Envoyé spécial. Les participants à la marche d'hier dans Chicago contre l'Alliance atlantique ont trouvé refuge pendant les trois jours de leur contre-sommet à la « people's church ».

Le quartier général du contre-sommet et des multiples organisations, venues des États-Unis et du monde entier, qui ont participé hier à la grande manifestation anti-Otan dans les rues de Chicago, se situait dans une église. Sur Lawrence Avenue, cette « people's church » (église du peuple) a permis aux participants de trouver refuge, dans une ville en état de siège où l'administration avait multiplié les lieux et les rendez-vous interdits. Elle a fonctionné comme une ruche pendant trois jours. On y a échangé expériences et réflexions sur les moyens de faire grandir encore la mobilisation.

Tom Hayden, coordinateur états-unien du rassemblement, souligne pour l'Humanité la volonté affirmée de faire en sorte que l'Otan soit remise à sa place et « devienne une relique de l'histoire ». Il se félicite de la « qualité nouvelle » de la mobilisation, d'une plus grande convergence avec le mouvement social et l'irruption en son sein de nombreux syndicalistes. Les raisons de ce rapprochement sont simples. « Le Pentagone, dit-il, c'est un budget de 600 milliards de dollars et cela, on ne veut pas y toucher alors qu'on demande aux gens de se serrer la ceinture... »

Moments d'émotion à l'écoute de témoignages de ceux qui ont vu la guerre de très près, comme cet ancien combattant en Irak et en Afghanistan qui a décidé de rejoindre « l'association des vétérans contre la guerre » créée par plusieurs de ses camarades. « Nous sommes partis fin 2010, avec le déploiement envoyé par Obama qui affichait pour objectif de "gagner le cœur et les esprits des Afghans" », explique l'ex-soldat Alejandro Villatoro. L'opposition à la présence des troupes de l'Otan, il l'a ressentie « partout dans la population ». Et d'expliquer pourquoi il a décidé de participer à la marche d'hier dans Chicago : « Ce que nous faisons en Afghanistan n'a rien d'une guerre "humanitaire". C'est une guerre contre une population civile innocente. » Et Villatoro d'annoncer qu'il va rendre à l'armée les médailles reçues sur les champs de bataille où il a été affecté. « Parce que, dit-il sous les applaudissements, je n'ai rien fait de bien dans l'armée, rien. Je ne mérite pas ces décorations. »

Plusieurs militants de la paix français ont fait le voyage de Chicago. Dont Pierre Villard, le président du Mouvement de la paix (lire ci-contre), et Claire Chastain, responsable du PCF et co-initiatrice d'une coordination internationale (ICC) contre la guerre et l'Otan, lancée depuis le sommet de l'Alliance en 2009 à Strasbourg où, on s'en souvient, l'ex-président français, Nicolas Sarkozy, avait décidé le retour de la France dans le commandement intégré de l'organisation. « En trois ans, nous avons réussi à élargir notre audience à l'international, relève Claire Chastain, avec le souci permanent de montrer la convergence quasi intrinsèque des luttes sociales et de celles pour la paix. »