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© Photo: AFP/Adam JanDes milliers de Bahreïnis ont manifesté pacifiquement dans les rues de Sintra, le 17 juin, à l'appel du parti chiite Wefaq.
Huit opposants chiites de Bahreïn ont été condamnés mercredi à la prison à perpétuité pour « avoir formé et dirigé un groupe terroriste visant à changer la Constitution et le régime monarchique » de la famille sunnite Al-Khalifa, annonce l'agence officielle BNA.

Treize autres prévenus faisant face au même chef d'accusation ont été condamnés à diverses peines de prison par le tribunal spécial.

Les 21 accusés avaient été arrêtés dans le cadre des importantes manifestations organisées par l'opposition, majoritairement chiite, qui ont secoué Bahreïn cet hiver.

Les manifestants réclamaient des libertés politiques accrues, avec l'instauration d'une véritable monarchie constitutionnelle limitant les pouvoirs de la famille royale Al-Khalifa, voire d'une république.

Accusations de complot et de liens avec une organisation terroriste

Les 21 opposants traduits devant la justice étaient accusés non seulement de complot, mais aussi d'avoir entretenu des liens avec une organisation terroriste à l'étranger, une allusion qui semble faire référence à l'Iran.

Deux membres influents du parti chiite Haq, Hassan Machaimaa et Abdeljalil Al-Singace, ainsi que le chef du parti chiite Wafa, Abdel Wahab Hussein, sont au nombre des opposants condamnés à passer le reste de leur vie derrière les barreaux.

Machaimaa et Al-Singace faisaient partie d'un groupe de 25 chiites graciés par le roi Hamad ben Issa Al-Khalifa le 21 février, dans un geste visant à calmer le mouvement de contestation. Ils ont été arrêtés de nouveau le 17 mars.

Ibrahim Chérif, dirigeant sunnite du mouvement laïque de gauche Waad, a pour sa part écopé de cinq années de prison. Le parti Waad avait également réclamé des réformes politiques dans le royaume.

Seuls 14 des accusés ont été officiellement traduits devant le tribunal militaire. Les sept autres étaient jugés par contumace.

Après le verdict, les accusés ont levé le poing et promis de continuer à réclamer des réformes « de manière pacifique », selon des témoins.

Mardi soir, les habitants de plusieurs villages chiites de Bahreïn ont manifesté en solidarité avec les dirigeants de l'opposition. Aucune violence n'a cependant été rapportée.

Le verdict du tribunal est rendu à 10 jours de l'ouverture d'un « dialogue national » prévu par le roi.

Un mouvement d'opposition violemment écrasé

Le royaume de Bahreïn, qui compte environ 800 000 habitants, est gouverné depuis 1783 par la famille sunnite Al-Khalifa. Les chiites, qui constituent environ 70 % de la population, s'estiment lésés par les politiques actuelles du royaume.

Des manifestants qui se rassemblaient pacifiquement place de la Perle ont été écrasés sur l'ordre de la famille royale, à l'aide de renforts militaires envoyés par l'Arabie saoudite et les Émirats arabes unis.

Cette intervention, menée après l'imposition de l'état d'urgence, a été vivement critiquée par l'Iran, dont la population est chiite.

Pas moins de 23 médecins et 24 infirmières ayant soigné des manifestants au complexe médical de Salmaniya, à Manama, ont aussi été accusés d'avoir oeuvré au renversement de la monarchie Al-Khalifa.

Depuis la fin des manifestations, le monument principal érigé place de la Perle, dans la capitale, Manama, a été détruit par le pouvoir, désireux d'effacer un symbole de la contestation.

Al-Jazira a aussi rapporté que certaines mosquées chiites, considérées comme des lieux de sédition, ont été rasées par le pouvoir.

Bahreïn est un allié stratégique des États-Unis. Le royaume accueille la 5e flotte de la marine américaine, dont les bâtiments de guerre patrouillent dans un secteur de 6,25 millions de kilomètres carrés qui inclut notamment l'océan Indien, la mer Rouge, le canal de Suez et le détroit d'Hormuz.