Note : Cet article a été remanié par l'auteur depuis sa parution en 2013 et peut être consulté ici.


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La circoncision, ses mythes et rumeurs : le plus grand crime contre l'humanité, catalyseur de fanatisme, terrorisme, génocide et féminicide, et un racisme artificiel masqué derrière culture, tradition, religion et folklore.

La Circoncision de Jésus (fresque de Jean Canavero, XVe siècle, église Notre-Dame-des-Fontaines.
© Lenars CLa Circoncision de Jésus, fresque de Jean Canavero, XVe siècle, église Notre-Dame-des-Fontaines.
« Tout homme qui a choisi le mensonge comme moyen doit inexorablement choisir la violence comme règle ».
~ Alexandre Soljénitsyne
« Le sexe de (l'enfant) apparaît bien comme un enjeu de possession, un symbole de soumis-sion.
~ Simone Veil, qui a écrit « la femme » au lieu de « l'enfant »1
Alors que la plupart des cultures respectent l'anatomie humaine, une minorité (20 % de l'humanité) détruit les organes spécifiques de l'auto-sexualité (le prépuce, et parfois le clitoris). Cependant, l'usage fréquent du même terme pour les deux mutilations montre que la circoncision est responsable de l'excision. Mais les ravages de l'excision ne sont que le sommet de l'iceberg des mutilations sexuelles. Car si les dommages physiologiques et sexologiques de la circoncision sont le plus souvent occultés, ses conséquences psychologiques au niveau mondial sont dramatiques ; pratiquées en masse sur des mineurs, ces sacrifices humains avec torture sont le comble des méthodes d'éducation brutales qui enseignent la violence, la barbarie, le sexisme et le racisme. L'ineptie de la circoncision éclate dans le fait qu'un des principaux résultats escomptés : réduire l'appétit sexuel, n'est pas atteint. On doit penser que d'autres buts sont visés.

Miriam Pollack a ainsi montré que la circoncision est une affaire de sexisme2. La circoncision est d'autant plus sexiste qu'elle force l'homme à dominer la femme dans le coït. Le sexisme étant le degré zéro du racisme, il n'est pas étonnant que ce dernier soit présent dans ces mutilations obscènes. Le racisme des mutilations sexuelles apparaît à deux niveaux :

A - La confusion des idées (« raisonnement » par amalgame) est au cœur de la pensée raciste. Or le racisme des mutilations sexuelles repose sur une série d'amalgames

1. L'amalgame entre mutilation sexuelle et supériorité. L'extravagant sentiment d'une supériorité physique a été dénoncé par Reyes et Zagdanski3. L'idée d'une supériorité morale relève d'un ordre moral puritain4. Le grand dessein, inavoué, des mutilations sexuelles, est de dominer la jeunesse par la terreur d'un sacrifice humain évoquant la castration et la peine de mort. Mais la motivation traditionnelle est de fabriquer des surhommes (surfemmes) prétendus moralement supérieur(e)s, élu(e)s de Dieu ou des ancêtres. Fondée sur une différenciation physique, cette discrimination est une sorte de racisme artificiel5. Reposant sur une culpabilité et une volonté de punir ineptes, cette revendication de supériorité morale, voire même spirituelle (la mutilation suggère l'abstention et le mépris de l'auto-sexualité érigée en péché), est hypocrite et mégalomane.

Couteau de circoncision avec la figure du dieu Anubis (Paris, musée du Louvre)
© Lessing ECouteau de circoncision avec la figure du dieu Anubis (Paris, musée du Louvre)
2. L'amalgame entre genre et sexe. Parfois présent (cultures africaines), il imagine que la suppression des organes sexuels évoquant le sexe opposé confèrerait une supériorité par un plus de féminité ou de masculinité.

3. L'amalgame entre signe physique distinctif et handicap ignoré6. Le 7 mai 2012, obtenant l'assentiment de soixante dix pour cent de la population, le tribunal de grande instance de Cologne a condamné la circoncision des mineurs en Allemagne mais toléré la mutilation élective à l'âge adulte. Or la bioéthique élémentaire7-8-9 ne fait aucune distinction d'âge pour interdire la mutilation sans « motif médical très sérieux »10.

4. L'amalgame entre signe particulier et signe d'identité ethnique. Il relève d'un choix sectaire qui fait insulte à l'espèce humaine. Distinguer l'ethnie par une opération chirurgicale est une folie collective11 discriminatoire, ultra-raciste. La psychiatrie la qualifierait de syndrome de Münchhausen par procuration transgénérationnel et collectif12. Les fanatiques adorateurs de Cybèle (Grèce antique), ceux de la secte des Skoptzis (Russie) et les Hidjas de l'Inde ne s'arrêtaient ou ne s'arrêtent pas à la castration du prépuce ; ils tranchaient ou tranchent l'intégralité du pénis !

B - L'endogamie

Ce racisme éclate dans le fait que les mythes et rumeurs sur la circoncision sont une odieuse manipulation des jeunes femmes ; elle vise à les persuader que les « non-circoncis » sont débauchés, sans hygiène, mauvais amants et,dans les cultures pratiquant la mutilation après l'âge de la parole, lâches (selon le proverbe africain rappelé par Mandela : « Un non-circoncis n'est pas un homme. ». Ces superstitions sont l'œuvre d'un patriarcat qui vise à s'assurer la possession des femmes par l'endogamie dans l'illusion de renforcer la cohésion et la perpétuation de la communauté. Ce racisme est encore plus nettement affirmé pour l'excision féminine pour laquelle, dans nos pays, les parents affirment : « Si on ne le fait pas, elles ne trouveront pas de mari. » Dans l'ethnie peut-être ! Mais on peut en dire autant de la circoncision : « Si nous ne le circoncisons pas, il ne trouvera pas à se marier. », sous-entendu « dans la communauté ». Un racisme chirurgicalement renforcé est bien un comble de racisme.Masqué derrière culture, tradition, religion et folklore, le racisme artificiel de la circoncision est plus insidieux que le racisme ordinaire. Sa forme la plus impudente est le racisme de droit divin :
« ... Je te fais le père d'une multitude de nations ... »
« A l'âge de huit jours, que tout mâle, d'entre vous, soit circoncis... »
~ Genèse : 17-5 et 17-12
Cérémonie du Berith mila
© Encyclopédie LarousseCérémonie du Berith mila
Il n'est pas étonnant qu'il suscite des contre-racismes. Spinoza, Freud et Rozenberg13 ont signalé ce danger.Les deux grandes découvertes de Sigmund Freud sont l'inconscient et la sexualité hypocritement dite infantile (auto-sexualité). Ceux qui font, sur des enfants sans défense, le sacrifice des organes spécifiques de cette dernière agissent sous l'emprise d'une culpabilité inconsciente de leur propre auto-sexualité. Cette culpabilité culturellement transmise a des conséquences insoupçonnées. Le fondateur de la psychanalyse explique ainsi la haine antisémite :
« L'hypothèse selon laquelle nous pouvons aussi chercher ici une racine de ces haines des Juifs qui émergent de façon si primaire et génèrent des comportements si irrationnels chez les occi-dentaux, me paraît incontournable. La circoncision est inconsciemment assimilée à la castra-tion. »14
Mais Freud n'a pas poussé jusqu'au bout son raisonnement. Car pour l'inconscient qui, selon lui, assimile la partie au tout, une menace de castration est aussi une menace de mort. Or exercée sur l'ensemble d'une ethnie, une menace de mort individuelle devient, par addition, une menace d'extermination du groupe tout entier, immédiatement projetée par l'inconscient sur le groupe adverse. La circoncision est ainsi un pousse au génocide.

Sur les treize génocides des temps modernes : congolais (1870), héréros (1904), arméniens (1905), juifs (1942-45), tziganes(1942-45), biafrais (1966-68), hutus (1972), kurdes (1988), tutsis (1990), bosniens (1991-95), bengalis (1990-2000), habitants du Darfour (2003), Rohinghyas (2012), douze ont impliqué des peuples circoncis d'un côté au moins et trois des deux côtés. Six ont été perpétrés par des « non »-circoncis (intacts) et six par des circoncis, dont trois contre des intacts et trois contre d'autres circoncis. Seul celui des Tziganes a été perpétré entre intacts. Mais l'exception tzigane n'en est pas tout à fait une dans la mesure où une minorité de tziganes sont circoncis. Force est de constater la grande étroitesse du lien entre circoncision et génocide.

la-caverne-des-circoncis_Peintures rupestres dans une grotte de Songo, en pays dogon (Mali)
© InconnuLa caverne des circoncis, peintures rupestres dans une grotte de Songo, en pays dogon (Mali)
Entre 1996 et 2002, à l'exception d'une guerre civile (Sri Lanka), toutes les guerres ont inclus au moins un pays circonciseur. Leur fréquence fut plus de trois fois plus élevée dans les pays circonciseurs. La peine de mort y est deux fois plus répandue. La torture y est plus répandue. Ils sont les seuls à pratiquer l'excision. Le féminicide dans l'est du Congo est l'œuvre de pillards Hutus circoncis qui détruisent après usage celles qui leur ont fait fonction de prépuce. Le Congo circoncis détient le record du monde du viol : 400 000 par an. En Norvège, entre 2006 et 2010, deux pour cent de circoncis commirent cent pour cent des viols sur quatre vingt dix pour cent de norvégiennes de souche. Les mutilations sexuelles séparent l'enfant de la mère par la violence à l'âge de l'attachement. C'est monstrueux, le résultat est catastrophique ; elles sont le terreau du sexisme, de la paranoïa (réciproque), du fanatisme et du terrorisme de groupe ou d'état.

La circoncision fait l'équilibre de la terreur et la fortune des marchands de canon. La répression de l'auto-sexualité par le matriarco-patriarcat est une maladie planétaire qui assassine Mozart en masse ; rares sont ceux qui lui échappent. Les excisions sexuelles sont son plus haïssable instrument. Quasi-castration pour les femmes, véritable menace de castration pour les hommes, elles sont une menace de mort pour l'individu et d'extermination pour le groupe. Les participants au premier symposium de NOCIRC furent les premiers à affirmer : « Le plus grand crime contre l'humanité est la torture et la mutilation des enfants. »15. Alice Miller reprit le propos16. Vu l'âge des victimes, c'est le seul crime contre l'humanité dont personne ne se plaint. C'est aussi le seul qui, perpétré dans des croyances aveugles et sans intention de nuire, ne soit pas punissable. En tous cas, la médecine ne peut pas apporter la caution de la science aux rituels primitifs. Fondamental, le droit au corps doit figurer dans l'Article 1 de la Déclaration universelle des droits de la personne humaine :

« Tous les êtres humains naissent libres et égaux en droits, en premier lieu le droit au corps, dans ses trois dimensions d'intégrité, dignité et autonomie. »

A propos de l'auteur

Michel Hervé Bertaux-Navoiseau - Chercheur indépendant en psychanalyse, ancien élève du Département psychanalyse de l'Université de Paris VIII, auteur de Mutilations sexuelles masculines et féminines, le plus grand crime contre l'humanité, disponible gracieusement sur academia.edu - oldsigismund@hotmail.com

Notes

1 - Veil S. Préface au supplément au Bulletin de l'Académie nationale de médecine 2004, 188 (6).
2 - Pollack M. « Circumcision, identity, gender and power »
3 - Reyes A., Zagdanski S. La vérité nue, Paris : Pauvert ; 2002. p. 145-46.
4 - Bertaux-Navoiseau M. « Mutilations sexuelles et ordre moral (problématique et concepts de base de la lutte contre les mutilations sexuelles) »
5 - Bertaux-Navoiseau M. « Entre barbarie et exclusion, la circoncision, nec plus ultra du racisme »
6 - Bertaux-Navoiseau M. « Le prépuce est une lèvre à fonction sexuelle, et donc un organe ; son ablation est une mutilation »
7 - Haas J., The totality and integrity of the body. Ethics & Medics, 1995, 20.2.
8 - Austriaco N., Requests for elective amputation, Ethics & Medics, 2011, 36.2.
9 - Peters E., Canon law and apotemnophilia, Ethics & Medics, 2011, 36.2.
10 - Article 41 du code de déontologie médicale.
11 - Bertaux-Navoiseau M. « La circoncision, une dangereuse folie collective : d'une psychose individuelle à une psychose collective, psychiatrie, psychanalyse et circoncision »
12 - Matteoli R., Blood Ritual, the Münchhausen complex. Nunzio press ; 2008.
13 - Rozenberg J., Biologie de la race et psychopathologie, Archives de philosophie, 2001, 64.
14 - Freud S. L'homme Moïse et la religion monothéiste, 1936. Paris : Gallimard ; 1986. p. 184.
15 - Déclaration du premier symposium de NOCIRC. 1985.
16 - Miller A., Introduction aux réflexions sur les mutilations sexuelles, dans La connaissance interdite - Affronter les blessures de l'enfance par la thérapie. New York : Doubleday ; 1990. p. 131.