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Dans le sillage de la concurrence accrue entre les États-Unis et la Chine, il est important pour les États-Unis de faire main-basse sur l'Afrique. L'Afrique est même devenue plus vitale pour l'Amérique que n'importe quelle autre région du monde en dehors du Pacifique. Or, l'incapacité des États-Unis à concurrencer la Chine sur le plan économique pousse l'hyper puissance vers la militarisation croissante de la région. Il faut rendre totalement dépendants des États-Unis, les États africains pour leur sécurité. Cette dépendance sécuritaire permettra seule aux États-Unis d'espérer pouvoir contrôler dans les décennies à venir les politiques économiques africaines et les mouler dans leurs intérêts.

Les Chinois et les Russes, se préparent, de leur côté, à créer une grande banque d'investissement qui, érigeant demain le yen comme monnaie internationale, concurrencera directement l'hégémonie de la Banque Mondiale ou du Fonds Monétaire International, pour le contrôle de l'Afrique.

« Militariser » l'Afrique

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Boko Haram, le terrorisme islamiste et aujourd'hui l'épidémie Ebola permettent sans trop de dégâts internationaux collatéraux d'envoyer des troupes de choc en Afrique, sans approbation des Nations-Unies. C'est habile. Le virus Ebola offre aux États-Unis une opportunité rare de s'installer en Afrique noire sans soulever les critiques néo-colonialistes traditionnelles. L'aide humanitaire et l'urgence sanitaire sont aussi des instruments d'hégémonie. Qu'on se souvienne des parachutistes américains sautant sur le palais présidentiel détruit d'Haïti après le tremblement de terre du 12 janvier 2010. Dans les premières heures de l'arrivée des secours, les États-Unis déclarèrent immédiatement l'aéroport international de Port-au-Prince, aéroport américain, y déployant leur drapeau.

Déjà, dans un rapport d'octobre 2013, les militaires de carrière américains avaient été prévenus qu'ils allaient quitter le Moyen-Orient et l'Afghanistan pour des missions en Afrique dans le cadre d'une nouvelle stratégie du Pentagone. Il s'agissait de former et conseiller les forces autochtones afin de leur permettre de lutter contre les menaces terroristes émergentes. L'armée américaine s'est déjà engagée dans plus de 100 opérations au sol avec ses forces spéciales pour les six premiers mois de 2014. Ebola lui permet d'activer ce processus. On ne compte plus !

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Les États-Unis ont également envoyé une force de réaction rapide à Djibouti pour intervenir en cas d'urgence en Éthiopie, Somalie, Kenya mais aussi au Maghreb. La décision d'envoyer cette force avait été prise en réponse à l'attaque de la mission américaine à Benghazi, en Libye qui avait tué quatre Américains, le 11 septembre 2013. Pour Washington, l'armée américaine est envoyée pour rétablir la « paix » maintenant, elle soignera et y érigera la santé occidentale comme valeur. L'armée américaine est kantienne. C'est le genre d'histoires qu'aiment regarder les spectateurs au cinéma.

Les États-Unis se présentent comme les sauveurs de l'Afrique, ses limpiadores, les grands nettoyeurs des virus africains. Ebola servira sans commune mesure à asseoir cette réputation positive des États-Unis en Afrique, menée de plus par un Président noir et d'origine musulmane. Tout tombe à pic. Providence ou calcul ?

Une force de réaction de l'Est africain vient d'être créé au Pentagone

Cette nouvelle unité fait partie de la United States Africa Command (AFRICOM), qui a été renforcée sous l'administration du président Barack Obama. Cette force se chargera de l'attaque de drones dans des zones ciblées comme par exemple en Somalie du Sud (attaque de janvier 2014). Le gouvernement de Djibouti, ancienne colonie française abrite maintenant une base militaire américaine avec plus de 4 000 soldats au camp Lemonnier que nos militaires connaissent bien. Il faut que les États-Unis s'approprient au plus vite le contrôle de la circulation des matières premières de l'Afrique à l'Occident. La Chine et la Russie doivent en être écartées. La France est admise à la table de réjouissances à la condition de mettre la main à la pâte ce qu'elle fait dans ses opérations militaires au Mali et en République Centrafricaine. Le vice-amiral Robert Moeller, adjoint militaire de l'ancien commandant de l'AFRICOM, le général William Ward, lors d'une conférence AFRICOM en 2008 a été clair : « l'objectif de l'Africom est de protéger la libre circulation des ressources naturelles de l'Afrique sur le marché mondial ». Il avait reprécisé en 2010 : « Ne nous y trompons pas. Le travail de l'AFRICOM est de protéger des vies américaines et de promouvoir les intérêts américains ». En 2013, l'armée américaine a augmenté de 217% ses opérations en Afrique, programmes et exercices sur commande.

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Nous comprenons l'urgence sanitaire actuelle mais nous n'avons pas oublié la rhétorique américaine des missions «humanitaires» en Afrique qui est loin d'être neutre pour qui connaît la réalité du terrain africain. D'un autre côté, pour les États-Unis, le soutien français des OPEX est vital car il permet d'augmenter la pénétration de l'hégémonie occidentale en Afrique sans avoir à chercher l'approbation du Congrès. Cet appui direct des États-Unis à la France a été mis en évidence l'année dernière par la procédure accélérée et exceptionnelle qui a permis la vente de 12 drones Reaper dont les deux premiers ont déjà été exploités au Niger depuis janvier 2014.

Le virus Ebola n'est pas une bombe démographique planifiée sur l'Afrique mais il permet aux Américains d'intensifier leur présence en Afrique. L'hyper puissance ne travaille plus pour la paix mondiale mais qu'on le sache pour la santé universelle !