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Le 22 juin 2013, à Argenteuil, dans le département du Val d'Oise, a eu lieu un rassemblement suite à l'agression de deux jeunes femmes musulmanes.

Le 20 mai 2013, Rabia, une jeune femme musulmane de 17 ans, portant le voile, a été agressée dans le quartier pavillonnaire des coteaux. Elle croise deux hommes d'environ une trentaine d'années, crane rasé et vêtus d'un blouson noir. Les deux hommes l'insultent, Rabia prend peur alors elle accélère le pas. L'un des deux hommes fait demi-tour, la jette à terre et la roue de coup pendant que le deuxième rigole. C'est grâce à l'intervention d'un passant qui est intervenu en voyant l'agression, que les agresseurs ont arrêté de la frapper.

La victime explique : « ils m'ont arraché le voile, ils m'ont mise à terre, ils m'ont traitée de sale arabe, sale musulmane ». la jeune femme a des contusions à la bouche, au visage et aux coudes.

Quelques semaines après cette agression incompréhensible, toujours à Argenteuil, Leila, une jeune femme musulmane de 21 ans, portant le voile, a elle aussi était agressée. Il était 10h30, elle se trouvait rue de calais. La jeune femme profite du trajet pour appeler sa mère au téléphone. Après avoir raccroché, elle a été très violemment tirée en arrière par deux hommes.

Leila était enceinte de quatre mois !

Les agresseurs lui enlèvent son voile et lui coupent une mèche de ses cheveux.

Leila reçoit des insultes islamophobes. Apeurée, Leila demande à son agresseur de la laisser tranquille parce qu'elle est enceinte de quatre mois. C'est à cet instant que des coups de pieds lui ont été portés sur son ventre, ainsi qu'un coup de poing quelque part entre le ventre et la hanche. L'agression a eu lieu le jeudi 13 juin 2013. Elle apprend, à l'hôpital, la perte de son bébé.

La victime a décrit un de ces hommes, étant porteur de vêtements de style « gothique », les cheveux ras. La victime décrit ces hommes comme des skinheads, L'un d'entre eux porterait une crête rouge.

Selon un article publié sur un site d'information alternative, un des agresseurs de Leila a déclaré pendant l'agression qu'il voulait lui faire payer ce qu'il se passait en Israël. Toujours selon l'article du site d'information, une des victimes a observé une croix gammée sur le bras de son agresseur.

Rabia et Leila ont été victimes d'une agression islamophobe ou fasciste/nazi ?
Propos déconcertant, Crâne rasé, croix gammée, propos islamophobes, style vestimentaire peu banal, ce qui est certain c'est que cela y ressemble.

Le 19 juin, le Parquet de Pontoise a ouvert une information judiciaire. Pour la première victime, Rabia, le parquet a retenu « violence volontaire aggravée », pour la seconde victime, Leila, « violence volontaire en réunion ».

Ce qui est troublant, ce sont les plaintes qui ont été enregistrées par les services de polices d'Argenteuil. Dans ces plaintes, les insultes islamophobes n'ont pas été enregistrées, écrites. Les victimes avaient pourtant présenté pendant les dépôts de plaintes ces insultes dont elles avaient été victimes. Le Parquet de Pontoise a donc rejeté le caractère discriminatoire de ces agressions.

Rabia a dénoncé l'attitude de la police qui lui a demandé : « de ne pas informer la communauté de l'agression, parce que ça risque de créer des émeutes ».

Le père de Rabia ajoute : « comme on ne condamne jamais l'islamophobie, pour certains, c'est carte blanche ! Mais s'il n'y a pas de réponse de la part des autorités, on va être obligés de se protéger seuls ».

Ces incohérences dans les procédures s'ajoutent à des faits qui ne peuvent qu'attiser les tensions. Effectivement, la mardi 11 juin 2013, à 19h, un contrôle de police, à Argenteuil, va dégénérer en affrontement. Les policiers d'Argenteuil ont effectué un contrôle d'identité sur une jeune femme de 25 ans, portant un voile intégral. Des habitants vont intervenir, jugeant ce contrôle d'identité illégitime. Plusieurs personnes vont alors se regrouper autour des policiers, qui vont ensuite appeler du renfort. Ce contrôle d'identité va dégénérer en affrontement entre les force de l'ordre et une soixantaines d'habitants d'Argenteuil. Les policiers vont répliquer au gaz lacrymogène et flashball. Selon les habitants qui étaient sur les lieux, les policiers ont fait un usage disproportionné de la force.

Un habitant d'Argenteuil explique : « dans la foule, il y avait des enfants, avec des poussettes, qui ont reçu du gaz lacrymogène ». Deux personnes ont été placées en garde à vue pour « provocation à l'attroupement », « outrage » et « rébellion ».

Pourquoi exercer un contrôle d'identité sur une femme portant le voile, quelques jours, seulement, après l'agression de Rabia ?

Les tensions étaient déjà très fortes.

A Argenteuil, les agressions de Rabia et Leila s'ajoutent à une liste d'agressions déjà très déstabilisante pour tous les habitants de cette ville. En effet, le 9 juin 2009, Ali Ziri, un Algérien de 69 ans, était décédé suite à une interpellation de police. Les policiers avaient été sanctionnés, mais sont toujours en service. Le 29 novembre 2010, Mahamadou Marega, un jeune malien de 38 ans, était lui aussi, décédé suite à une interpellation de la police. Les liens entres les décès de ces deux hommes et les agressions des deux jeunes femmes musulmanes, ne sont évidement pas établis.

Mais cela s'ajoute a des tensions très fortes et des conditions d'existence très difficiles : Chômage, travailleur pauvre, logement surpeuplé, insalubre ou manquant, précarité, jeunesse ignorée et incomprises, discrimination, cité abandonnée etc.

Dans cette communauté d'agglomération d'environ 105.000 habitants, toutes ces violences s'ajoutent a des difficultés économiques, sociales, morales, qui ne font qu'attiser les tensions déjà très fortes. A cela s'ajoute la montée de l'islamophobie, les crimes fascistes, racistes, qui reste très souvent impunis.

Dans ces conditions de vie très difficiles, comment ne pas se laisser déborder par la colère, qu'elle est le terreau fertile qui fait pousser la colère des habitants d'une agglomération cosmopolite ?

Ces faits nous donnent peut être une partie de la réponse.

Le collectif des habitants d'Argenteuil et Bezons, avec l'appui de plusieurs autres associations, soutiennent et luttent pour défendre Rabia, Leila et leurs familles, ainsi que les futurs victimes possibles. Pas seulement. Ils luttent pour que cela ne se reproduise plus. Ils prévoient d'autres manifestations régionales ou nationales, si rien n'est fait. Ces crimes et ces agressions plongent non seulement leurs familles et leurs amis dans l'incompréhension et le désespoir, mais ils attisent les inquiétudes de toutes la population. Dans cette situation, une commune en difficulté se transforme en poudrière qui ne demande qu'une étincelle pour s'enflammer.