscines étant continuellement arrosés, d'autant que l'équipe de France 24 a récolté 70 microSv en 2 heures, malgré les combinaisons radiologiques. lien

Et si, dans le fond, le nucléaire n'était qu'une banale histoire d'eau ?

En effet, sans l'eau, la radioactivité relâchée ne serait jamais plaquée au sol, et ferait vraisemblablement moins de dégâts.

Aux USA, sur le site de l'ex centrale de Hanford, site immense qui s'étend sur plus de 1 500 km², à 250 kilomètres de Seatle, capitale culturelle et commerciale de l'Etat de Washington, des fuites radioactives, superbement ignorées par les médias américains, menacent l'environnement.

La centrale est fermée depuis longtemps, et un accord avait été passé entre le gouvernement fédéral et l'Etat de Washington jusqu'au 22 février 2013, date à laquelle Jay Inslee, gouverneur de l'état, à révélé que 6 réservoirs souterrains contenant des matières hautement radioactive fuyaient, dont du plutonium, la période de celui-ci étant de plus de 24 000 ans.

Sur ce site, il y a 170 cuves contenant 200 000 m3 de déchets hautement radioactifs, et selon Tom Carpenter, président de l'association écologiste Hanford Challenge, 149 cuves n'ont qu'une seule coque, le tiers de ces cuves ayant déjà connu des fuites, laissant s'échapper 3,78 millions de litres. lien

En France, ces fuites d'eau se multiplient, ce qui ne devrait surprendre personne, puisque certaines de ces centrales ont plus de 25 ans, ayant donc dépassé largement la date de péremption, le matériel vieillit, des fissures se créent, et l'eau fuit de tous côtés. lien

A Bugey, par exemple, ça fait déjà quelques mois que des fuites à répétition se produisent, même si elles n'ont été signalées que tardivement. lien

A Penly, ce n'est pas mieux : ce n'est qu'en février 2013 qu'on a appris que « des défauts d'étanchéités relevés sur certains puisards ont provoqué des fuites d'eau radioactive », ce que savait le responsable du service de communication de la centrale dès octobre 2012 : 60 Becquerel/L de tritium avait alors été détecté dans la nappe d'eau souterraine. lien

Au Tricastin, 33 défauts de revêtement ont été observés sur 9 cuves dont 20 sur la seule cuve du réacteur n°1. lien

Un reportage sur l'état de cette centrale et les pannes à répétition de celle-ci, réalisé par next-up organisation est sur ce lien.

Et quid de la vieille centrale de St Alban qui accumule les problèmes ? lien

Au Luxembourg, Jean Asselborn, ministre des affaires étrangères, s'inquiétant de la vétusté de la centrale de Cattenom, l'a fait remarquer à Delphine Batho. la dangerosité et la proximité de cette centrale de la frontière du Grand Duché (à peine à 8 km) l'inquiète : « la seule solution valable serait que Cattenom soit débranchée », d'autant qu'elle n'est pas protégée en cas de crash d'avion. lien

Un accident nucléaire en France, et c'est la fin de la démocratie...ainsi l'a écrit Antonio Pagnotta, auteur du livre Le dernier homme de Fukushima. lien

Pourtant tout espoir n'est pas perdu.

Dans l'émission de Ruth Stegassy « terre à terre », (France culture) l'invité était Jean-Louis Basdevant, ancien professeur de physique à Polytechnique, formateur de générations d'ingénieurs des mines, fatalement pro nucléaires, et quelques jours après Fukushima, il avait publié un livre Maîtriser le nucléaire : sortir du nucléaire après Fukushima, prenant enfin conscience des dangers que véhicule cette énergie, énergie qu'il défendait auparavant. lien

Il a remarqué que nous avions un accident majeur en moyenne tous les 10 ans, alors que le nucléaire dans le monde ne rentre que pour 7 % dans l'énergie consommée, ajoutant que si on passait de 500 réacteurs dans le monde, à 5 000, on récolterait théoriquement d'un accident majeur tous les ans. lien

Aujourd'hui, ses amis le traitent avec mépris d'écolo, mais sa prise de conscience tardive devrait faire réfléchir tous ceux qui clament encore que le nucléaire est l'avenir.

Comme dit souvent mon vieil ami africain : « Le monde est sombre quand on garde les yeux fermés ».

Merci aux internautes pour leur aide précieuse.

Bonus

Une pétition à signer pour défendre les énergies propres.

Films à voir : « Fukushima, chronique d'un désastre » ARTE

« Terres Souillées », documentaire de Marie Dominique Robin

Beaucoup de vidéos sur le site de Scoop It.

A lire : « Fukushima, récit d'un désastre » de Michaël Ferrier

A découvrir : ce reportage dans la zone interdite, ainsi que ces vidéos décrivant chronologiquement la catastrophe.

Retrouver les sites à visiter conseillés par cet article sur Agoravox.