Image
Une salariée de GRDF a été condamnée par le tribunal correctionnel de Versailles (Yvelines) pour avoir fait des quenelles à des policiers municipaux qui verbalisaient sa collègue.

Les quenelles sont restées sur l'estomac des policiers. Estelle, 28 ans, comparaissait lundi 6 octobre devant le tribunal correctionnel de Versailles pour outrage. Le 14 février dernier, elle s'était emportée après deux policiers municipaux de Sartrouville. Leur adressant notamment des quenelles, geste popularisé par l'humoriste Dieudonné, ayant une signification antisystème pour certains et antisémite par d'autres.

«Un geste particulièrement déplacé»

Ce jour-là, vers midi, cette agent de GRDF s'est arrêtée à la gare pendant son service pour acheter un sandwich. Sa collègue l'attend dans le véhicule sérigraphié à l'effigie de l'entreprise. Sauf qu'elle est garée sur un trottoir. À la demande de la police municipale, elle déplace la voiture mais va se stationner sur une voie d'arrêt de bus, en face de la place des Fusillés. Les fonctionnaires viennent alors la verbaliser. Le ton monte. «J'espère que vous êtes à jour dans vos factures de gaz car je serai aussi intransigeante que vous», leur lance la collègue.

C'est là qu'Estelle entre en scène. Elle sort du restaurant kebab et interpelle les policiers, de loin : «Vous n'avez que ça à foutre ? Ça me donne envie de faire des quenelles !» Puis effectue le geste controversé. La jeune femme s'approche. L'un des fonctionnaires lui fait remarquer que son attitude «est particulièrement déplacé dans le contexte actuel». Car en février 2014, la polémique autour de la quenelle battait son plein. Mais Estelle ne décolère pas et réitère.

«Les policiers m'ont demandé de refaire mon geste. Je l'ai fait», affirme-t-elle devant le tribunal. L'un des fonctionnaires présent à l'audience assure, au contraire, qu'il l'aurait mise en garde, lui indiquant qu'elle serait interpellée si elle mettait à nouveau sa main au niveau de son épaule. Pendant ce temps-là, la tension monte et un attroupement se forme. Les fonctionnaires reçoivent l'ordre d'arrêter l'agent de GRDF pour la ramener au commissariat de police.

Elle se réfugie alors dans sa voiture de service : «On ne peut faire de quenelles dans ce pays. Alors je fais des doigts d'honneur», lance-t-elle alors, adressant un nouveau geste déplacé aux agents municipaux. Finalement, elle est extraite de là pour être embarqué dans le véhicule de police : «Pays de merde (sic) ! Je suis embarqué pour une quenelle», s'emporte alors la jeune femme blonde, s'adressant au public présent sur le parvis de la gare. Elle restera six heures en garde à vue.

Défendue par l'avocat de Dieudonné

Elle réfute avoir adressé un doigt d'honneur aux policiers mais reconnaît tout le reste. La présidente a rappelé que le geste popularisé par Dieudonné n'avait rien d'une blague : «Dans le contexte de l'époque surtout, indique la magistrate. C'est considéré comme agressif voire antisémite.» L'avocat d'un des policiers rappellera qu'il est assimilé à «la sodomie».

Pour la procureure, la prévenue a adopté une attitude injurieuse à l'égard des policiers : «Le simple fait d'avoir exécuté une quenelle est un outrage. dénonce-t-elle. Elle a perdu son calme et ne plaisantait pas.»

Maître Mirabeau, l'avocat de la prévenue - qui est aussi celui de Dieudonné - indique que sa cliente «ironisait sur la situation» mais n'insultait pas les forces de l'ordre. Et s'efforcera de démontrer que ce geste n'était pas adressé aux fonctionnaires mais à elle-même ou à sa collègue, et avait un rapport avec l'argent perdu à cause de la contravention. «Il faut analyser ce dossier de manière dépassionnée et ne pas rendre un jugement en fonction des émotions politiques», plaidera-t-il.

Le tribunal l'a condamnée à 800 euros d'amende. Elle devra verser des dommages et intérêts aux deux policiers. La défense envisage déjà de faire appel.