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Voilà qui devrait mettre à mal la stratégie de défense de Servier, dans l'affaire du Mediator. Deux témoignages, révélés ce mardi par «Libération» et «le Figaro», sont accablants pour le laboratoire.

Les interrogatoires réalisés par les magistrats cet été, qu'ont pu consulter les deux quotidiens, dévoilent que «Servier a falsifié les rapports d'experts pour mettre le Mediator sur le marché», selon «Libération». D'anciens collaborateurs des laboratoires auraient reconnu que le médicament était un coupe-faim et non un antidiabétique.

Des informations démenties ce matin par l'avocat des laboratoires Servier, sur Europe 1. Selon Hervé Témime, au contraire, «les laboratoires Servier n'ont pas trompé les autorités en masquant le fait que le Mediator est un coupe-faim, ce qu'il n'était pas». Et l'avocat d'insister : «Servier ne conteste pas les travaux qui ont été fait dans les années 1960 et à la fin des années 1960 sur cette molécule. Servier considère simplement qu'il n'y a pas eu de tromperie, il n'y a pas eu d'escroquerie, il n'y a pas eu d'obtention indue d'autorisation de mise sur le marché. C'est tout.»

Le Mediator, un «puissant anorexigène»

Le 6 juillet dernier à Toulouse, c'est l'un des découvreurs du Mediator en 1966, le pharmacologue Jacques Duhault, qui est entendu, d'après «le Figaro». Dans une étude de 1970, il démontrait que le médicament était un «puissant anorexigène». Et, dans un courriel envoyé à Servier, à la suite du rapport publié en janvier par l'IGAS (Inspection générale des affaires sociales), le pharmacien regrette que le laboratoire «n'ait pas arrêté le produit en 1999 au nom du principe de précaution».

Le diabète, «un domaine infiniment plus rentable pour les labos»

Autre audition, plus accablante encore, celle du Pr Jean Charpentier, le 28 juillet. C'est lui qui a rédigé les études afin d'obtenir l'autorisation de mise sur le marché du médicament, en 1973. Cet été, il a confié s'être «beaucoup étonné de voir le Mediator sortir comme antidiabétique car ça n'a rien à voir sur le plan expérimental, ni sur le plan clinique. C'est vrai, il diminue la faim». Et d'assurer : «Il n'y a pas de propriété pour le diabète mise en évidence à l'époque. Le choix du diabète s'explique car c'est un domaine infiniment plus rentable pour les labos.»

A aucun moment, les propriétés coupe-faim n'apparaissent pas dans le dossier de demande d'autorisation de mise sur le marché. «Libération» va même jusqu'à affirmer que Jean Charpentier «a expliqué sur procès-verbal que son travail avait été caviardé, voire falsifié, afin que le Mediator soit reconnu comme anti-diabétique».

Irène Frachon : une stratégie «diabolique»

Interrogée ce matin par Europe 1, le docteur Irène Frachon, la première à avoir tiré la sonnette d'alarme sur les dangers du Mediator, a estimé que ces révélations mettaient au jour une stratégie «diabolique». La pneumologue s'interroge également sur la possibilité que d'autres produits des laboratoires Servier soient concernés par «ces stratégies commerciales diaboliques de tromperie».

Les laboratoires Servier probablement mis en examen, selon Me Témime

Peu après, l'avocat des laboratoires Servier, Hervé Témime, a assuré sur la même antenne, que ses clients allaient être convoqués prochainement et probablement mis en examen. «Les laboratoires Servier vont être convoqués par les juges. Les laboratoires Servier vont peut-être, sans doute être mis en examen», a-t-il ainsi déclaré. «A cette occasion, le cours normal des choses va peut-être pouvoir exister. Parce qu'enfin, il faut peut-être que les laboratoires Servier soient mis en examen pour qu'ils soient présumés innocents.»