Traduit par Marie-Ange Patrizio

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Dans la nuit de mercredi à jeudi les raids aériens sur Tripoli ont causé la mort d'au moins 40 civils : le général canadien Charles Bouchard en est parfaitement au courant tandis qu'il se prépare à la conférence de presse de la base Jfc (Joint Force Allied, NdT) (1) à Bagnoli (Naples). C'est aussi aujourd'hui (jeudi 31 mars 2011, NdT) qu'arrive dans ses mains la direction unique de l'opération « Protecteur Unifié » qui passe sous commandement OTAN ; mais le militaire, qui a une longue arrière derrière lui, sait que le monde lui demandera des comptes sur les victimes, femmes et enfants (et hommes, NdT) ensevelis sous les décombres d'un immeuble écroulé. Et même si les bombardements étaient sous contrôle de la coalition des volontaires, conduite par USA, France et Grande-Bretagne, l'OTAN ne peut pas faire mine de rien. Mais cette fois, celui qui hausse le ton sur les dommages collatéraux des attaques aériennes qui devraient avoir un objectif « humanitaire », n'est pas un membre du régime Kadhafi, mais bien l'évêque de Tripoli, monseigneur Giovanni Martinelli : « Les raids dits humanitaires -a-t-il déclaré très tôt dans la matinée- ont fait des dizaines de victimes parmi les civils dans certains quartiers de Tripoli. J'ai recueilli divers témoignages de personnes dignes de foi à ce sujet. En particulier, dans le quartier de Buslim, à cause des bombardements, une habitation civile s'est écroulée en provoquant la mort d'au moins 40 personnes ».

Bouchard arrive avec 15 minutes de retard dans une petite salle de conférence installée, d'après le commandement OTAN, à la hâte ces derniers jours. De Bruxelles aussi les media internationaux, en vidéoconférence, piaffent d'impatience et font pression pour savoir la vérité, mais les hauts gradés freinent des quatre fers : « Le général a très peu de temps et ne peut répondre qu'à 5 questions de Bruxelles, et 3 ici à Naples ». Tactique qui cache mal l'intention de concéder aussi peu d'informations que possible.

Bouchard parle d'abord de l'opération, explique que le passage de pouvoir s'est réalisé sans problèmes, qu'en quelques heures ont déjà été accomplies « plus de 90 actions » de bombardement, parce que l'Alliance peut compter sur « plus de cent avions de combat et de soutien et sur une douzaine entre bâtiments navals et sous-marins ». Le général souligne que l'objectif est celui de faire respecter l'embargo d'armes et la zone d'exclusion aérienne, et rappelle ainsi à plusieurs reprises, comme il l'avait fait mardi (29 mars 2011, NdT)) de cette même base militaire, que la mission de son commandement était de protéger la population civile. Les questions de la salle cependant lui rappellent les 40 morts, un journaliste américain (étasunien) lit les déclarations de Martinelli : « S'il est vrai que les bombardements semblent ciblés -a déclaré l'évêque de Tripoli- il est tout aussi vrai qu'en frappant des objectifs militaires, qui se trouvent au milieu de quartiers civils, on touche aussi la population ». « Nous mènerons une enquête dans la chaîne de commandement pour voir s'il y a des preuves, nous sommes en train d'enquêter sur ce qui s'est passé », est la réponse expéditive du général qui dit être au courant de l'épisode ; et que l'OTAN « est en train d'enquêter » pour vérifier si ses forces sur le terrain sont impliquées ou non. Puis Bouchard dont le visage ne trahit aucune émotion se disculpe à la Ponce Pilate : « Nous avons pris le commandement complet des opérations seulement à 6 heures du matin, heure Greenwich. Nous sommes en train de prendre tous les aspects au sérieux, mais l'opérativité totale de l'OTAN n'était pas encore activée au moment des faits ; nous vous informerons quand l'enquête sera terminée ».

En réalité, cette fois, qu'il y ait eu un massacre de civils est une chose assez claire pour tout le monde, il ne s'agit pas des cent personnes décédées, de la propagande, au début de l'attaque, du régime Kadhafi (à propos desquels l'auteur ne donne cependant aucune source certifiant la propagande, NdT), et arrivent après les 11 victimes de Tajoura et les 17 blessés de ces jours derniers à Dita, sur la route de Misurata, quand un autre hôpital a été touché (selon un reportage de Euronews)(sources à chercher, NdT) Mais à ce propos, même l'amiral Giampaolo Di Paola, président du comité militaire de l'OTAN, n'a pas voulu faire de commentaires, pratiquant la même attitude que Bouchard, de renvoi de la responsabilité sur d'autres : « L'OTAN n'a pris le total commandement des opérations qu'à 8 heures (locales ; remarquable marque d'indépendance par rapport au commandement étasunien -de protection- unifié(e)... NdT). Mais c'est un fait que jusqu'à présent les attaques contre les civils viennent du régime de Kadhafi ». De Naples enfin arrive aussi l'avertissement à Kadhafi et à ses soutiens : « Je conseille vivement aux assaillants de se désister et de se retirer immédiatement, sinon ils paieront les conséquences de leurs actions », dit le commandant de l'opération Protecteur Unifié, en partant à toute allure.

Edition de vendredi 1er avril de il manifesto

ilmanifesto.it

Notes de la traductrice.

Voir : jfcnaples.nato.int, et en particulier en cliquant sur Missions,

jfcnaples.nato.int détails de quelques opérations passées et photos des assassins potentiels (stipendiés par nos impôts).