En pleine polémique sur l'enseignement de la théorie du genre à l'école, nombre de psychiatres et psychologues s'inquiètent de la remise en cause de la différence des sexes, constitutive de l'identité de chaque être humain.

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1- Jean-Paul Mialet

Jean-Paul Mialet est psychiatre et neuropsychologue. Dans son livre « Sex Aequo, le quiproquo des sexes », il s'inquiète du mouvement d'indifférenciation des sexes. Interrogé sur ce sujet par le Nouvel Observateur, Jean-Paul Mialet rappelle que « très tôt, des différences se marquent. Il ne faut pas oublier que la conscience se forme dans l'expérience des interactions du corps avec l'environnement : deux corps différents mènent à des consciences distinctes et l'on peut dire que la conscience est sexuée, comme le corps. » [1].

Jean-Paul Mialet
Le Dr Mialet rappelle par ailleurs que la différence des sexes est fondatrice dans l'identité de chacun : on se définit par opposition à autrui, ce qui le conduit à affirmer que « la différence des sexes est une altérité primordiale » [2].Ce « socle de différences » est nécessaire à la construction de l'enfant : « l'enfant développera par la suite un appétit conscient de se rapprocher du camp auquel il appartient. On veut devenir comme Maman ou comme Papa » [3].

Enfin, le psychiatre s'appuie sur les différences d'appétits sexuels entre homme et femme : loin d'être construit uniquement sur l'intériorisation de normes transmises par la société, le désir sexuel est lié pour beaucoup aux organes génitaux [4].

L'amour de la différence, Catherine Chabert, cover book

2- Catherine Chabert


Psychanalyste et professeur de psychopathologie clinique à l'Université Paris Descartes, Catherine Chabert est l'auteur de « L'amour de la différence ». Elle y revient notamment sur les faux semblants autour de la notion d'égalité : « au nom de l'égalité, la société ne favorise pas beaucoup la différenciation. Mais l'égalité n'a rien avoir avec le fait d'être identique [...] Il est très important que les différences fondamentales entre les hommes et les femmes, comme entre les pères et les mères, soient marquées. La différence permet de chercher ailleurs ce que l'un n'a pas donné mais qu'un autre peut offrir, elle admet l'écart et la déception, elle combat les excès délétères de l'idéalisation » [5].

Autrement dit, la différence des sexes favorise le lien social : je partage et je donne à l'autre ce qu'il n'a pas. Au contraire, l'uniformité et l'identique conduirait à un narcissisme délétère pour le vivre-ensemble.

3- Leonard Sax

Le Dr Leonard Sax, diplômé de biologie et docteur en psychologie a travaillé dans son livre « Pourquoi les garçons perdent pied et les filles se mettent en danger » sur les différences entre fille et garçon, notamment en milieu scolaire.

Dans une interview à l'Express, le Dr Sax rappelle tout d'abord que différence ne veut pas dire inégalité, tout comme égalité ne signifie pas uniformité. Pour ce qui est des enfants, la différence des sexes est nécessaire et constitutive de l'identité de chacun : « en occultant ces distinctions entre sexes, on nuit à l'enfant. Chez lui comme à l'école, il se sent incompris, laissé en plan, sommé de se débrouiller seul » [6].

Dr Leonard Sax
© InconnuDr Leonard Sax
Sur les stéréotypes qui prétendument ne seraient que pure construction sociale, le Dr Saxe relate l'expérience de chercheurs à l'université de Yale : ceux-ci ont disposé camions et poupées devant des petits singes, primates qui ignorent le signifiant masculin ou féminin de ces objets ; « or, une large majorité des mâles a choisi les camions. Voilà pour l'inné : des recherches démontrent qu'en raison de petites différences cérébrales les garçons sont plus intéressés par le mouvement d'un objet, et les filles, par sa texture et sa couleur. Mais les petits humains sont considérablement plus nombreux à choisir le camion que les petits singes. La culture amplifie la biologie ».

Leonard Sax rappelle que les différences entre hommes et femmes ne résultent pas de différences de capacités mais de motivations et qu' « en prenant en compte ces particularités dans l'enseignement, au lieu de les ignorer, on peut corriger le tir, éviter de perpétuer des aberrations et des inégalités professionnelles ». Ainsi, lorsqu'il a visité plusieurs écoles de filles, le Dr Sax a pu constater une recrudescence de l'intérêt pour la physique - discipline généralement boudée par les filles - rien qu'en changeant l'ordre des chapitres dans le programme scolaire. En commençant par des chapitres plus susceptibles d'intéresser les filles, leurs progrès dans cette matière ont été considérables.

En ce sens, on tendrait vers plus d'égalité de réussite entre fille et garçon en prenant en compte les différences de besoins. A contrario, une politique pro-gender, visant à gommer toute différence, serait nuisible à la réussite des uns et des autres.

4- Marie Balmary

Marie Balmary
© InconnuMarie Balmary
Marie Balmary est psychanalyste et chercheur en sciences humaines. Dans son article « Lire la différence des sexes » [7], elle explique que cette différence est constitutive de l'individu : « l'apparition du sujet n'a lieu que dans la relation à un autre sujet différent de lui », ajoutant que « la différence des sexes apparaît comme le modèle premier - le paradigme - de toutes les autres situations d'altérité ».

Elle ajoute que « la différence des sexes est une bonne affaire pour les enfants » : elle leur donne un équilibre parce que « l'enfant ne se trouve jamais en face d'un couple formé de deux personnes qui aient même expérience, même compétence ».

Enfin, Marie Balmary interroge le bien fondé d'une entreprise de destruction de cette altérité : « il semble que la différence des sexes soit la grande pédagogue de toutes les autres. On dit souvent que pour savoir si un peuple est libre, il faut se demander comment sont traitées les femmes. Si l'on venait à défaire la différence des sexes, que se passerait-il ? Nous devrions défaire alors une partie du langage arrimé jusqu'à maintenant au masculin et au féminin. Jusqu'où irait la destruction ? La négation fonctionnerait-elle encore ? Ou bien devrions nous pour la garder inventer des différences qui toucheraient forcément à la communauté d'origine de tous les humains ? ».

En d'autres termes, la différence des sexes est constitutive du vivre-ensemble et chercher à l'effacer conduirait à mettre en exergue - avec la possibilité de conséquences hautement conflictuelles - d'autres différences comme la différence ethnique.

Notes

[1] http://leplus.nouvelobs.com/contribution/204206-la-difference-entre-hommes-et-femmes-est-elle-une-question-d-education.html

[2] Ibid.

[3] http://www.famillechretienne.fr/societe/social/les-psys-contre-le-gender-47840

[4] http://www.lexpress.fr/culture/livre/jean-paul-mialet-et-sa-vision-a-contre-courant-des-differences-hommes-femmes_980947.html

[5] http://www.famillechretienne.fr/societe/social/les-psys-contre-le-gender-47840

[6] http://www.lexpress.fr/actualite/societe/nier-ce-qui-distingue-les-sexes-nuit-a-l-enfant_1314273.html

[7] Marie Balmary, Lire la différence des sexes, Projet, 2005/4 n°287, p.23-29