Aurore boréale
© Andrew Chin/Getty ImagesL'aurore boréale est observée le 11 mai 2024 à Manning Park, en Colombie-Britannique, au Canada.
De la Tasmanie à la France, des photos d'aurores boréales spectaculaires ont fleuri sur les réseaux sociaux samedi, conséquences d'une tempête solaire « extrême », la première de ce niveau depuis 2003, qui a commencé à frapper la Terre ce 10 mai et devrait se poursuivre la nuit suivante, faisant aussi craindre des perturbations sur les réseaux électriques et de communications.

« Les mots me manquent pour décrire ce spectacle fabuleux dans le ciel cette nuit. Des aurores boréales de toutes les couleurs et visibles à l'œil nu dansaient dans le ciel face au Mont Saint-Michel suite à une tempête géomagnétique extrêmement forte ! », écrit sur Facebook le photographe français Mathieu Rivrin.

« J'ai la sensation de vivre une nuit historique en France. C'était vraiment chargé de particules solaires et d'émotions », souligne Éric Lagadec, astrophysicien à l'Observatoire de Côte d'Azur, sur le réseau social X. Et « puisqu'on me le demande : oui, il y a des chances d'aurores cette nuit encore. Trouvez de bons spots, loin des lumières, avec une vue dégagée vers le nord ! », conseille ce spécialiste de poussières d'étoiles.


En Angleterre, Iain Mansfield, un conseiller politique vivant à Hertford, dit à l'AFP qu'il a « réveillé les enfants pour regarder les aurores boréales dans le jardin ! »

Série d'éjections de masse coronale en provenance du Soleil

Des conditions liées à une tempête géomagnétique de niveau 5, soit le niveau maximum sur l'échelle utilisée, ont été observées vendredi soir, a annoncé l'Agence américaine d'observation océanique et atmosphérique (NOAA). « Les GPS, réseaux électriques, vaisseaux spatiaux, la navigation des satellites et d'autres technologies peuvent être affectés », a ajouté l'agence.

Cette tempête est provoquée par l'arrivée sur Terre d'une série d'éjections de masse coronale en provenance du Soleil. Il s'agit « d'explosions de particules énergétiques et de champs magnétiques partant du soleil », a expliqué vendredi lors d'une conférence de presse Shawn Dahl, du Centre de prévision de la météo spatiale (SWPC), rattaché à NOAA.


Le dernier événement atteignant ce niveau 5 remonte à octobre 2003, un épisode surnommé « les tempêtes d'Halloween ». À l'époque, des coupures de courant étaient survenues en Suède et des transformateurs avaient été endommagés en Afrique du Sud. La tempête devrait se poursuivre durant le week-end, avec l'arrivée d'éjections de masse coronale supplémentaires, a ajouté NOAA.

Le Soleil est actuellement proche de son pic d'activité, selon un cycle qui revient tous les 11 ans. Ces éjections de masse coronale, dont au moins sept dirigées vers la Terre ont été observées, proviennent d'une tache solaire faisant environ 17 fois le diamètre de la Terre. Elles se déplacent à plusieurs centaines de kilomètres par seconde.

Des mesures de précaution

Les opérateurs de satellites, de communications et du réseau électrique en Amérique du nord ont été notifiés, afin de prendre des mesures de précaution, a déclaré Shawn Dahl, du SWPC. Il a recommandé aux habitants de s'équiper de batteries ou potentiellement de générateurs, comme pour tout autre avis de tempête.

Les opérateurs électriques ont depuis dix ans travaillé à mieux protéger leurs réseaux, a toutefois rassuré Rob Steenburgh, scientifique au SWPC. Les effets ne pourront survenir que sur des lignes à haute tension, pas chez les particuliers, et des systèmes comparables à des disjoncteurs existent.

Il a également indiqué que son agence était en contact très régulier avec la Nasa, qui assure la sécurité des astronautes dans la Station spatiale internationale (ISS), plus vulnérables aux radiations solaires. Une alerte aux radiations a également été émise, mais de seulement 1 sur une échelle de 5, ne causant donc pas d'inquiétude pour le moment.

Aurore astrale
© Sanka VIDANAGAMA/AFP via Getty ImagesLes aurores australes brillent à l’horizon au-dessus des eaux du lac Ellesmere, à Christchurch, le 11 mai 2024.
Le milliardaire Elon Musk, dont le réseau internet Starlink dispose de quelque 5000 satellites en orbite basse, s'est voulu rassurant. « Les satellites Starlink subissent beaucoup de pression, mais jusqu'à présent ils tiennent », a-t-il assuré sur son réseau social, X.

En ce qui concerne le trafic aérien, l'Agence américaine de l'aviation civile (FAA) a dit « ne pas s'attendre à des conséquences importantes ». Les tempêtes géomagnétiques peuvent perturber les outils de navigation et les transmissions radio à haute fréquence, a expliqué le régulateur aérien américain, ajoutant avoir conseillé aux compagnies aériennes et aux pilotes d'« anticiper » les perturbations éventuelles.

Ce type de tempête affecte d'abord les latitudes autour des pôles, a expliqué à l'AFP Mathew Owens, professeur de physique spatiale à l'Université de Reading. Mais « plus la tempête est forte, plus cela va bas en termes de latitude », a-t-il ajouté.

Dans l'hémisphère sud, des pays comme l'Australie ou la Nouvelle-Zélande suivent de près ce type de situations, a expliqué Shawn Dahl. Aux États-Unis, des aurores boréales devraient pouvoir être observées sur la plupart de la moitié nord du pays, selon NOAA, et peut-être aussi bas qu'en Alabama ou dans le nord de la Californie. Brent Gordon, chef de la branche des services météorologiques spatiaux de la NOAA, encourage le public à essayer de photographier le ciel nocturne avec un téléphone, même si aucune aurore boréale n'est apparemment visible.

« Sortez juste dans votre arrière-cour et prenez une photo avec un smartphone récent, vous serez étonné de ce que vous verrez par rapport à ce que vous observez à l'œil nu ! », a-t-il dit à l'AFP. La plus importante tempête solaire jamais enregistrée est survenue en 1859, selon la Nasa. Aussi connue sous le nom d'événement de Carrington, elle avait très fortement perturbé les communications par télégraphe.

[Article publié le 11 mai 2024]