Puerta del Sol, Madrid
© Pedro ArmestreQuand le générateur qui fournit en énergie le village alternatif de la Puerta del Sol à Madrid est tombé en panne, les organisateurs ont immédiatement lancé un appel à l'aide sur internet.
Quand le générateur qui fournit en énergie le village alternatif de la Puerta del Sol à Madrid est tombé en panne, les organisateurs ont immédiatement lancé un appel à l'aide sur internet.
Il n'aura fallu que quelques heures pour qu'un volontaire se précipite en apportant des bouteilles de gaz. Le générateur a pu redémarrer, fournissant l'électricité nécessaire à la cuisine, au centre de presse, à la garderie, à toutes les installations du camp.

L'organisation est parfaite au point que les manifestants, qui se réclament de la "Spanish revolution", espèrent devenir un modèle de démocratie et un exemple pour le monde. "Il y a toujours quelqu'un qui est prêt à apporter ce dont nous avons besoin. De la nourriture, de la crème solaire, du matériel de construction, pas une seule fois nous n'avons manqué de nourriture", explique Blanca, une étudiante en journalisme de 22 ans devenue l'une des porte-parole.

Né via les réseaux sociaux, le mouvement aux revendications multiples, du chômage à la "corruption" des hommes politiques, des coupes salariales à tous les excès du capitalisme, se veut apolitique et rassemble des citoyens de tous horizons, jeunes, chômeurs ou retraités.
La première difficulté aura été de structurer ce mouvement aux accents idéalistes et aux origines disparates, la deuxième sera de l'organiser sur la durée. "Repose toi, ta fatigue les favorise", avertit une pancarte. Et pourtant, grâce aux dons, le village a pu s'étendre de quelques stands il y a une semaine à un vaste dédale d'allées, recouvert de bâches blanches et bleues, aux airs de souk arabe, qui remplit presque entièrement la grande place du centre de Madrid.

Chaque jour, les organisateurs dressent la liste de leurs besoins en les inscrivant à la main sur des panneaux en carton, mais aussi sur des blogs et sur les réseaux sociaux comme Facebook et Twitter. Trois cantines servent des repas matin, midi et soir, une salle de lecture en plein air accueille dans des sofas ceux qui veulent se reposer, sans oublier l'espace de relaxation offrant des massages. Les haut-parleurs lancent régulièrement des appels aux volontaires pour toutes sortes d'activités, du nettoyage des rues à la cuisine.

Pour les loisirs, il y a des concerts improvisés et des performances théâtrales qui animent la vie du village, en particulier le soir depuis que le campement, au centre de grandes manifestations la semaine dernière, est devenu un lieu où chaque soir des milliers de sympathisants viennent déambuler à la rencontre des jeunes manifestants. En plus des générateurs, l'organisation a installé depuis lundi deux panneaux solaires qui fournissent une partie de l'électricité.

Au départ, le campement devait être installé jusqu'aux élections locales de dimanche dernier, qui ont vu la déroute du parti socialiste face à la droite. Les manifestants, aux cris de "bien sûr, bien sûr qu'ils ne nous représentent pas" prennent pour cible les grands partis politiques, accusés de corruption et d'incompétence et dimanche, ils ont décidé de rester pour au moins une semaine supplémentaire.
"Nous avons voté, mais nous sommes toujours indignés, par la loi électorale, les politiciens corrompus..." affirmait une pancarte. Mais la difficulté désormais est de maintenir la mobilisation en l'absence d'objectif précis.

"Il est difficile de construire une infrastructure quand on ignore combien de temps nous serons ici. Nous essayons de tirer parti le plus possible du matériel que nous avons", explique Jorge Sesma, un manifestant de 20 ans armé d'un marteau, occupé à construire un comptoir en bois pour une cantine. "Ceci a fonctionné parfaitement pendant huit jours. Il n'y a pas de référence historique d'une société survivant sans leader", explique Blanca. "C'est risqué, mais si cela fonctionne nous pouvons être un exemple pour le monde".