Traduction : violencealhopital

Dans le Journal de l' American Medical Association du 16 mai 2001 un panel d'experts du National Cholesterol Education Program a publié de nouvelles directives pour "la détection, l'évaluation et le traitement de l'hypercholestérolémie". Ce qu'ils écrivent semble être une tentative de mettre la plus grande partie du genre humain sous médicaments et régimes anti-cholestérol. Pour ce faire, ils ont augmenté le nombre de facteurs de risque qui exigent des mesures préventives, et élargi les limites de ces mesures.

Mais le panel n'exagère pas seulement le risque de maladie coronarienne et celui du cholestérol, il ignore également une foule d'éléments de preuve contradictoires. Les déclarations du groupe révèlent que ses membres ont peu d'expérience clinique et un manque de connaissances de base de la littérature médicale, ou pire, qu'ils ignorent ou déforment toutes les études qui sont contraires à leur point de vue.

Voici quelques exemples de fausses déclarations du groupe:

Comme un argument en faveur de l'utilisation de médicaments réduisant le cholestérol, le groupe affirme que 20% des patients atteints de maladie coronarienne ont une nouvelle crise cardiaque après dix ans. Mais pour atteindre ce nombre, tout symptôme mineur sans signification clinique est inclus.
La plupart des gens survivent même à une crise cardiaque majeure, beaucoup avec peu ou pas de symptômes après le rétablissement. Ce qui compte, c'est combien en meurent et c'est beaucoup moins de 20%.

Le panel d'experts recommande également les médicaments abaissant le cholestérol à tous les diabétiques au-dessus de 20 et aux personnes souffrant du syndrome métabolique. Si vous avez au moins trois des «facteurs de risque» mentionnés ci-dessous, vous êtes souffrant du syndrome métabolique:
Testez-vous ainsi que votre famille ! Je suppose qu'en utilisant ces limites, la plupart d'entre vous "souffrent" du syndrome métabolique. Et cette nouvelle combinaison de facteurs de risque, selon ces experts, exprime le même risque pour les maladies du cœur futures et pour les personnes ayant déjà une maladie coronarienne avérée.

Heureusement, ce n'est pas vrai.

Il n'est pas vrai non plus, que le taux de cholestérol a un fort pouvoir de prédiction du risque d'une crise cardiaque chez les hommes de plus de 65 ans. Durant les 30 années de suivi de la population de Framingham par exemple, un taux élevé de cholestérol n'a pas été prédicateur du tout après l'âge de quarante-sept ans, et ceux dont le taux de cholestérol a baissé avaient le plus de risques d'avoir une crise cardiaque ! Pour citer les auteurs de Framingham: « Pour chaque 1 mg / dl de baisse du cholestérol il y a eu une augmentation de 11% de la mortalité coronaire et totale » (115)"

Il n'est pas vrai non plus, que l'hypercholestérolémie est un prédicateur important et indépendant pour les autres personnes. Dans la plupart des études chez les femmes et les patients ayant déjà eu une attaque cardiaque, un taux élevé de cholestérol a peu de pouvoir de prédiction, voire aucun. Une vaste étude chez les hommes canadiens ayant un cholestérol élevé n'a pas permis de prédire une crise cardiaque, même après 12 ans, et en Russie, un taux de cholestérol élevé n'a pas non plus été associé à de futures crises cardiaques. (lisez le résumé de l'article)

La plupart des études ont montré qu'un taux de cholestérol élevé était un très faible facteur de risque ou ne l'était pas du tout chez les personnes âgées ; voir par exemple le document de Schatz et al., mais il y a beaucoup plus. Considérant que plus de 90% de l'ensemble des décès cardiovasculaires se produisent chez les personnes de plus de 60 ans, cet état de fait aurait dû stopper la campagne anti-cholestérol depuis des années.

Aussi intéressant est le fait que, chez certaines familles avec les taux de cholestérol les plus élevés jamais vus chez des êtres humains, la soi-disant "hyper-cholestérolémie familiale", les personnes n'ont pas de crises cardiaques plus souvent que les autres et ils vivent aussi longtemps. (lire l'article et mon commentaire).

L'ensemble de ces observations suggèrent fortement que l'hypercholestérolémie est seulement un marqueur de risque, un facteur qui est secondaire par rapport à la véritable cause de la maladie coronarienne. Il est aussi absurde d'abaisser le taux de cholestérol afin de prévenir une crise cardiaque que d'abaisser la température élevée du corps pour lutter contre une infection.

Il a également échappé à l'attention des experts que l'effet des nouveaux médicaments hypocholestérolémiants, les statines, va au-delà d'une baisse du cholestérol. La question est de savoir si leur effet de baisse du cholestérol n'a pas la moindre importance, parce que les statines exercent leur effet de la même manière, que le cholestérol diminue un peu ou fortement.

Pas de doute, les statines réduisent le risque de mourir d'une crise cardiaque, au moins chez les patients qui en ont déjà eu une, mais le résultat obtenu n'est pas significatif. Dans une des expériences, par exemple l'étude CARE, les chances d'échapper à la mort d'une crise cardiaque dans les cinq ans chez un patient atteint de maladie cardiaque a été de 94,3%, ce qui a été amélioré à 95,4% avec un traitement par statines.

Pour les personnes en bonne santé avec un taux de cholestérol élevé, l'effet est encore plus faible. L'étude WOSCOPS a étudié cette catégorie de personnes et cette fois les chiffres étaient de 98,4% et 98,8%, respectivement. (ndr: soit 4 /1000 ) Dans les articles scientifiques et dans les publicités des médicaments ces petites effets sont convertis en effet relatif. Dans l'étude WOSCOPS par exemple, il est mentionné que la mortalité a été réduite de 25%, parce que la différence entre un taux de mortalité de 1,6% dans le groupe contrôle et 1,2% dans le groupe de traitement est de 25%.

Face à des statistiques précises sur la valeur des statines, presque tous mes patients ont rejeté un tel traitement. Prétendre que les statines réduisent de façon spectaculaire le risque de maladie coronarienne, comme l'a déclaré dans la presse Claude Lenfant, le directeur du National Heart, Lung and Blood Institute, est un détournement de la langue anglaise. Les chiffres ci-dessus ne prennent pas en compte les effets secondaires possibles du traitement. Dans la plupart des expériences sur les animaux, les statines, ainsi que la plupart des médicaments abaissant le taux de cholestérol provoquent le cancer (90), et ils pourraient le faire chez les êtres humains également. Dans l'une des expériences sur les statines il y a eu 13 cas de cancer du sein dans le groupe traité par la pravastatine (Pravachol ®), mais un seul cas dans le groupe témoin non traité, un phénomène effrayant qui n'est jamais mentionné dans les publicités ou les directives de santé.

Il est également alarmant que, dans l'une des plus grandes expériences - l'étude EXCEL - la mortalité totale après seulement un an de traitement avec la lovastatine (Mevacor ®) a été significativement plus élevée chez ceux recevant ce traitement par statine. Malheureusement (ou heureusement), l'expérience a été interrompue avant que de nouvelles observations puissent être faites. Chez les êtres humains, les effets du cancer provoqués par les produits chimiques n'apparaissent pas avant plusieurs décennies.

Si les statines provoquent le cancer chez les êtres humains, leur faible effet positif peut éventuellement se transformer en un effet négatif beaucoup plus vaste, en raison des effets secondaires qui apparaissent habituellement dans des pourcentages beaucoup plus élevés que ces faibles effets positifs. Alors que de possibles effets secondaires graves liés aux statines sont hypothétiques, ceux du médicament anti-cholestérol précédent, toujours recommandé par les experts, sont réels. Si l'on considère l'ensemble de ces expériences, la mortalité cardiaque après le traitement avec ces médicaments demeure inchangée et la mortalité totale a augmenté, un élément qui a donné aux chercheurs extérieurs au National Cholesterol Education Program et l'American Heart Association beaucoup de souci. Les recommandations alimentaires du panel d'experts représentent le septième changement majeur depuis 1961. Par exemple, le conseil originel de l'American Heart Association de manger autant de gras polyinsaturés que possible a été réduit successivement à l'actuel "un maximum de dix pour cent".

Mais pourquoi cette limite ? Il y a sept ans, l'auteur principal des nouvelles lignes directrices, le professeur Scott Grundy, a proposé une limite supérieure de seulement 7%, parce que, comme il l'a fait valoir, un excès de graisses polyinsaturées est toxique pour le système immunitaire et stimule la croissance du cancer chez les animaux de laboratoire et peut aussi provoquer des calculs biliaires chez les êtres humains. Ces avertissements n'ont jamais atteint le public.

En outre, le groupe d'experts ne tient pas compte de ce qu'un récent examen systématique de toutes les études concernant le lien entre les graisses alimentaires et les maladies du cœur n'a trouvé aucune preuve que la gestion des graisses alimentaires ait un quelconque effet sur le développement de l'athérosclérose ou des maladies cardio-vasculaires ( lire le résumé de l'article - cet article a remporté le Prix Skrabanek en 1998).

Par exemple, dans un grand nombre d'études, dont celles comprenant le chiffre incroyable de plus de 150.000 personnes, aucune d'entre elles n'a trouvé le modèle prédit de régime alimentaire lipidique chez les patients atteints d'une maladie cardiaque. Aucune corrélation n'a été constatée entre le modèle de consommation de matières grasses et le degré d'athérosclérose (artériosclérose) après la mort.

Plus important encore, la mortalité par maladies cardiaques et toutes causes est demeurée inchangée lors de 9 expériences comprenant des changements plus radicaux de graisses alimentaires que ceux jamais proposés par le National Cholesterol Education Program, un résultat qui a été confirmé récemment dans une autre étude (lire l'article et mon commentaire).

Suggérer que les patients diabétiques devraient obtenir plus de 50% de leur apport calorique à partir de glucides semble un conseil particulièrement mauvais. Une grande quantité d'hydrate de carbone est rapidement transformée en sucre, induisant des changements rapides du sucre sanguin et des niveaux d'insuline, et stimulant par là-même une conversion rapide de sucre sanguin en dépôt de matières grasses et un sentiment de faim chronique. Les patients diabétiques devraient manger plus de matières grasses. Est-ce une coïncidence si la diminution de l'apport de matières grasses chez les Américains au cours de la dernière décennie a été suivie par une augmentation moyenne de leur poids corporel et une augmentation de l'épidémie de diabète ? Au lieu de prévenir les maladies cardio-vasculaires les nouvelles directives peuvent augmenter le taux de mortalité des autres maladies, transformer les individus en bonne santé en malheureux hypochondriaques obsédés par la composition chimique de leurs produits alimentaires et de leur sang, réduire les revenus des producteurs de matières grasses animales, nuire à l'art de la cuisine, détruire la joie de manger, et détourner l'argent des soins de santé des malades et des pauvres vers les personnes riches et en bonne santé. Les seuls gagnants sont les médicaments et l'industrie des aliments artificiels, et les chercheurs qu'ils financent.

Facteurs de risques Limites recommandées par les experts du NCEP
Obésité abdominale Tour de taille inférieur à 88 cm chez les femmes, à102 cm chez les hommes. Certains patients de petite taille peuvent développer de nombreux facteurs de risques avec un tour de taille de seulement 94 cm
High triglycerides 150 mg/dl ou plus
Cholestérol HDL Moins de 40 mg/dl chez les hommes, moins de 50 mg/dl chez les femmes
Hypertension Artérielle 130/85 ou plus haute
Taux de sucre maximum dans le sang 110 mg/dl ou plus haut