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La nouvelle ministre ukrainienne des Finances, Natalie Jaresko, a formulé ses premières propositions sur l'optimisation des dépenses publiques. Le schéma présenté au chef du gouvernement prévoit de renoncer à la médecine gratuite, à l'enseignement gratuit et à d'autres avantages sociaux. Et ce n'est que le début de l'américanisation de l'Ukraine.

Faut-il rappeler que les droits des citoyens à ces prestations gratuites sont, sous certaines réserves, garantis à la plupart des citoyens de l'Union européenne, dont l'Ukraine prétend toujours se rapprocher. Rappelons aussi qu'il s'agissait de conquêtes du communisme, dont les habitants de l'ex-URSS, et notamment les Ukrainiens, sans exceptions, qu'ils soient russophones ou non, ont profité pendant près d'un siècle.

Mais, maintenant, il devient trop coûteux de former et de soigner les Ukrainiens, a décidé la ministre des Finances. Il faudra s'adresser à des institutions privées payantes (à supposer que dans l'état de délabrement actuel de l'Ukraine, il en reste encore quelques-unes en état de fonctionner). Mais le programme de la ministre ne s'arrête pas là. Il rejoint dans l'ensemble ceux que la troïka de Bruxelles tente, non sans résistances, d'imposer à la Grèce (et peut-être à la France si celle-ci persiste à ne pas vouloir se réformer) : privatisation de l'ensemble des services publics et des grands équipements, appel pour prendre leur place à des investisseurs internationaux (parmi lesquels les fameux fonds vautours américain qui ont mis à mal l'Argentine), disparition systématique de toutes les protections douanières et réglementaires.

La privatisation, en Ukraine, a par ailleurs conduit à remplacer l'essentiel des forces armées traditionnelles, mal équipées et peu enclines à se battre contre les Ukrainiens de l'est, par des mercenaires privés. Il est vrai que la plupart d'entre eux ne coûtent pas cher au budget de Kiev, car ils sont financés à travers des détours complexes par des dollars américains (la diplomatie des services secrets et des dollars, par laquelle Washington a toujours mené les révolutions de couleur qui ont fortement réjoui de grands démocrates européens, comme l'ineffable Bernard Henri Lévy).

Observons cependant que, dans un pays normal, ces détours complexes s'apparenteraient à de la corruption, corruption contre laquelle le président Petro Poroshenko a proclamé haut et fort devant le parlement qu'il entendait mener une lutte impitoyable, en s'inspirant des « exemples étrangers ».

Deux ministres américains dans le gouvernement ukrainien. Pourquoi pas trois, voire davantage ?

Faut-il rappeler que Natalie Ann Jaresko, née le 24 avril 1965 à Chicago (Illinois, États-Unis), est une femme politique américaine d'origine ukrainienne, directement issue de Wall Street. Diplômée de l'université Harvard et de l'université de Chicago, elle a occupé divers postes au département d'État des États-Unis, le dernier étant chef de la section économique de l'ambassade des États-Unis en Ukraine. Elle est co-fondatrice et directrice générale du fonds d'investissement Horizon Capital. Pour qu'elle puisse exercer ses fonctions de ministre des Finances sans trop faire jaser, on vient de lui accorder illico la nationalité ukrainienne.

Elle n'est pas la seule. Petro La porosité a par ailleurs nommé ministre de la Santé un certain Alexandre Kvitashvili, consultant américain d'origine géorgienne dans les domaines de la santé pour divers organismes internationaux. Il vient aussi de recevoir la nationalité ukrainienne. Il pourra utilement conseiller sa compatriote (compatriote à un double titre, américain puis désormais ukrainien), sur la meilleure façon de supprimer les services publics de santé (comme en Afrique de l'ouest précédemment, pour le plus grand bénéfice du virus Ébola), tout en améliorant le niveau sanitaire de la population.

Nous suggérons qu'au moins une troisième personnalité américaine, issue cette fois-ci directement du Département d'État, soit nommée dans les fonctions de ministre des Affaires étrangères de Kiev. Ainsi le courant passerait encore mieux entre les deux gouvernements.

Marie Harf, la porte-parole du Département d'État américain, a vigoureusement démenti les bruits jugés ignobles, selon lesquels ledit département d'État, et notamment son chef John Kerry, aurait joué un rôle, ne serait-ce qu'infime, dans ces nominations.

Il est vrai que Kerry n'a pas été vu à Kiev depuis au moins... 24 heures, tout occupé qu'il était à renforcer la volonté de plus en plus chancelante des gouvernements européens à se passer du gazoduc South Stream. Ces gouvernements, on ne sait pourquoi, semblent ne pas croire que des importations de gaz de schiste liquéfié venant des États-Unis pourraient aisément remplacer le gaz russe.