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© Expédition 7èmeContinent VinciSato« Au fur et à mesure que nous progressions, nous avons commencé être entouré de déchets divers: bottes, casque, bidons. » raconte Patrick Deixonne, chef de l'expédition.
Le « 7ème continent » c'est le nom donné aux gigantesques soupes de plastique qui flottent au milieu des océans. Patrick Deixonne et une équipe de scientifiques se sont rendus dans l'Atlantique Nord pour explorer ce « continent » dont la taille est d'environ 3 fois la France.

En 1997, le capitaine Charles Moore, accompagné de Patrick Deixonne, a été le premier à découvrir une zone immense de plastique flottant dans le Pacifique. Depuis cette découverte, plusieurs expéditions se sont lancées en direction des différentes zones de déchets.

En France, l'explorateur Patrick Deixonne a mis en place en mai dernier une nouvelle expédition vers l'Atlantique Nord (après le Pacifique en mai 2013), accompagné de scientifiques du Centre National d'Etudes Spatiales (CNES), de l'Agence Spatiale Européenne (ESA) pour cartographier les zones et du CNRS (Centre National de la Recherche Scientifique, Université Paul Sabatier) pour analyser les déchets.

Patrick Deixonne, chef de l'expédition (photo ci-dessous). Il raconte : « Après 15 jours de navigation mouvementée, nous sommes arrivés à plus de 2000 Kilomètres des côtes dans la mer des Sargasses. Au fur et à mesure que nous progressions, nous avons commencé être entouré de déchets divers : bottes, casque, bidons. Puis, quand nous sommes arrivés dans le gyre, un gigantesque tourbillon de courant marin, les concentrations ont grimpé en flèche. Nous l'avons vu vomir toute sortes de déchets plastiques. »

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« Mais ce qui nous a le plus marqué, c'est ce que nous avons trouvé juste sous la surface du bateau. Nous naviguions sur un océan de plastique invisible à l'œil nu, constitué d'une quantité impressionnante de micro-déchets sous forme de minuscules paillettes visibles seulement si on s'approche de très près », poursuit-il.

Une bombe à retardement

Ces paillettes sont les résultats du travail de la mer et du soleil sur les macro-plastiques. L'équipe scientifique les a capturées avec des filets à planton de 300 microns qui étaient traînés pendant une heure derrière le bateau. Résultat des prélèvements : pour 1 kilo de plancton, 5 kilos de plastique.

Alexandra Ter Halle, chercheuse au CNRS (Université Paul Sabatier) spécialisée dans la réactivité chimique et l'interaction des molécules, explique : « Nous avons effectué plusieurs sortes de prélèvements sur différentes stations, aussi bien sur des macro déchets que sur les paillettes. Ces prélèvements devraient permettre de connaître leur impact sur l'environnement, particulièrement, sur les composés chimiques accumulés comme les polychlorobiphényles (PCB) ou les hydrocarbures aromatiques polycycliques (HAP). Les PCB se décomposent difficilement. »

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« Ils peuvent affecter les animaux situés au sommet de la chaîne alimentaire. Les HAP sont toxiques pour les organismes aquatiques et cancérigènes pour les mammifères. Ce qui soulève une foule de questions. D'où viennent-ils ? Quels impacts peuvent-ils avoir sur le milieu marin ? Quelle est leur accumulation dans la chaîne alimentaire ? Nous n'en sommes qu'au début de ces recherches. Parallèlement aux études des composés chimiques, une biologiste étudie en laboratoire les bactéries qui vivent sur les paillettes. Cela rejoint les constatations de nos collègues américains l'an dernier sur ce qu'ils appellent « la plastique sphère ». Chaque morceau de plastique est colonisé par du vivant, même des particules plus petites que le plancton, et nous ignorons tout de leur impact sur le milieu et pour l'espèce humaine ».

Le projet « Expédition 7ème continent » n'est pas terminé : Patrick Deixonne va continuer à mener des explorations vers toutes « les soupes de plastique » des océans.