Entre arguments justifiés et hypocrisie autoritaire, doit-on parler de bienveillance ou de croisade ?
De l'ostéopathie à la naturopathie, en passant par l'hypnose ou encore le jeûne, d'autres formes de médecines que ladite « médecine conventionnelle » se sont fait une place dans la société au cours des dernières années.
Selon le rapport, ce phénomène s'explique à la fois par « la pénurie de l'offre de soins, l'influence de la crise sanitaire, la mouvance bio et l'offre des formations bien-être/développement personnel ». L'Ordre y voit un danger pour les patients. Ainsi, son objectif est de « faire le tri entre des pratiques dangereuses pour la santé des patients et celles qui peuvent présenter un intérêt dans l'accompagnement du malade, et les restreindre au seul domaine du bien-être. »
Définitions des « pratiques de soins non conventionnelles »
De quoi parle-t-on exactement ? Les « pratiques de soins non conventionnelles » (PSNC) englobent joyeusement toute forme de médecine qui n'a pas été tamisée par le processus canadien de « l'Evidence-Based Medicine (EBM) », alias la médecine fondée sur les preuves, la « médecine conventionnelle ». Cette dernière se fonde essentiellement sur les données de la recherche (essais randomisés, études de cas, niveau de preuves...) afin de réduire autant que faire se peut la subjectivité du médecin. Autrement dit — c'est la critique principale qui est faite à ce modèle, l'art médical basé sur le rapport médecin-patient, ainsi que l'intelligence même du médecin, sont mis au ban au profit de la statistique pure issue de l'expérimentation. Aujourd'hui, c'est le modèle largement majoritaire en Occident.
À ceci, le ministère de la Santé ajoute que « les PSNC ont pour point commun qu'elles ne sont ni reconnues, au plan scientifique, par la médecine conventionnelle, ni enseignées au cours de la formation initiale des professionnels de santé. »
Ainsi, le rapport de l'Ordre liste les PSNC suivantes :
ACCESS BARS CONSCIOUSNESS ; ACUPUNCTURE ; APITHÉRAPIE ; AROMATHÉRAPIE ; AURICULOTHÉRAPIE ; BIOLOGIE TOTALE ; CHONDROPRAXIE ; CONSTELLATIONS FAMILIALES ; ÉTIOPATHIE ; FLEURS DE BACH ; GEMMOTHÉRAPIE ; GÉOPHAGIE ; HAPTONOMIE ; HOMEOPATHIE ; HYDROTHÉRAPIE DU CÔLON ; HYDROTOMIE PERCUTANÉE ; HYPNOSE ; IRIDOLOGIE ; JEUNE THÉRAPEUTIQUE ; KINÉSIOLOGIE ; LITHOTHÉRAPIE ; MÉDECINE ANTHROPOSOPHIQUE ; MÉDECINE HOLISTIQUE ; MÉDECINE QUANTIQUE ; NATUROPATHIE ; OSTEOPATHIE ; SYLVOTHÉRAPIE ; VENTOUSOTHÉRAPIE.Dans le lot, certaines sont très peu connues (constellations familiales ou fleurs de Bach), d'autres sont largement répandues (hypnose ou ostéopathie). Quoi qu'il en soit, l'Ordre des médecins considère qu'elles doivent être mieux définies, à commencer par le terme même de « médecine ». Le rapport préconise de modifier la loi pour que ce terme soit protégé, au même titre que celui de « médecin », afin que tout le monde ne puisse pas déclarer et pratiquer une activité de « médecine ».
Dans le même esprit, le rapport souligne que le terme de « Docteur » devrait obligatoirement être suivi de la science dans laquelle la thèse a été soutenue, afin qu'un docteur en droit ne puisse pas se présenter comme « Docteur exerçant la médecine chinoise », par exemple.
Du « bien-être » à la « dérive sectaire »
L'Ordre des médecins reconnait que « certaines PSNC sont intégrées depuis plusieurs années déjà dans certaines approches thérapeutiques », notamment en cancérologie. Néanmoins, le rapport limite leur rôle à de « l'empowerment » pour le patient, uniquement complémentaire d'un traitement spécifique et reconnu.
En résumé, « si dans de nombreux centres de prise en charge des cancers les soins de support ont trouvé leur place et améliorent la qualité de la vie des patients, il faut rappeler qu'ils ne soignent pas. » Ils sont donc relégués au « bien-être », tout en étant particulièrement dangereux. Et pour cause !
Le rapport distingue trois dérives entraînées par la pratique de ces médecines : l'exercice illégal, les dérives thérapeutiques et les dérives sectaires.
Si le premier point semble évident à déceler, puisqu'il repose sur les diplômes et droits du pratiquant, les deux autres reposent davantage sur la subjectivité du médecin et de son patient, ou de ceux qui les surveillent. Le rapport explique qu'une « PSNC devient dérive thérapeutique dès lors qu'elle met en danger les patients, parce qu'elle n'est pas validée scientifiquement et/ou qu'elle est proposée en remplacement de la médecine conventionnelle. » L'Ordre semble partir du principe que ladite PSNC est dangereuse car « non validée » ; il semble presque dérisoire de savoir si in fine, le traitement a soigné ou pas.
Ensuite, le rapport met en garde : « Dès lors que ces "thérapies" cherchent à faire adhérer le malade à un nouveau mode de pensée ou croyance, il faut se méfier, car l'endoctrinement arrive progressivement. » Et d'ajouter : « Aujourd'hui, la santé et le bien-être constituent le premier domaine de risque de dérives sectaires. »
Difficile de leur donner tort sur ce point, tant on s'est aperçu, lors de la crise sanitaire du Covid-19, à quel point la santé pouvait être un levier de peur et de coercition. Les premières doses de vaccin ont d'ailleurs été administrées alors que ces derniers bénéficiaient uniquement d'une autorisation de mise sur le marché conditionnelle, sans avoir achevé tous les tests habituellement nécessaires à « l'Evidence-Based Medicine ». Ceux qui les refusaient étaient ostracisés par la société. Est-il juste, alors, de parler de dérives thérapeutiques ou de dérives sectaires ? Pendant plus de deux ans, le corps médical lui-même s'est déchiré autour de ces questions. Des professeurs reconnus tels que le Pr Raoult, le Pr Perronne ou encore le Pr Trouillas, ont été incendiés par l'Ordre pour avoir cherché d'autres solutions et soigné avec des traitements précoces jugés inadaptés par la médecine conventionnelle.
Aujourd'hui encore, l'Ordre des médecins veut « protéger les patients » de ce qui n'est pas reconnu, proposant un certain nombre de mesures pour encadrer les PSNC.
Des informations et des formations
Pour contrôler le développement de ces PSNC et traiter les signalements, l'Ordre s'entoure de nombreuses institutions spécialisées, telles que MIVILUDES pour les dérives sectaires, la DGCCRF pour les fraudes ou la DRIEETS pour les formations.
Cette dernière sera par exemple chargée « d'intervenir en amont de l'enregistrement de la déclaration de formation », grâce à un guide établi par le Conseil national de l'Ordre des médecins. En plus d'éviter les « professionnels autoproclamés », l'objectif de cette intervention est présenté ainsi :
« Éviter que des professionnels, furent-ils médecins, ou autres professionnels de santé proposent l'enseignement de techniques thérapeutiques non validées scientifiquement, voire dangereuses pouvant parfois présenter un risque d'emprise. »Concernant les institutions, le CNOM préconise aussi de remettre en place le « Groupe d'Appui Technique » (GAT PSNC), qui était chargé de repérer et classifier les PSNC dangereuses ou prometteuses. Il avait été créé en 2009, et supprimé en 2015.
À l'inverse, le CNOM a alerté le gouvernement quant à l'existence « inquiétante » de « l'Agence des Médecines Complémentaires et Alternatives », créée en 2020 par Véronique SUISSA, Serge GUÉRIN et Philippe DENORMANDIE.
Par ailleurs, c'est un travail d'informations que le rapport décrit. D'abord, le CNOM prévoit de s'associer à MIVILUDES et la DRIEETS pour convaincre Pôle Emploi de revoir son Répertoire Opérationnel des Métiers et des Emplois (ROME). C'est au travers de ce dernier que l'institution présente chaque métier, ses conditions d'accès et d'exercice, les compétences requises, etc. On y trouve notamment une rubrique « Développement personnel et bien-être de la personne » qui dérange l'Ordre des médecins, en ce sens que les formations qui y sont contenues « ne reposent en fait sur aucune règlementation ».
De son côté, l'Ordre des médecins rédige d'ores et déjà des fiches concernant chacune des PSNC.
Enfin, le CNOM communique directement auprès du public, présentant par exemple une liste de questions qu'il faudrait se poser avant d'avoir recours au PSNC. Parmi elles : « Quelles sont les qualifications du professionnel que je vais consulter ? Est-il inscrit au registre partagé des professionnels de santé (RPPS) ? Si c'est un médecin, est-il inscrit au tableau de l'ordre des médecins ? Avec quelle qualification ? » ; « Ai-je recours à ce traitement en raison d'un échec d'une médecine conventionnelle ? Me demande-t-on d'arrêter mon traitement conventionnel ? » ; « Quels sont tous les risques liés à ce traitement ? »
En somme, un travail d'enquête qui n'est pas souvent préconisé pour un rendez-vous médical classique, pour lequel on s'appuie sur le principe de confiance médecin-patient. Deux poids, deux mesures.
En conclusion, les auteurs du texte assurent que « si chacun est libre d'envisager la prise en charge de sa santé et de son bien-être, ce libre choix doit être éclairé et exercé en connaissance de cause. » Encore faut-il avoir le choix, car ce rapport qui « n'est qu'un point d'étape », laisse entendre que l'offre des médecines « non conventionnelles » risque d'accuser le coup. Le cas échéant, le public n'aura guère d'autre choix que de se tourner à nouveau vers la pharmacopée occidentale, ses médicaments et ses vaccins.
j'ai vu un type passer de 75 % de la surface du corps couvert de psoriasis à 25 % en une seule nuit !