Traduit par Info Palestine

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L’attaque israélienne de décembre 2008-janvier 2009 a coûté la vie à plus de 1400 Palestiniens, dont des centaines d’enfants. Cette opération terroriste à grande échelle a été tolérée, cautionnée et dans certains cas épaulée par les puissances occidentales - Photo : Hatem Omar/MaanImages
Les événements actuels sont très semblables à ceux qui ont précédé l'opération Caste Lead, écrit Ali Abunimah.

Au cours des dernières semaines une escalade dans la violence entre Israël et les organisations de la résistance palestinienne dans la Bande de Gaza sous occupation israélienne, ont coûté la vie à plus d'une dizaine de Palestiniens, le plus jeune d'entre eux étant Mahmoud Jalal Al-Hilu âgé de 10 ans.

Cette escalade augmente-t-elle la probabilité d'un autre assaut à grande échelle sur Gaza, semblable à l'opération Cast Lead de l'hiver 2008-2009 qui a tué plus de 1400 Palestiniens ? Il y a des signes inquiétants venant d'Israël - dans les paroles comme dans les actes - qui pourraient préparer le terrain pour une attaque. Le sursaut de violence a pris une autre dimension aux premières heures du 2 avril quand Israël a lancé une attaque aérienne contre la Bande de Gaza, assassinant trois militants de l'aile militaire du mouvement Hamas.

Israël n'a pas prétendu que les trois militants du Hamas étaient engagés dans une quelconque activité hostile au moment où ils ont été massacrés (ils circulaient à bord d'une voiture), mais une déclaration de l'armée israélienne a affirmé qu'ils « prévoyaient d'enlever des Israéliens au cours des prochaines vacances juives de Pâques », soit plusieurs semaines plus tard.

Cette dernière attaque israélienne a constitué un meurtre qualifié d'extrajudiciaire, dans lequel Israël, la force occupante, agit en tant que juge, jury et bourreau, lançant des accusations pour lesquelles il n'a fournit aucune preuve et après qu'il ait déjà appliqué la peine de mort. En vertu du droit international, ceci s'appelle un crime de guerre.

Les médias internationaux ont tendance à présenter ces actions comme des « représailles » israéliennes face à des attaques palestiniennes, mais une lecture attentive des médias israéliens donne une image très différente : ce sont des provocations et des escalades dans la violence délibérées de la part d'Israël.

Le 23 Mars, Avi Issacharoff et Amos Harel qui écrivent dans le quotidien israélien Haaretz ont rapporté le fait suivant : « Les tensions actuelles ont commencé exactement il y a une semaine quand Israël a lancé une attaque aérienne sur une base de Hamas dans les ruines de la colonie [juive] de Netzarim, tuant deux hommes du Hamas. Cette attaque est venue en réponse à une [fusée] Qassam tirée depuis Gaza qui a atterri dans un terrain vague. » Les Palestiniens ont répliqué avec un tir de 50 projectiles vers Israël.

Israël a alors « lancé une série d'attaques aériennes dans lesquelles un certain nombre de militants du Hamas ont été blessés. » Et le 22 mars les forces israéliennes ont tiré des obus qui ont tué Mahmoud Al-Hilu et trois autres civils, soit-disant en réponse à des tirs de mortier depuis un champ d'oliviers du côté de Gaza (« Une guerre à petite échelle est en train d'être lancée le long de la frontière avec Gaza »).

Le 24 mars, observent Issacharoff et Harel, « en dépit de l'escalade, le Hamas ne semble pas vouloir d'affrontements à grande échelle. L'organisation a réellement des bonnes raisons de croire que c'est Israël qui fait monter la tension au sud. » Cela a commencé par un bombardement il y a quelques semaines, lequel a perturbé le transfert d'un grande somme d'argent depuis l'Egypte vers la Bande de Gaza, et cela a continué avec l'interrogatoire en Israël de l'ingénieur et membre du Hamas, Dirar Abu Sisi (que des agents israéliens ont enlevé en Ukraine) et s'est conclu avec le bombardement la semaine dernière d'une base d'entraînement du Hamas dans laquelle deux militants de ce mouvement ont été tués.

« Il est remarquable que le Hamas n'ait pas tiré de fusées vers Israël au cours des deux derniers jours, alors même que quatre civils Palestiniens ont été tués par des tirs de mortier venant de l'IDF [armée israélienne] le mardi [22 mars] » (« Le Hamas n'est vraisemblablement pas à l'origine de l'attaque à la bombe de Jérusalem »).

Issacharoff et Harel ajoutent dans une analyse datée du 25 mars que l'attaque israélienne sur l'avant-poste du Hamas à Netzarim « est supposée avoir été autorisée par le ministre de la défense, qui était censé savoir que des personnes s'y trouveraient au cours de la journée et que cela entraînerait des pertes qui auraient d'autres conséquences qu'une attaque sur des lieux vides. Israël a escompté - de manière erronée - que le Hamas ne répondrait pas au bombardement. En fait, le Hamas a répondu en tirant 50 obus de mortier samedi matin » (« Une escalade qui s'annonce »).

Il est difficile de croire, particulièrement à la lumière des meurtres extrajudiciaires du 2 avril, que les dirigeants israéliens ne savent pas que tuer des Palestiniens inciterait à des représailles du côté palestinien. Il semble que très probablement c'était là leur intention.

Ces événements sont très semblables à ceux qui ont précédé l'opération Caste Lead. Après un printemps sanglant en 2008 où des centaines de Palestiniens ont été tués et blessés dans des attaques Israéliennes sur Gaza, Israël et le Hamas ont négocié un cessez-le-feu mutuel qui commençait le 19 juin 2008. De l'aveu d'Israël, cette trêve mutuelle a eu comme résultat une réduction de 97%t des tirs de fusées depuis Gaza au cours des quatre mois qui ont suivi, et aucune des poignées de projectiles lancés par le Hamas, n'a causé la moindre blessure à des Israéliens.

Un cessez-le-feu mutuellement convenu s'est avéré être la façon la plus efficace d'atteindre le but censément le plus important pour Israël : protéger les civils israéliens des attaques par missiles depuis Gaza. Mais dans la nuit du 4 au 5 novembre 2008, Israël a décidé de briser la trêve. Comme The Guardian le rapportait le 5 novembre 2008, « un cessez-le-feu de quatre mois entre Israël et les militants palestiniens à Gaza est mis en péril aujourd'hui après que les troupes Israéliennes aient massacré six combattants du Hamas dans une incursion dans le territoire » (« La trêve de Gaza brisée après une incursion israélienne qui tue six militants armés du Hamas »).

Puis, exactement comme il l'a fait lors de sa dernière attaque, Israël a justifié les massacres par l'affirmation invérifiable que ceux qu'il a massacrés étaient partie prenante d'un complot pour capturer des Israéliens.

Le 21 mars, dans ce contexte d'escalade de la violence, l'aile militaire du Hamas elle-même a déclaré qu'elle serait disposée à appliquer une autre trêve mutuelle si Israël en était d'accord, mais Israël n'a montré aucun intérêt (« Gaza : Hamas veut une trêve, » Ma'an News, le 21 mars 2011).

La constante provocation israélienne à la violence, selon toute vraisemblance délibérée, le long de la frontière avec Gaza survient dans un contexte de déclarations et d'initiatives bellicistes et de propagande de la part des dirigeants israéliens. Le 15 mars dernier, Israël a arrêté un bateau en route de Turquie vers Alexandrie en Egypte, qu'elle a accusé sans fournir de preuves de transporter des armes destinées à Gaza.

Le vice-premier Ministre Silvan Shalom a déclaré à la radio israélienne le 23 mars qu'Israël pourrait devoir lancer une autre attaque à grande échelle sur Gaza pour renverser le Hamas, ajoutant : « Je dis ceci malgré le fait que je sache qu'une telle action, naturellement, pousserait la région dans une situation encore plus explosive ».

Le ministre de la culture Limor Livnat a averti, selon Haaretz, qu'Israël ne pourrait avoir d'autre choix que de lancer une opération Cast lead numéro 2 [Israël est un pays où les ministres de la culture se comportent comme des généraux bellicistes. Peut-être sortent-ils leur pistolet quand ils entendent le mot 'culture' ? - N.d.T].

Shalom, inversant les faits et rejetant la responsabilité de l'escalade de la violence sur les Palestiniens, a placé la possibilité d'une nouvelle guerre contre Gaza dans un contexte manifestement politique. Le Hamas, selon le vice Premier Ministre cité par Haaretz, « pourrait avoir ouvert un nouveau front avec Israël 'pour arrêter n'importe quelle possibilité de dialogue parmi les Palestiniens ou pour venir à la négociation intra-palestinienne en position bien plus forte' » (« Netanyahu : Israël continuera à fonctionner contre les terroristes à Gaza, » le 23 mars 2011).

En d'autres termes, selon Shalom, c'est la force de résistance du Hamas qui empêche une réconciliation intra-palestinienne dans des conditions favorables à l'Autorité Palestinienne de Mahmoud Abbas (AP), basée à Ramallah et soutenue par Israël.

Qu'Israël prépare délibérément le terrain pour un nouvel assaut sur Gaza ou finisse par y trébucher - si l'escalade actuelle ne s'arrête pas - une telle attaque doit être comprise en termes politiques. Ce serait une tentative pour en finir une bonne fois avec le Hamas et n'importe quelle autre îlot de résistance palestinienne.

L'engagement à la résistance - politique ou militaire - de tout groupe palestinien significatif demeure un obstacle important à la pleine légitimation de la chaleureuse entente qui règne entre Israël et l'AP dirigée par l'Abbas, dont l'ampleur a été récemment mise à nue au grand jour dans les mémos de Palestine. En effet les relations sont si amicales qu'en octobre dernier les dirigeants de plus haut niveau de l'AP à Bethlehem ont reçu le chef d'état-majorl israélien Gabi Ashkenazi - qui a commandé l'opération Cast Lead- comme invité d'honneur, lui organisant même une visite guidée de l'Église de la Nativité - (« Le chef d'état-major de l'armée israélienne visite Bethlehem, » Ma'an News, le 3 octobre 2010).

Ironiquement, le Hamas reste beaucoup moins intransigeant qu'Israël, comme cela est démontré par ses offres répétées de cessez-le-feu - qu'Israël rejette ou viole systématiquement - par les bruits constants au sujet « d'une réconciliation » avec Abbas sans insister sur le fait que ce dernier en finisse avec ses relations de « sécurité » avec Israël, par son adoption de l'ancienne « solution à deux états ». En dépit de ces concessions politiques non avouées comme telles, le Hamas maintient une capacité militaire qu'Israël est peu disposée à tolérer, soit comme défi vis-à-vis de lui-même, soit comme défi vis-à-vis de l'AP.

Jusqu'ici, il y avait de bonnes raisons de croire qu'Israël hésiterait à lancer une nouvelle attaque militaire majeure sur Gaza. Il souffre toujours en effet des retombées diplomatiques et politiques de l'opération Cast lead - retombées dont fait partie le rapport des Nations Unies élaboré sous la direction du juge Goldstone - comme du massacre de neuf militants à bord du Mavi Marmara dans la Flotille de la Liberté pour Gaza au printemps dernier.

Sans exagérer les risques, les contraintes sur Israël peuvent s'alléger. À la suite de la révolution en Egypte et dans un contexte de bouleversements politiques dans le monde arabe, certains Israéliens peuvent penser qu'ils ont une « dernière occasion » d'agir durant cette situation d'interrègne avant qu'un nouveau et moins amical gouvernement soit en place au Caire. Les interventions militaires occidentales et saoudiennes en Libye et au Bahrain respectivement ont également fourni une nouvelle respectabilité à l'emploi de la force militaire à des fins politiques.

La complicité internationale continue cependant à envoyer à Israël un message très clair selon lequel son impunité est garantie. Le récent veto de l'administration Obama à une résolution du Conseil de sécurité des Nations Unies - qui ne faisait que reprendre les termes de la position des Etats-Unis concernant la construction de colonies par Israël en Cisjordanie - a été une indication limpide qu'Israël dispose toujours d'un chèque en blanc de la part des Etats-Unis.

Tragiquement, le plus grand contributeur à la confiance renouvelée en Israël pour se lancer à nouveau dans une série de meurtres à grande échelle dans Gaza, est peut être juge Richard Goldstone lui-même. Les dirigeants israéliens ont exploité son article de contrition du 1er avril dans The Washington Post comme une preuve qu'Israël n'a jamais commis de crimes de guerre à Gaza, et qu'il était la victime d'une « diffamation sanglante », comme Jeffrey Goldberg, ancien volontaire de l'armée d'occupation israélienne le dit sur son blog Atlantic.

Tandis Que Goldstone essayait clairement d'apaiser les sionistes qui l'ont soumis à une intense campagne de dénigrement et d'ostracisme personnel, son article n'a en fait nullement contredit même une seule et concrète conclusion du rapport qui porte son nom (« Reconsidération du Rapport de Goldstone sur Israël et les crimes de guerre, » le 2 avril 2011).

Deux analyses importantes de l'initiative de Goldstone, et comment il ne s'agit nullement d'un reniement du rapport qui porte son nom est visible sur Mondoweiss et daté du 2 avril : « Ce que l'opération de contrition de Goldstone ne dit pas » par Yaniv Reich, et « Goldstone encense l'enquête israélienne sur les crimes de guerre dans Gaza, mais le comité des Nations Unies en a une image différente, » par Adam Horowitz. La contrition de Goldstone concerne l'opinion personnelle d'une seule personne. Le rapport de Goldstone, un document officiel des Nations Unies et établi par une commission, demeure un condensé des actes d'Israël - et du Hamas - qui n'est contredit par aucune nouvelle preuve, et encore moins par les « enquêtes » faites par Israël.

Pourtant, comme nous l'avons tristement constaté tant de fois, l'analyse et la prise en compte appropriés de faits de base ont peu d'incidence dans le « brouillard de la guerre, » et particulièrement quand Israël est la partie qui lance cette guerre.