De nos jours, sourire face à l'objectif de l'appareil photo est un réflexe mais cela n'a pas toujours été ainsi. Anciennement, sur les photos d'époque, les sujets n'avaient pas pour habitude de produire de rictus.

Old photos
© Inconnu
Les raisons de cette sobriété sont techniques mais également morales, explique ABC.es. Au début de l'ère de la photographie, au 19ème siècle, les sujets devaient rester immobiles pendant un laps de temps relativement long (environ dix minutes) pour que le daguerréotype soit en mesure de capter l'image et la lumière. Par ailleurs, il existait plusieurs astuces afin d'éviter l'engourdissement musculaire. Ces raisons techniques n'invitaient donc pas à l'allégresse.

Mais d'un autre côté, la raison principale pour laquelle les sujets ne souriaient pas était morale. Le sourire était considéré traditionnellement en Occident comme un geste infantile et dédaigneux. Pour la culture artistique européenne, le rire et le sourire étaient réservés aux fous, aux personnes ivres, aux enfants, aux gens de spectacle et aux prostituées.

Comme l'écrit The Public Domain Review, l'écrivain Mark Twain, à propos de la photographie, s'exprimait ainsi : « Une photographie est un document très important et rien de tel pour la dégrader qu'un stupide sourire immortalisé devant la postérité ». « Le sourire est réservé aux dames et aux messieurs qui ne soucient guère de paraître intelligent », affirmait Charles Dickens. En outre, la photographie était chère et réservée à une classe aisée, soucieuse de montrer une image responsable d'elle-même. A l'époque, on pensait également, dans les arts plastiques, que la meilleure manière de figer le caractère de l'individu résidait dans une attitude posée.

Cet état de fait a perduré jusqu'au début du 20e siècle. Par après, Hollywood a renversé la tendance avec l'éclosion d'un cinéma où les acteurs ont posé face à la caméra dans des attitudes joyeuses. Les techniques photographiques se sont ensuite perfectionnées et ont permis de capter plus rapidement les instants. De nos jours, la photographie s'intéresse aux émotions. « Toutefois, cette préoccupation ne semble pas concerner les sociétés moins occidentalisées », affirme l'historien français Colin Jones. « Chez celles-ci, le sourire n'est pas tellement valorisé socialement et les visages timides ou sérieux continuent de prédominer, comme sur n'importe quelle photo d'époque ».