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© Image © KeystoneNotre alimentation est tellement aseptisée que nos muqueuses intestinales sont de moins en moins aptes à lutter contre les bactéries et les virus qui les attaquent, permettant aux maladies des voies digestives de se développer.
Notre environnement est trop stérile. Un excès d'hygiène qui favorise l'apparition de la maladie de Crohn et de colites ulcéreuses. Les enfants et les jeunes sont particulièrement touchés!

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On lui a enlevé 30 centimètres d'intestin et elle devra prendre des médicaments à vie. Comme l'ancienne Miss Suisse romande Marianne de Cocatrix, atteinte de la maladie de Crohn, qui vient de raconter son calvaire dans «Le Matin», de plus en plus de jeunes souffrent de maladies du tube digestif.

L'explication? «Nous vivons dans un environnement trop stérile!» Venant d'un médecin, le constat surprend. Pourtant, Andreas Nydegger l'observe de plus en plus souvent dans sa pratique de la pédiatrie. «Dans les pays développés comme le nôtre, nous remarquons une augmentation des maladies inflammatoires du tube digestif, alors qu'en Afrique, par exemple, ces pathologies sont quasi inexistantes. Chez nous, cela concerne désormais 10 à 20 personnes sur 100 000, et dans près de 25% des nouveaux cas des enfants, avec un pic enregistré entre 11 et 12 ans. Notre alimentation est tellement aseptisée que les muqueuses intestinales des personnes touchées ne sont plus en mesure de lutter contre les bactéries et les virus qui les attaquent, permettant ainsi à ces maladies de se développer», explique ce membre de l'Unité de gastro-entérologie pédiatrique du CHUV.

Andreas Nydegger prend donc en compte l'environnement direct de la personne, mais aussi un éventuel déséquilibre au sein de la flore intestinale ou des facteurs génétiques - les deux autres causes possibles - au moment de diagnostiquer une maladie de Crohn ou une colite ulcéreuse. Car le terme «maladies digestives» désigne ces deux pathologies. La première occasionne des douleurs abdominales, des pertes pondérales, des pics de fièvre et un manque d'appétit. La seconde provoque des faux besoins (des envies d'aller à la selle qui ne peuvent être concrétisées), du sang dans les selles, des maux de ventre et une perte de poids. Toutes deux peuvent également conduire à des lésions oculaires (comme l'épisclérite, une inflammation du blanc de l'œil), de peau (abcès) ou encore de l'arthrite. Et une fois présentes, ces deux maladies restent à vie et demandent habituellement un traitement d'entretien constant. «Une rechute ou une réapparition des symptômes est possible en tout temps, à des degrés de sévérité variables: à un stade bénin, on en est quitte avec des anti-inflammatoires ou des lavements (à base d'anti-inflammatoires ou de stéroïdes). Chez les patients plus sévèrement atteints, on est notamment contraint d'utiliser des stéroïdes ou des immunosuppresseurs. Et dans les cas extrêmes, par exemple lors d'une perforation du tube digestif, de son rétrécissement ou d'une grave inflammation, une intervention chirurgicale est même nécessaire», souligne le spécialiste.

Si ces maladies ne sont pas forcément plus virulentes chez les ados, elles interviennent en revanche à un moment périlleux. Andreas Nydegger: «Les enfants sont soumis à une forte poussée de croissance, et ont besoin de beaucoup de calories pour produire de nouveaux tissus. Ces pathologies sont problématiques, car elles induisent précisément une grande consommation de calories et un manque d'appétit. Si la prise en charge ne s'effectue pas suffisamment tôt, les jeunes patients risquent de ne pas atteindre une taille normale.»

Peut-on s'en prémunir? «Il est difficile de changer notre manière de vivre et de consommer, remarque le médecin. On a cependant observé que moins le système immunitaire d'un individu est stimulé, plus le risque de contracter ces maladies est grand. Avoir une seule toilette par famille peut donc contribuer à les éviter, tout comme le fait de ne pas être enfant unique! Mais on est encore qu'au début de la découverte des causes de ces maladies. S'agissant de personnes déjà atteintes, des études ont notamment montré que l'huile de poisson pourrait avoir un effet bénéfique sur les colites ulcéreuses. Concernant une partie des personnes touchées par la maladie de Crohn, d'autres recherches recommandent une diminution des produits laitiers, des fibres et des cigarettes. Cependant, il n'existe pour l'heure pas de recette claire. Dans le futur, la solution passera par l'isolation des causes qui peuvent provoquer des poussées de ces maladies.» En attendant, il convient d'être attentif aux symptômes, afin que le traitement puisse être prodigué dans les plus brefs délais...