Le président de la France qui se levait tôt est attendu ce jeudi à 12h15, heure locale, au dix-huitième étage du Waldorf Astoria, un grand hôtel new-yorkais. Il devrait s'exprimer pendant une demi-heure devant près de 400 investisseurs invités par BTG Pactual.
Que va-t-il leur raconter ? Peut-être ceci :
« L'idée de la toute-puissance du marché qui ne devait être contrariée par aucune règle, par aucune intervention politique, était une idée folle. L'idée que les marchés ont toujours raison était une idée folle. »Ou peut-être pas, en fait : ça, c'était son fameux discours de 2008 à Toulon, où il s'en était pris aux financiers. Pas sûr que ses invités new-yorkais apprécient ce message-là.
« BTG » comme... « Better than Goldman »
A la place, il n'aura qu'à revenir sur l'histoire de BTG Pactual. Cela lui permettra d'évoquer le travail et le mérite, des sujets qu'il maîtrise déjà, et la réussite des pays émergents, un thème idéal pour maintenir sa stature internationale.
BTG Pactual, c'est tout simplement un « Goldman Sachs des tropiques », selon le Financial Times. D'ailleurs, explique The Economist, il ne faut pas traduire « BTG » par « Banking and Trading Group », la signification officielle : pour les connaisseurs, c'est plutôt « Better than Goldman ».
Cette réussite, c'est justement celle d'un homme qui a su travailler plus pour gagner plus, André Esteves. Jugez plutôt :
- embauché comme simple analyste par la banque brésilienne Pactual, il finit par en devenir le patron ;
- il la revend pour 3,1 milliards de dollars aux Suisses d'UBS, pas encore rattrapés par la crise et les scandales d'évasion fiscale ;
- il leur rachète la banque trois ans plus tard pour 2,5 milliards de dollars seulement, la marie au fonds BTG qu'il avait créé entretemps, et part à la conquête du monde.
Maintenant, c'est au tour de BTG Pactual de se projeter au-delà de ses frontières. La banque veut lancer un fonds exclusivement destiné à l'Afrique, capable d'investir un milliard de dollars sur le continent - un record, et une nouvelle preuve que le Brésil est devenu une grande puissance.
Quant à André Esteves, il est désormais classé treizième fortune brésilienne par le magazine Forbes - et 377e mondiale, à égalité avec Martin et Olivier Bouygues, deux amis de Nicolas Sarkozy.
Un pied au Brésil, l'autre... aux Bermudes
S'il y tient, l'ancien Président pourra tout de même faire quelques allusions à son fameux discours de Toulon : BTG Pactual, ce n'est pas non plus le capitalisme qu'il appelait de ses vœux à l'époque.
Souvenez-vous. Il s'agissait, entre autres, de faire disparaître les paradis fiscaux. Nicolas Sarkozy pourra donc en débattre avec ses hôtes, qui ont choisi de regrouper leurs activités autour de deux entités :
- Banco BTG Pactual, les activités bancaires, réunies au Brésil - mais disposant d'antennes aux Etats-Unis, en Grande-Bretagne et... aux îles Caïmans ;
- BTG Pactual Participations, les activités de gestion de portefeuilles, installées très officiellement aux Bermudes.
Bagarre entre Casino et Carrefour
Depuis une douzaine d'années, ils étaient associés au Brésil avec un groupe de distribution détenu par le milliardaire Abilio Diniz. L'an dernier, celui-ci a discrètement proposé au concurrent Carrefour un montage imaginé avec BTG Pactual : une fusion des activités au Brésil, en échange de la première place au capital du groupe.
Casino a résisté, la justice s'en est mêlée, et l'opération a finalement capoté. Si elle avait réussi, BTG Pactual et Abilio Diniz auraient pu recevoir jusqu'à 17% du capital de Carrefour - un autre succès pour le Brésil et les pays émergents...
Nicolas Sarkozy abordera-t-il aussi ces sujets douloureux ? On aura du mal à le savoir. BTG Pactual refuse que des journalistes assistent au grand retour de notre ancien Président - et exclut aussi de rendre public le montant du chèque qu'il encaissera pour sa prestation d'une demi-heure.
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