La présidence luxembourgeoise de l'Union européenne (UE) lance une nouvelle piste pour tenter de résoudre la délicate question de la répartition des réfugiés. Un dossier quasiment « gelé » depuis les accords difficilement conclus, en septembre, entre les Vingt-Huit pour la répartition de 160 000 personnes arrivées en Italie et en Grèce. Moins de 200 de ces réfugiés ont été « relocalisés » jusqu'ici, compte tenu de la frilosité de nombreux Etats, mais aussi du fait qu'une grande majorité d'entre eux refuse une procédure qui les détournerait de leur objectif premier, qui est d'atteindre l'Allemagne ou la Suède.

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© ALEXANDROS AVRAMIDIS / REUTERSUn enfant réfugié face à la police grecque à la frontière entre la Grèce et la Macédoine à Idomeni, le 7 décembre 2015.
Jean Asselborn, le ministre luxembourgeois des affaires étrangères et de l'immigration suggère désormais, dans un entretien au quotidien Süddeutsche Zeitung, la « réinstallation » de 50 000 réfugiés syriens présents en Turquie. Ce nombre serait déduit des 160 000 personnes déjà arrivées dans l'Union européenne, que les Européens s'étaient engagés à se répartir.

Le but serait d'abord d'envoyer un signal positif à Ankara, qui a reçu, par ailleurs, lors d'un récent sommet UE-Turquie, la promesse de 3 milliards d'euros pour gérer la crise des réfugiés, ainsi que l'assurance d'une relance des négociations d'adhésion à l'UE et d'une libéralisation de la délivrance des visas européens pour les Turcs.

M. Asselborn paraît aussi vouloir tirer publiquement les leçons de l'échec du plan de répartition des 160 000 réfugiés : ce plan cherchait à assurer la « relocalisation » de candidats à l'asile, alors que le ministre luxembourgeois évoque désormais la « réinstallation » de 50 000 personnes, soit des réfugiés reconnus comme tels par la Nations unies, en vertu de mécanismes multilatéraux et nationaux. En juillet, les pays de l'Union s'étaient déjà mis d'accord sur la répartition de 22 000 « réinstallés ».

Radicalisation de la position des pays d'Europe de l'Est

Lors du sommet UE-Turquie, la chancelière allemande, Angela Merkel, avait convoqué une réunion parallèle des huit pays les plus concernés par la crise migratoire, à savoir, outre l'Allemagne, la Finlande, la Suède, l'Autriche, les Pays-Bas, la Belgique, le Luxembourg et la Grèce. La chancelière entendait les persuader d'organiser l'arrivée d'une partie des réfugiés syriens directement depuis la Turquie par des voies légales, plutôt que par la route des Balkans.Elle n'avait pas cité le nombre des réfugiés potentiellement concernés.

L'appel de l'Allemagne n'avait toutefois reçu qu'un très faible écho au sein même de ce groupe de pays dits « de bonne volonté ». La France s'était abstenue de participer au débat et indiquait seulement que l'intérêt de tous était que les réfugiés restent en Turquie.

Les pays d'Europe de l'Est ont, eux, radicalisé leur position. Lors du conseil européen des affaires intérieures, vendredi 4 décembre, la Hongrie et la Slovaquie, désormais appuyées par le nouveau gouvernement polonais, ont confirmé leur refus du principe même de la répartition des 160 000 réfugiés. Ces pays confirment leur intention de déposer un recours devant la Cour de justice européenne contre ce texte.

La Commission européenne a, elle, pris le relais de l'Allemagne et doit déposer, la semaine prochaine, avant le sommet des chefs d'Etat et de gouvernement des 17 et 18 décembre, un nouveau plan de répartition. A-t-il la moindre chance d'être adopté ? « Sans doute pas, d'où l'initiative luxembourgeoise pour tenter de limiter les dégâts d'un nouvel échec probable », commente une source diplomatique bruxelloise.

Le chiffre de 400 000 réfugiés supplémentaires à se répartir entre les Vingt-Huit a circulé, mais est jugé « fantaisiste » par diverses sources. Plus modeste, le plan évoqué par M. Asselborn apparaît, toutefois, lui aussi, comme très difficile à concrétiser en raison, notamment, de divers obstacles juridiques.