trump
À mi-parcours de son mandat, peut-on dire que Trump est en train de réussir son pari économique ? Ce dernier a enfreint toutes les règles d'un pilotage raisonnable. Il appuie sur l'accélérateur alors même que son économie est proche du plein emploi, au risque de précipiter une surchauffe. Il sape les rares outils de protection sociale et déploie sans complexe une fiscalité pro-riche pro-entreprises, alors même que les économistes mettent en alerte sur l'effet délétère du partage inéquitable des fruits de la croissance aux États-Unis. Trois décennies qui laissent sur les bas-côtés 90% de la population et produisent des faillites personnelles de plus en plus fréquentes parmi les plus précaires ou les étudiants surendettés. Il bafoue, « les sacro-saintes règles de l'OMC », clé de voute de la prospérité à l'heure de la mondialisation, érigeant de multiples barrières pour protéger ses industries locales. Il piétine toutes les recommandations du GIEC, s'engageant dans une fuite en avant sur les énergies fossiles. Bref, Trump à toutes les allures du pilote fou, qui va finir dans les fossés de l'histoire.

Un affichage flatteur à mi-mandat

Pourtant, à mi-mandat, l'affichage est flatteur, contrastant avec l'atonie de la raisonnable Europe. La croissance accélère, flirtant avec les 4% depuis deux trimestres. L'emploi poursuit les rythmes de croissance initiés sous Obama. Le chômage renoue avec ses minimas historiques de 2000 et pourrait accrocher, au rythme où vont les choses, les points bas du milieu des années 60 dans le courant 2019. Et les indicateurs de climat, aussi bien du côté des entreprises que des ménages laissent augurer la poursuite du mouvement, voire son accélération. Avec deux grandes ombres au tableau : le déficit commercial se creuse toujours plus et la production manufacturière ne renoue pas avec ses niveaux d'avant 2008. La politique pro-buisness et protectionniste n'a pas d'effet bien tangible sur l'offre.

Pour les Cassandres, Trump joue avec le feu. Il a juste survitaminé son économie en vue des mid-termes. Et la supercherie va faire long feu. En sur-régime, le moteur va se gripper brutalement avant la fin du mandat. Et sans parachute social, avec une bourse qui plane, la chute ne sera que plus brutale.

C'est sous-estimer les marges dont dispose Trump. D'abord, les indicateurs de tension ne sont pas en ligne avec ce que disent les plus alarmistes. Les taux d'utilisation n'ont pas atteint leur maximum. La croissance des salaires demeure modérée pour un pays qui est supposé avoir épuisé toutes ses réserves de main-d'œuvre. Cette idée que les Etats-Unis tirent sur la ficelle et ne disposent plus de marges de manœuvre passe sous silence deux éléments décisifs :

1. Le taux d'emploi est très loin d'indiquer une mobilisation maximale de la population disponible. Pour les pessimistes, il ne ré-atteindra pas ses pics des années 2000 car la population active a globalement vieilli par rapport à cette période, ce qui limite la possibilité de mobiliser intensément la population en âge de travailler. À cela près que c'est bien du côté des jeunes qu'a eu lieu la plus forte désertion, et que de ce côté il existe bien encore une bonne armée de réserve qui crée des marges à la politique de Trump.
2. Les pessimistes entérinent un peu trop vite que la productivité américaine est en panne et le restera. Or, ce n'est pas ce que l'on observe. La productivité est bien en train se réveiller, en même temps que l'appareil productif est mis sous tension.

Trump gagne son pari politique

Néanmoins, Trump va-t-il payer le caractère asocial de sa politique fiscale à l'horizon de son mandat ? Pas sûr non plus. La hausse du salaire minimum et de l'emploi non qualifié fait le job de réduction des inégalités en phase de croissance. Les populations vulnérables ne paieront le prix de cette politique que si la crise survient avant l'échéance du mandat.

Trump paiera-t-il sa folle imprévoyance an matière d'environnement... bien sûr que non. Il n'aura peut-être, même pas, à rendre compte de sa politique de son vivant.

Bref, Trump est bien en train de gagner son pari politique. Il conduit les Etats-Unis, comme il a conduit ses affaires, en avant toutes. Les catastrophes surviendront. Indubitablement. Mais peut-être pas dans l'horizon qui intéresse l'hôte de la maison Blanche.