Depuis 2012, les États membres discutent avec la Commission européenne d'un règlement qui établira juridiquement la procédure d'évaluation des risques sanitaires des plantes génétiquement modifiées (PGM) avant autorisation. Le lundi 25 février, les États membres, dont la France, discuteront d'une nouvelle version de ce règlement, présentée par la Commission européenne [1]. L'ordre du jour annoncé prévoit la possibilité que ce règlement soit voté, ouvrant ainsi la porte aux autorisations de PGM en attente.

Les autorisations de PGM à la culture ont été de fait suspendues depuis décembre 2008 par la Commission européenne (à l'exception de l'autorisation donnée pour la pomme de terre Amflora de Bayer après pressions de l'entreprise [3]) jusqu'à l'adoption de nouvelles lignes directrices censées améliorer l'évaluation des risques sanitaires. A ce jour, une soixantaine de dossiers de demande d'autorisation sont en attente, dont 27 pour la culture. Les autres dossiers concernent l'importation.

Si, après plusieurs mois de discussions, la Commission européenne a finalement établi le caractère obligatoire pour les entreprises de conduire des analyses de toxicologie [4], cette obligation ne s'appliquera qu'aux PGM dont la demande d'autorisation aura été déposée six mois après l'adoption de ce règlement. Tous les dossiers aujourd'hui en attente ainsi que ceux qui auront été déposés d'ici l'adoption du règlement ne seront donc pas concernés. Un paradoxe important puisque, en proposant ce règlement qui contient certaines améliorations, tant la Commission européenne que l'Autorité européenne de sécurité des aliments (AESA) reconnaissent que l'évaluation des risques telle que conduite jusqu'à maintenant est insuffisante. Mais cette évaluation insuffisante continuerait donc de présider aux dossiers en cours.

Il faut noter que les améliorations apportées à l'évaluation des PGM par le règlement proposé ne sont pas liées à une évolution scientifique récente. Il en est ainsi de la puissance statistique des analyses présentées par les entreprises : elle devra dorénavant être suffisante, ce qui n'est pas le cas actuellement, comme nous avons déjà eu plusieurs fois l'occasion de le préciser [5]. Or ce point de la puissance statistique est un domaine vieux de 80 ans, donc bien antérieur au dossier des PGM. Si les entreprises présentant ces analyses ne sont pas juridiquement contraintes de suivre les lignes directrices actuelles (c'est-à-dire avant l'adoption du règlement en cours), elles sont par contre dans l'obligation de présenter une évaluation correcte, quelle que soit la méthodologie qu'elles choisissent pour cela. Une obligation qui justifierait que le nouveau règlement s'applique aux dossiers en cours, d'autant qu'il s'agit d'une question de santé publique !

S'il était adopté en l'état le 25 janvier 2013 par les États membres, ce règlement conduirait donc à une amélioration de l'évaluation d'une minorité de dossiers éventuellement déposés dans le futur et à la validation massive de tous les dossiers en cours. C'est donc ainsi que répond la Commission européenne à la demande unanime des États membres de décembre 2008 qui avait requis un renforcement de l'évaluation. La position de la France sera particulièrement suivie, le gouvernement pouvant choisir de demander à ce que ce règlement suive une logique politique de santé publique : qu'il soit appliqué aux demandes d'autorisation en cours !

Le réglement proposé aux Etats membres

Notes:

[1] Le réglement proposé aux Etats membres

[2] @@SPIP_ECHAPPE_LIEN_1@@

[3] Inf'OGM, « UE - OGM : la pomme de terre Amflora autorisée à la culture », Christophe Noisette, Eric MEUNIER, 2 mars 2010

[4] Inf'OGM, « UE - Analyse du caractère (non) obligatoire des études de toxicologie », Inf'OGM, 11 décembre 2012

[5] Jacquemart, F. « Évaluation des OGM : les experts tournent le dos à la science », ed. Inf'OGM, 2012

[6] Jacquemart, F. « Évaluation des OGM : les experts tournent le dos à la science », ed. Inf'OGM, 2012