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Au commencement, il y avait une constitution qui dormait tranquillement dans son coin, ne ressortant qu'à de rares occasions. Blaise Compaoré, voulant prolonger sa présence à la tête du Burkina Faso après 27 ans de pouvoir, n'avait la possibilité de le faire qu'en modifiant ladite constitution.

Pourquoi diable avait-il besoin de rester au pouvoir après un si long règne ? Il faut dire que les peuples ont la fâcheuse tendance à réclamer des comptes à leurs présidents après leur départ. Il n'y a que dans les grands pays démocratiques comme la Grande Bretagne ou les Etats-Unis où les peuples ne réclament aucun compte. Ni Tony Blair, ni George Bush par exemple n'ont eu à en rendre. Mais dans les petits pays démocratiques, voire pas démocratiques du tout, les dirigeants doivent rendre des comptes dès que le peuple a la possibilité de l'ouvrir. Et Compaoré a un vieux contentieux avec les Burkinabés. Arrivé au pouvoir par un coup d'état sanglant qui a causé la mort de Thomas Sankara, il sait que, qu'il ait été impliqué personnellement ou non dans cette mort, il lui faudrait répondre à certaines questions, et que d'une manière ou une autre, il passerait des moments désagréables.

Sa décision de retoucher à la Constitution déclenche donc une mobilisation de masse comme le Burkina n'en a jamais connue. Une révolution d'un jour qui, étant donné la situation stratégique du pays, appelle tous les extincteurs extérieurs qui circonscrivent l'incendie en poussant au départ le désormais ex président. Tout en procédant à son exfiltration chez un autre sous gendarme de la région, l'ami Alassane Ouattara, un coup d'état est organisé avec le chef d'état-major des armées, le général Traoré, ami de la France. C'est que, dans un pays comme le Burkina Faso, qui abrite une base militaire française et ayant une coopération militaire très étroite avec la France, la nomination du chef d'état-major des armées est un acte politique appelant un consensus.

En regardant de près ce premier coup d'état, on croit retrouver l'empreinte que François Hollande imprime habituellement à toutes ses actions. Un pas en avant, deux pas en arrière ; j'y vais-t-y, j'y vais-t-y pas ; J'y vais à reculons, etc. Et, de fait, après un timide communiqué annonçant qu'il prenait le pouvoir, écartant du coup un autre général à la retraite adoubé par les manifestants, le général Traoré s'est fait souffler son fauteuil avant même de s'y être installé par un jeune lieutenant-colonel, Isaac Zida, qui lui, s'est déplacé devant les manifestants pour annoncer son coup d'état. Ce deuxième coup d'état semblait mieux organisé, s'appuyant sur la société civile, avec un discours se voulant consensuel. Il est difficile de croire que ce deuxième coup d'état ait été improvisé.
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La lettre de consensus au sein de l’armée
Et la fameuse Constitution, objet de toutes les attentions ? Déjà malmenée par les deux coups d'état successifs, elle n'avait plus de raison d'être. C'est ce qu'a dû penser le lieutenant-colonel Zida qui l'a immédiatement suspendue. La journée de Samedi a été une journée de palabres pour accorder les violons au sein de l'armée. Un consensus a été trouvé et Zida est déjà installé à la présidence. Est-ce fini pour autant ? Rien n'est moins sûr. Une manifestation est déjà prévue pour la journée de Dimanche pour dénoncer le putsch. A l'issue de cette journée, nous y verrons peut-être un peu plus clair.