© LP/Fred DugitA Paris, plus de 1000 personnes ont été mis en garde à vue. (Illustration).
Éric, 45 ans, mécanicien dans l'industrie, avait fait le déplacement avec sa femme et son fils depuis l'Alsace pour manifester à Paris. Ils ont été mis en garde à vue pour la possession de masques et de lunettes... restés dans leur voiture.
Samedi, ils étaient encore nombreux à manifester à Paris pour l'acte 4 de la mobilisation des Gilets jaunes. Une journée, une nouvelle fois émaillée de violences dans Paris notamment, et qui a donné lieu à près de 2 000 interpellations dont plus de 1 700 gardes à vue à travers toute la France, selon les derniers chiffres du ministère de l'Intérieur, donnés dimanche matin. Parmi eux, Éric, mécanicien dans l'industrie, est venu d'Alsace pour manifester. Il a été placé en garde à vue avec sa femme et son fils pendant 14 heures avant d'être relâché. En colère, il témoigne pour Le Parisien.
« Je suis écœuré : on nous a empêchés de manifester. Cela conforte ce que je pense depuis un bout de temps : il n'y a pas de réelle liberté d'expression en France. Ce qui s'est passé samedi, c'est digne de la Corée du Nord ou de la Russie.
Nous venions de nous garer, rue de la Bienfaisance, à Paris dans le VIIIe arrondissement. Nous étions à 200 m de la voiture quand les gendarmes nous sont tombés dessus. Ils nous ont collés contre le mur, fouillés et nous ont demandé notre carte identité que nous avons fournie. Nous n'avions rien de compromettant sur nous. Ils ont exigé que nous ouvrions notre coffre de voiture. À l'intérieur, il y avait trois masques de peintre encore dans leur emballage, et des lunettes de protection. On les avait laissés dans la voiture, car durant le trajet, on avait appris par la radio que c'était interdit.
« J'ai refusé de signer la procédure »Les gendarmes nous ont parlé d'armes de première catégorie et nous ont placés en garde à vue pour
participation à un attroupement en vue de commettre un délit ou un crime. Ils nous ont conduits dans une rue perpendiculaire où nous sommes restés alignés face à un mur avec une dizaine d'autres manifestants durant plus de deux heures. Après nous avons été conduits en fourgon cellulaire au commissariat du XIIIe arrondissement et placés en cellule.
J'étais avec mon fils, mais ma femme était seule. Elle est encore très choquée, elle ne s'était jamais retrouvée en garde à vue. Elle est agent de production. Heureusement qu'un ami nous a trouvé un avocat, sans lui, je pense que nous serions encore en garde à vue. Nous étions une vingtaine dans une cellule qui était faîte pour en accueillir moitié moins. Des manifestants pacifistes comme nous. L'un d'entre nous a été interpellé avec un casque alors qu'il venait de cadenasser sa moto, un autre a été arrêté sans raison alors qu'il avait sur lui une pièce d'identité et 100 euros. Nous avons été libérés à 22 heures, avec un rappel à la loi. Moi, j'ai refusé de signer la procédure.
C'est une honte. Quelle image mon fils va avoir désormais de la police, de la justice. J'ai été Casque bleu lors de la guerre en ex-Yougoslavie. Jamais je n'ai vu l'armée se comporter avec les populations comme les forces de l'ordre, ce samedi. Cela ne nous empêchera pas de revenir, nous ne lâcherons pas, nous irons jusqu'au bout. Le système est pourri, on méprise les petites gens. Nous travaillons pour rien. Heureusement nous sommes frontaliers du Luxembourg et de l'Allemagne. Nous allons à la pompe au Luxembourg et faire nos courses en Allemagne. Pour deux cents euros, nous avons le double dans le caddie, comment vous expliquez cela ? »
« Une dérive autoritaire du gouvernement »Un traitement qui a particulièrement agacé leur avocat, Me Avi Bitton.
« Je ne vais pas crier à la dictature, mais il y a une dérive autoritaire du gouvernement. Dès 8 heures du matin, avant même que la manifestation ne démarre, des interpellations arbitraires ont eu lieu en marge. Le gouvernement voulait dissuader les Gilets jaunes d'aller manifester, les chiffres des gardes à vue ont immédiatement été donnés. C'était une opération de communication. Le résultat c'est que 70 % des gardes à vue se terminent sans poursuite. La justice est prise en otage. Les gardes à vue préventives, ça n'existe pas dans le code pénal. »
Une technique illégale, qui gonfle autant les chiffres des arrestations qu'elle diminue le nombre de manifestants, et après Castaner bombe la poitrine, divise les chiffres par 10 ou par 20 et prétend que "ce n'est pas la France" qui manifeste...
Etat policier, on s'en rapproche... Mais c'est surtout l'exécutif qui essaye de sauver ses meubles. Quant au discours de Macron, même pas en direct, qui lâche des miettes pour gagner du temps, apaiser une partie des manifestants pour diviser et affaiblir le mouvement, tout en proclamant qu'il continuera plus vite, plus haut, plus fort... on atteindra bientôt des records dans les olympiades de l'injustice. Du reste rien ne prouve qu'il tiendra ses engagements, j'en ai connu des comme lui, personnellement, qui vous font des promesses qui n'engagent que ceux qui y croient. Bizarrement ce sont tous des assoiffés de fric et/ou de pouvoir...