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Le bilan des attentats perpétrés cette nuit en différents points de la capitale est l'un des plus lourds de ces cinquante dernières années : 120 personnes tuées et 200 blessées dont 80 dans un état grave. La sidération qui suit ce genre d'événements est peu propice à la réflexion mais plusieurs enseignements peuvent en être tirés.

Cet attentat, comme sans doute les précédents, apparaît lié à l'intervention militaire de la France en différents points, en particulier en Syrie. Selon l'un des témoins présents au Bataclan, les assaillants ont explicitement mis en cause la politique de la France au Moyen-Orient : « Je les ai clairement entendus dire aux otages 'C'est la faute de Hollande, c'est la faute de votre président, il n'a pas à intervenir en Syrie ». « Ils ont aussi parlé de l'Irak », comme l'a rapporté un animateur radio et TV qui se trouvait dans la salle. Le président Syrien a d'ailleurs tracé un parallèle entre la situation en France et celle en Syrie. Selon lui, notre pays vient tout simplement de vivre ce que « vit la Syrie depuis cinq ans ». Ce que nous anticipions il y a deux an est aujourd'hui vérifié : les djihadistes que l'on a laissé partir en Syrie en espérant s'en débarrasser reviennent aujourd'hui sur notre territoire, armés et entraînés et cet attentat sera probablement suivi par d'autres.


Commentaire : Si, pour citer Hollande, « la France est aujourd'hui en guerre », il faudrait peut-être revoir la politique étrangère française au Moyen-Orient :


Ensuite, force est de constater que la plupart des lois liberticides promulguées depuis trois ans se sont révélées inefficaces pour éradiquer la menace terroriste car elles ciblent avant tout la contestation politique
. C'est ce que nous prévoyions au moment du vote de la loi antiterroriste de l'automne 2014 et de la loi sur le renseignement de mai dernier. Parfaites pour mettre à mal la démocratie et les libertés publiques mais totalement inopérantes face au risque djihadiste.

Devant un tel fiasco, une question vient inévitablement : à qui profite le crime ? Et la réponse ne fait guère de doute : au système de domination.


Commentaire : Il est difficile de croire que la "cible" soit uniquement la contestation politique, et que tous les évènements récents aient pour but unique de contrôler la population. En général, ce ne sont que des conséquences d'ordre "pratique" pour certains. En tout cas, la France est choquée, et il faudra faire attention à ce que les mesures prises ne soient pas disproportionnées ou inutiles, alors qu'il faut résoudre le problème à la racine. Comme le disait Bashar el-Assad récemment, il faut espérer que le Président agisse dans les intérêts de son peuple, et non contre ceux-ci.

Voir à ce sujet la déclaration du président Bachar al-Assad au sujet de ces attaque

La situation semble être plus compliquée que ce qu'exprime cet auteur. S'agit-il plutôt du prix que doit payer la France (et les Français, selon les mesures qui seront mises en place), pour les actions impérialistes des États-Unis au Moyen-Orient ?


Les attentats se suivent et apparaissent comme autant de fenêtres d'opportunité dans lesquelles s'engouffrent le pouvoir exécutif pour mettre à mal les libertés publiques. Celui de Charlie Hebdo avait déjà provoqué un cortège de mesures liberticides sans précédent dans le cadre de loi sur le renseignement. Mais un cran vient d'être franchi avec ceux de la nuit dernière puisque l'état d'urgence vient d'être décrété sur le territoire français. Rappelons que cette mesure d'exception réduisant les libertés fondamentales et renforçant les pouvoirs de police n'a été appliquée qu'à cinq reprises dont quatre dans un contexte de guerre coloniale : trois fois pendant la guerre d'Algérie (avril 1955, mai 1958 et avril 1961) et une fois pendant la guerre en Nouvelle-Calédonie (décembre 1984). Elle a été activée pour la dernière fois par Nicolas Sarkozy le 8 novembre 2005 au cours des violentes émeutes qui avaient agité la France. Son but officiel est de libérer l'armée des contraintes juridiques du temps de paix et de renforcer le pouvoir de l'exécutif et des forces de l'ordre. Celles-ci pourront désormais :
  • interdire la circulation de personnes ou de véhicules et instituer des zones où le séjour des personnes est réglementé,
  • interdire l'accès à un département à toute personne cherchant à entraver, de quelque manière que ce soit, l'action des pouvoirs publics,
  • assigner à résidence toute personne dont l'activité s'avèrerait dangereuse pour la sécurité et l'ordre public,
  • ordonner la fermeture provisoire des salles de spectacle, débits de boissons ou autres lieux de réunion et interdire les réunions de nature à provoquer ou à entretenir le désordre,
  • obliger les propriétaires d'armes à les remettre aux autorités,
  • mener des perquisitions à domicile de jour et de nuit,
  • prendre des mesures pour assurer le contrôle de la presse et des médias
Contrôle des déplacements et des citoyens, censure et réductions des libertés publiques... Si toutes ces mesures comme les précédentes n'empêcheront probablement pas d'éventuels terroristes de passer à l'acte, elles lamineront en revanche la démocratie en faisant sauter les derniers garde-fous qui la protègent encore de l'arbitraire du pouvoir politique.