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© Reuters/Ammar Awad L'Autorité palestinienne est devenue ce mercredi le 123e membre de la Cour pénale internationale.
Hautement symbolique, cette adhésion de l'Autorité palestinienne à la Cour pénale internationale est une arme diplomatique brandie face à Israël. Qui a dénoncé une décision "politique et cynique".

C'est chose faite. Après en avoir fait la demande fin 2014, la Palestine est devenue un membre officiel de la Cour pénale internationale (CPI) ce mercredi. C'était une menace diplomatique brandie de longue date par l'Autorité palestinienne en dépit des menaces israéliennes. Mais elle pourrait s'avérer difficile à manipuler.

La Cour pénale internationale est compétente pour juger les actes de génocide, les crimes contre l'humanité, les crimes de guerre et les crimes d'agression. Seuls les Etats membres peuvent saisir directement le Procureur de la CPI pour lui demander d'enquêter, c'est pourquoi la Palestine devait ratifier le Statut de Rome.

Obtenir que justice soit faite

L'Autorité palestinienne espère ainsi que des dirigeants israéliens soient un jour condamnés pour crimes de guerre ou crimes liés à la corruption. "La Palestine recherche la justice, pas la vengeance", a assuré ce mercredi le ministre palestinien des Affaires étrangères, Ryad al-Malki.

Avant même son adhésion formelle, l'Autorité palestinienne avait envoyé des documents à la Cour pour autoriser le procureur à enquêter sur des crimes présumés commis depuis juin 2014, lors de l'opération "Bordure protectrice". Mais avant de porter plainte formellement, le gouvernement devrait attendre le résultat de l'examen préliminaire lancé en janvier, a précisé le ministre. Signe que toutes les précautions sont prises.

A terme, selon Le Monde, quatre dossiers pourraient être portés devant la Cour: les colonies, le mur de séparation, le siège sur Gaza et la guerre à Gaza.

Une décision symbolique

La CPI est-elle le dernier recours des Palestiniens pour internationaliser leur cause? Elle a en tout cas une portée symbolique, tant les Palestiniens sont dans une impasse. Vingt ans après les accords d'Oslo, les négociations dans le conflit israélo-palestinien sont au point mort, la dernière tentative américaine en 2013 n'ayant rien donné.

Et le 31 décembre 2014, le Conseil de sécurité de l'ONU a rejeté, à une voix près, une résolution prévoyant un accord de paix dans les 12 mois et le retrait israélien des Territoires occupés avant fin 2017. L'Autorité palestinienne a donc décidé d'abattre la carte de la CPI.

Les limites de la CPI

Toutefois, le recours éventuel de la Palestine à cette instance juridique sera confronté à de nombreux obstacles. A commencer par la lenteur même de la CPI, qui a prononcé deux verdicts sur ses 10 premières années d'existence (2002-2012). La Cour est également limitée par son cadre même puisqu'elle ne peut pas juger des actes commis avant sa création, en 2002.

Théoriquement, les enquêtes de la CPI à Gaza pourraient également l'amener à examiner les actes commis par le Hamas, qui échappe au contrôle de l'Autorité palestinienne. Et compliquer leurs relations. En outre, la Cour pourra poursuivre des Israéliens, mais comment les interpeller sans force de police propre et sans la coopération d'Israël?

La riposte de Tel-Aviv pourrait également être vive. Ce mercredi, le ministère israélien des Affaires étrangères a dénoncé une décision "politique et cynique". A l'annonce de l'adhésion de la Palestine à la CPI, Israël avait cessé de verser quelque 106 millions de taxes qu'il prélève chaque mois et doit à l'Autorité palestinienne, avant de revenir sur sa décision. Or, ce financement est capital pour l'institution. Par ailleurs, Israël réplique déjà en justice: des actions sont menées devant des juridictions ordinaires, rappelle France 24, pour juger les bombardements du Hamas sur l'aéroport de Tel-Aviv l'été dernier. Dans ce contexte ultra-tendu, la décision de l'Autorité palestinienne d'adhérer à la CPI est plus que jamais un pari osé.