L'an dernier, 200 personnes ont été assassinées dans le monde parce qu'elles défendaient leurs terres et leur environnement. L'extraction minière et la déforestation sont les principales causes de ces conflits mortels.

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© Eduardo Verdugo/AP/SIPAManifestation à Mexico en hommage à Berta Cáceres, militante écologiste hondurienne assassinée en mars 2016 pour son opposition à un barrage.
C'est une litanie. Le 20 mai dernier, Miguel Angel Vázquez Torres, leader d'une communauté indigène du Chiapas au Mexique, est abattu alors qu'il tente d'empêcher des éleveurs de s'accaparer des terres ancestrales. Le 22 mai, ce sont trois villageois indiens qui meurent lors d'une manifestation contre l'usage de machines extractives de sable. Le 24 mai, 10 protestataires défendant des terres convoitées sont tués par la police brésilienne. Le 27 mai au Guatemala, Carlos Maaz Coc, un pêcheur, est mis à mort parce qu'il s'insurge contre la pollution d'un lac par un site minier. Le quotidien anglais The Guardian, qui vient de décider de compiler tous les assassinats de défenseurs de l'environnement dans le monde, en est déjà à 97 pour les cinq premiers mois de 2017.

Cette année est donc "bien" partie pour battre la précédente. Selon l'ONG Global Witness, en 2016, plus de 200 militants environnementaux ont été tués de par le monde, soit un rythme de quatre par semaine. Une année record, déjà, avec une augmentation de 10% des assassinats par rapport à 2015. Et une extension du phénomène. Ces meurtres très particuliers ont en effet concerné 24 pays, contre 16 en 2015. 60% sont intervenus en Amérique latine, le Brésil étant le pays le plus dangereux pour les environnementalistes avec 49 meurtres répertoriés, devant la Colombie et ses 37 cas. C'est le Nicaragua qui a compté le plus de tués par habitant. Mais c'est surtout en Asie que la violence a pris de l'ampleur. Les meurtres y ont augmenté de 18% l'an dernier, avec en tête les Philippines et ses 28 morts. Autre phénomène inquiétant : en Inde, les assassinats environnementaux ont triplé, avec 16 dossiers en 2016 !

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Le partage de la terre au centre des conflits

CONSENTEMENT. Sans surprise, c'est bien le partage et l'usage des terres qui sont à l'origine de ces conflits violents. Souvent, les populations locales ne sont pas consultées sur les projets et se voient expropriées, au mépris des règles internationales qui imposent un consentement préalable, libre et éclairé des personnes affectées par une exploitation. 33 décès sont liés à la contestation de sites miniers ou pétroliers, première cause répertoriée d'assassinats. L'exploitation forestière vient en second avec 23 affaires, à égalité avec l'extension de l'agriculture industrielle. 18 gardes forestiers, principalement africains, ont également perdu la vie lors d'affrontements avec des braconniers. L'ennoiement de terres par des barrages a provoqué la mort de 7 militants.

Des milices paramilitaires sont suspectées d'avoir perpétré 35 meurtres tandis que la police officielle est accusée dans 33 affaires, mais Global Witness affirme avoir des preuves fortes de la responsabilité de forces gouvernementales dans 43 disparitions. Des propriétaires terriens ont fomenté 26 assassinats, et des gardes privés ou des tueurs à gages sont impliqués dans 14 cas. Enfin, les braconniers africains sont accusés de 13 meurtres de gardes forestiers. Les victimes sont à 40% des membres de communautés indigènes, les plus démunies lorsqu'elles doivent défendre leurs terres, souvent situées dans des régions éloignées où les exactions peuvent se dérouler sans témoin, souligne l'ONG.

En 2016 cependant, un cas a particulièrement indigné l'opinion internationale. Dans la nuit du 2 mars, des tueurs à gages ont abattu à son domicile, devant ses enfants, Berta Cáceres, une militante écologique du Honduras. Cette quadragénaire issue du peuple autochtone Linca s'opposait à la construction du barrage d'Agua Zarca qui allait interdire aux riverains l'accès à la rivière Gualcarque sans que ceux-ci aient été consultés. Elle avait reçu l'année auparavant le prestigieux Goldman Environmental Prize. La condamnation mondiale unnime de cet assassinat n'a visiblement pas suffi à freiner l'ardeur des tueurs.