Une dépêche de l'agence Reuters émise en fin de matinée du 24 avril, nous apprend que M. Ziad Tiakeddine, homme d'affaire franco-libanais spécialiste de l'achat et la vente d'armes, a mis en cause le président de la République dans une déclaration à la presse, à son arrivée au pole financier du tribunal de Paris.

Plusieurs juges enquêtent depuis des mois sur l'existence d'éventuelles rétro-commissions versées par des intermédiaires dans l'affaire de la vente de sous-marins au Pakistan et de frégates à l'Arabie Saoudite. La suspension du versement de ces rétro-commissions sous l'ère Chirac aurait pu avoir pour conséquence la réalisation d'un attentat au Pakistan en 2002, au cours duquel le car qui transportait des coopérants Français avait été soufflé par une explosion entrainant la mort de onze d'entre eux. L'hypothèse actuellement étudiée par les magistrats est qu'une partie au moins de ces rétro-commissions, ayant transité par divers intermédiaires internationaux, aurait été réacheminée vers Paris en espèces pour financer la campagne de M. Edouard Balladur en 1995.

Selon Reuters, le résultat d'enquêtes à l'Etranger demandées par le juge R. van Ruymbeke, révèle que « des sommes soupçonnées provenir [de ces rétro-commissions] sont sorties d'un compte en Suisse d'Abdul Rahman Al Assir, ex-associé de Ziad Takieddine. L'argent est ensuite parti au Koweït, puis a été retiré en espèces, opération qui constituerait le blanchiment ». Au total, les sommes reversées au bénéfice de la campagne de M. Balladur en 1995 atteindraient 20 millions de Francs. Dans cette affaire, M. Nicolas Bazire, ex-directeur de campagne de M. Balladur et M. Thierry Gaubert, un proche de Nicolas Sarkozy, sont déjà mis en examen. Rappelons aussi que, selon un rapport de la police luxembourgeoise, l'actuel président de la République Française pourrait avoir contribué - es qualité de ministre du Budget de l'époque - à la création au Luxembourg de structures liées à ces manœuvres, ce que M. Sarkozy réfute.

Or, à son arrivée au pôle financier du tribunal de Paris, M. Tiakeddine a directement mis en cause M. Nicolas Sarkozy, n'hésitant pas, selon Reuters « à s'adresser aux électeurs pour leur demander de le chasser de l'Elysée ». Il a déclaré aux journalistes présents : « Je m'adresserai aux Français pour leur dire à qui ils vont avoir affaire s'ils ne font pas les choses qu'on leur offre de faire, (...) éradiquer ce système de corruption qui vous mène depuis quelques années, depuis 1995, et en tous cas fortifié aujourd'hui ». Evoquant « un système qui gère la France », il ajoute que celui-ci a à sa tête « quelqu'un qui s'appelle peut-être le président de la République ».

L'étau juridique se resserrant autour de l'actuel Président, on comprend mieux son désir absolu de réélection, qui lui confèrerait de droit une immunité aux poursuites qui pourraient être engagées contre lui. Tous les arguments, toutes les manœuvres politiques seront donc bonnes pour éviter que M. F. Hollande occupe le siège de Président de la République, ce qui peut expliquer l'hyper-droitisation du discours de M. N. Sarkozy. Ce dernier ne peut en effet gagner le second tour de la présidentielle que s'il « siphonne » au moins 80% des voix des électeurs ayant choisi M. M. Le Pen au premier tour. On peut donc s'attendre à une poursuite de campagne nauséabonde de la part de l'actuel occupant de l'Elysée, qui pourrait être, toujours selon Reuters « interrogé comme témoin par le juge Van Ruymbeke à partir de juin mais pas poursuivi, les faits relevant a priori de la Cour de justice de la République, seule compétente pour les anciens ministres ».