L'affaire Iran-Contra (ou Irangate, nommée ainsi en souvenir du scandale du Watergate) est un scandale politique survenu aux États-Unis dans les années 1980. L'affaire est toujours voilée de secrets et il est difficile de découvrir les faits. Plusieurs membres de l'administration Reagan ont vendu illégalement des armes à l'Iran, qui était un ennemi avoué des États-Unis, utilisant les profits pour financer secrètement, et malgré l'opposition du Congrès des États-Unis, les Contras, un mouvement contre-révolutionnaire nicaraguayen de lutte armée regroupant les opposants au gouvernement marxiste-léniniste de Daniel Ortega.

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Les planificateurs : Ronald Reagan avec les organisateurs des Contras dans la salle Ovale. On peut voir Oliver North sur le coin droit
Dans le cadre de la Guerre froide, il s'agit pour l'administration Reagan de renverser un régime considéré comme communiste et situé dans ce que les États-Unis considèrent comme leur zone d'influence.

Les contras et le régime sandiniste au Nicaragua

Le Front Sandiniste de Libération Nationale (FSLN), fondé dans les années 60, gagne à partir des années 70 en importance et en puissance. Ses actions se situent d'abord dans les zones rurales, notamment du nord du pays, où s'organise une guérilla de résistance, souvent avec l'appui des populations paysannes. Au milieu des années 70, la résistance touche aussi les villes avec des actions coup de point (prise d'otage, prise de caserne, etc.). La résistance sandiniste durera environ 10 ans. Dix années marquées par la guérilla, les opérations insurrectionnelles, la clandestinité, l'exil.

Le programme du FSLN est de promouvoir un véritable changement structurel : l'échec de l'assassinat de Somoza père a sûrement été un argument pour imaginer qu'un simple changement de pouvoir ne sera pas suffisant. Ses principales revendications sont :
  • la révolution agraire
  • l'alphabétisation des masses
  • l'égalité des genres
  • le respect des croyances religieuses
  • une politique extérieure indépendante et solidaire
Idéologiquement, la révolution sandiniste regroupe des tendances diverses entre marxisme et social-démocratie. Elle s'appuie toutefois fortement sur les pays non alignés et est soutenue par le gouvernement cubain. Une de ses caractéristiques est la place importante prise par les ecclésiastiques issus de la théologie de la libération. Les artistes, en particulier les poètes et les écrivains se trouvent également en première ligne des cadres de la révolution.

L'offensive finale aura lieu en 1979 et sonnera la fin de 45 ans de dictature. Un gouvernement d'unité nationale présidé par Daniel Ortega et formé de 5 membres est instauré. Assez tôt, l'unité éclate et seul le FSLN garde le pouvoir. En 1984, des élections confirment la popularité du parti révolutionnaire : Daniel Ortega est reconduit à la présidence du pays par 66 % des votes.

C'est de l'extérieur que proviennent les principales difficultés que le pays devra affronter. L'arrivée de Reagan à la tête des États-Unis renforce une politique hostile à l'égard du Nicaragua sandiniste.
Le gouvernement américain qui n'a pas reconnu la légitimité du régime sandiniste, va mettre en place un embargo économique contre ce dernier et très vite devenir le principal appui des contras, les opposants nicaraguayens au sandinisme qui vont mener une guérilla d'opposition.
Les contras, formés et armés par les États-Unis, vont mener depuis le Honduras des actions militaires et causer des dommages importants (assassinats, sabotages, pillage, etc.), surtout dans le Nord du pays. Ce soutien fera l'objet d'une condamnation par la cour internationale de justice de l'ONU, jugement non reconnu par les États-Unis. Le soutien des États unis aux contras durera jusqu'à la chute du régime sandiniste, de manière d'abord directe puis détournée à partir de 1983, quand est découvert que la CIA supervisait des actes de sabotage au Nicaragua sans en informer le Congrès. Malgré l'interdiction du Congrès états-unien, le soutien aux contras par le gouvernement Reagan est maintenu. L'Irangate est un révélateur de ce soutien : ce scandale a montré que l'Administration Reagan a vendu des armes à l'Iran ennemies pour financer les contras.

Le financement direct des contras et l'amendement Boland




L'administration Reagan fournissait une aide secrète aux Contras depuis novembre 1981, mais l'amendement Boland de 1982 mit fin à l'aide militaire quand on découvrit que la CIA supervisait des actes de sabotage au Nicaragua sans en informer le Congrès. L'amendement Boland, effectif à partir de décembre 1983 et jusqu'à septembre 1985, interdisait à la CIA et aux autres agences gouvernementales de fournir une aide militaire secrète.

L'administration Reagan a contourné cette disposition en faisant appel au Conseil de sécurité national (NSC), qui n'était pas explicitement visé par cette loi, pour superviser l'envoi d'aide secrète.

Le financement des USA (légal avant l'amendement Boland) envers les contras, outre les formations militaires à la guerilla, s'élevait à plus de 100000 dollars par an.

Le plan était coordonné par Oliver North du Conseil de sécurité nationale. La vente d'armes à l'Iran et le financement des Contras contourne non seulement la politique de l'Administration, mais aussi la législation passée par le Congrès connu comme l'amendement Boland. Les officiels de l'administration soutiennent que outre la restriction du Congrès de financer les Contras ou toute affaire, le président (l'Administration) pouvait continuer à trouver des moyens alternatifs de financement pour les entités et gouvernements étrangers. Les Contras finançaient une grande part de leurs activités par le Narco-trafique, cet élément conjugué aux exactions effectuées sur les populations civiles par les Contras avaient poussés le Congrès a majorité démocrate à interrompre l'aide financière aux Contras.

L'Arabie Saoudite contribua aussi à cette aide même si ce fut avec une extrême prudence. Riyad ne voulait pas que l'affaire s'ébruite et ils n'avaient qu'une faible confiance dans les capacités de la CIA à garder un secret. Au printemps 1984, les Saoudiens avaient déjà proposé une aide de huit à dix millions de dollars soit près de un million par mois. Ils précisaient que l'opération devait se faire dans le plus grand secret et constituait une affaire qui resterai à jamais cachée. C'est à cette période que l'Iran avait intensifié ses menaces sur le trafic pétrolier dans le golfe persique. Le président américain assura le roi Fadh de son soutient en cas de confrontation avec l'Iran et lui fourni une certaine quantité de missiles stinger sans les restrictions habituelles apportées à ce type de transaction.

Une autre source d'aide qui permettait d'échapper aux restrictions et aux contrôles du Congrès pouvait venir du privé. North se transforma donc en démarcheur particulier et alla solliciter diverses personnes privées. Une de ses cibles furent les milliardaires texans, favorables à la politique Réagannienne. Il ne reçut de réponse favorable que de la part de Joseph Coors qui offrit 65000 dollars pour l'achat d'un avion léger, enregistré dans les actifs de « l'entreprise »

Enfin, un autre moyen d'équiper les forces insurrectionnelles nicaraguayennes, fut de laisser du matériel sur place lors des exercices militaires conjoints menés par les États-Unis et les forces armées Honduriennes. Le matériel était déclaré comme « surplus » et après une taxe en nature prélevée par le pays, atterrissait dans les mains des Contras. Toutes ces formes de financement de la guérilla, qui impliquèrent plusieurs pays ne représentèrent que peu de fonds face à l'une des plus grosse affaire de financement clandestin des Contras, qui commença en 1985, et fit scandale sous le nom de « l'irangate ».

L'Irangate



L'Irangate est un scandale politique survenu au milieu des années 1980 aux États-Unis.L'administration du président des États-Unis d'alors, Ronald Reagan, a vendu des armes à l'Iran, (un ennemi avoué de ce pays) par l'intermédiaire d'Israël (un autre pays ennemi de l'Iran) .

Avantages US : financement avec les bénéfices de la vente des armes à l'Iran (un pays officiellement "sous embargo") , et "hors contrôle du sénat" d'un mouvement d'insurrection anti-communiste au Nicaragua (les "Contras") ,pays dirigé alors par les"sandinistes" .

Avantage Israélien : Remise d'anciennes versions contre fourniture de nouvelles versions des mêmes armes .

En juillet 1985, le gouvernement israélien propose un plan à l'administration Reagan pour obtenir la libération des otages américains détenus par les terroristes libanais ; ce plan est plein d'avantages pour tout le monde... Les Israéliens souhaitent que les États-Unis servent d'intermédiaires en expédiant 508 missiles anti-char TOW à l'Iran en échange de la libération du révérend Benjamin Weir, un Américain détenu au Liban par le Hezbollah, groupe terroriste loyal à l'Ayatollah Khomeini. Cette entente oblige les États-Unis à remplacer les missiles livrés.

Robert McFarlane, le conseiller aux affaires nationales pour la sécurité, approcha le secrétaire à la défense, Caspar Weinberger, et arrangea les détails. Les échanges commencèrent pendant les deux mois qui suivirent.

Les premiers otages américains furent relâchés vers la mi-septembre.

En novembre 1985, une autre ronde de négociations commence, cette fois les Israéliens souhaitent expédier à l'Iran 500 missiles sol-air Hawk en échange de tous les otages américains détenus au Liban. Le major général Colin Powell, assistant militaire de Weinberger, essaie d'obtenir les missiles (pour "rembourser" Israêl ), mais réalise que le contrat doit obtenir l'aval du Congrès des États-Unis, puisque sa valeur dépasse 14 millions de dollar US. McFarlane répliqua à Powell que le président avait déjà approuvé la vente.

Israël envoya un premier lot de 18 missiles à l'Iran vers la fin de novembre 1985, mais les Iraniens refusèrent ces missiles, et les envois cessèrent. Les négociations Israël-Iran continuèrent pendant quelques mois, sans résultat. En décembre 1985, Reagan signe un document secret qui décrit l'échange armes-otages.

En janvier 1986, l'administration approuve un plan proposé par un subalterne de McFarlane: la vente va reprendre ,mais via un intermédiaire (Manucher Ghorbanifar), plutôt qu'Israël, vendrait les armes à l'Iran en échange des otages. Les Iraniens refusent les armes ... Il faut dire que lui et le colonel Oliver North imposent une majoration du prix habituel de 370 % ... Après d'importantes tractations,les armes sont finalement vendues,mais il reste toujours des otages ....

Le magazine libanais Ash-Shiraa dévoile l'arrangement le 3 novembre 1986 lorsqu'un avion américain, plein de matériel destiné aux contras, s'écrase au Nicaragua. Le pilote, récupéré par les sandinistes, dénonce toute l'affaire.

Le 3 novembre 1986, l'hebdomadaire libanais pro-syrien, Al Shiraa, raconte le voyage de McFairlane à Téhéran. Le 25 novembre, Ronald Reagan, tout en niant avoir été informé de cette affaire, annonce le licenciement de Pointdexter et North. La commission Tower est chargée de faire toute la lumière sur ces évènements.
L'audition du rapport Tower s'éternise pendant des mois, mais il n'en ressort rien de concret. Au contraire de Richard Nixon, déchu par le Watergate, Reagan sort pratiquement indemne de l'Irangate. George Bush, vice-président, compromis lui aussi dans cette extraordinaire accumulation de forfaitures, n'en est pas moins élu, en novembre 1988, à la présidence des Etats-Unis...
La CIA et l'argent de la drogue

On l'a déjà dit, la guerre coûte cher et, celle menée par les Contras au Nicaragua ne faillit pas à la règle. Il fallait toujours plus de fonds pour se procurer des armes, des uniformes et tout le matériel nécessaire à la guérilla. Or, l'aide officielle américaine n'était pas sûre dans le sens où elle pouvait être interrompue par décision du congrès comme ce fut le cas avec l'amendement Boland. Il fallait donc un moyen de gagner de l'argent rapidement et en grande quantité. Il n'y a qu'une seule manière d'obtenir ces résultat, c'est en trafiquant la drogue. La drogue à un grand avantage, c'est qu'on peut en tirer des profits mirifiques. A titre d'exemple, pour se faire une idée des bénéfices dégagés, un kilogramme de pâte de base servant à l'élaboration de la cocaïne coûte moins de 500 dollars et sa vente au détail en rapporte plus de 500000. Soit un rapport de plus de un pour mille.

Des avions venus des États-Unis livraient des armes, des vivres et des équipements aux Contras du front sud basés au Costa-Rica puis, repartaient pour la Colombie. A leur retour, ils transportaient des chargements de cocaïne fournis par les cartel de Medelin ; ceux-ci étaient livrés dans des ranchs du nord du Costa-Rica, qui appartenaient à John Hull, citoyen américain.

Enfin, ils repartaient à Miami où ils livraient leur marchandise à un gang des rues nommé « Crips en blood ». Le département d'état a lui-même engagé des trafiquants, comme Michael B. Palmer, condamné en Colombie et dont il ne pouvait ignorer le passé, pour mener à bien ces opérations. Oscar Danilo Blandon, chef de la FDN (lors d'un entretient avec John Arman le 21 juillet 1990 à San Diego), témoigna qu'étant donné les propos de M. Bermudz (agent de la CIA qui s'occupe du FDN) pour qui « the end justify the means », il avait cherché par tous les moyens à obtenir de l'argent pour les Contras. La cour de justice qui enquêtait sur son cas n'ayant pas le droit de parler des activités de la CIA, elle ne put l'interroger plus avant et les seules déclarations de Blandon furent : « we received orders from the...from other people ». Il témoigna qu'ils auraient vendu en 1981 une tonne de cocaïne aux Etats Unis pour 54 millions de dollars et que « the profit was going to the contra revolution ».

Cette accumulation d'exemples et de preuves doit nous faire saisir que les opérations menées, si elles n'étaient pas le fait direct de la CIA ou du NSC avaient tout leurs soutiens. Ou sinon, comment expliquer que les hangars de North fussent utilisés, que la DEA ne fit rien pour interrompre le trafic, que les enquêtes menées furent systématiquement entravées. On comprend quand on voit les chiffres donnés par les principaux acteurs du drame qu'il était difficile de résister à la tentation. Trente cinq millions de dollars en un mois. Voilà de quoi assurer un ravitaillement sans faille. Si on le compare à ce que rapportait les autres sources de financement étudiés précédemment, on comprend que c'était effectivement le moyen le plus fiable de financer la guerre. Rappelons que la vente des missiles n'apportaient que quelques millions de dollars de bénéfice et, avec des risques plus élevés. Il s'agit aussi d'une opération de plus « amorale » et on imagine bien que le gouvernement américain et surtout les agences impliquées fassent des pieds et des mains pour que la vérité ne soit pas dévoilée.