Une marée humaine de plus d'un million de personnes a envahi jeudi les rues du Brésil, à l'appel des réseaux sociaux, avec quelque 300 000 manifestants dans la seule ville de Rio de Janeiro. Les manifestations ont dégénéré dans de nombreuses villes, faisant un mort accidentel et des dizaines de blessés.

Confrontée au plus vaste mouvement de protestation depuis 21 ans au Brésil, la présidente Dilma Rousseff a annulé une visite d'Etat au Japon, prévue du 26 au 28 juin. Elle a convoqué une réunion de crise avec ses ministres les plus proches, qui doit se tenir ce vendredi à 9h30 (14h30 heure française). Le ministre de la Justice, Eduardo Cardoso, participera notamment à la réunion, selon le site du quotidien brésilien la Folha, assurant que les autorités de Brasilia ont été «effrayées» et «choquées» par l'attaque du ministère des Affaires étrangères dans la soirée de jeudi par un groupe de manifestants, repoussée de justesse par la police. Selon la Folha, les participants évalueront la situation, les slogans et revendications des manifestants, ainsi que l'opportunité d'une adresse radiotélévisée de Mme Rousseff à un pays en révolte.
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Au moins un million de manifestants sont descendus jeudi dans les rues des grandes villes du Brésil au dixième jour de fronde sociale marqué par de violents affrontements avec la police, des dizaines de blessés et un premier mort. | Evaristo Sa
A Ribeiro Preto, dans l'Etat de Sao Paulo (sud-est), un manifestant de 18 ans est mort renversé par une voiture, a annoncé la police. D'après la presse locale, le véhicule a tenté de contourner un groupe de manifestants qui bloquaient une rue et a renversé trois personnes, dont la victime.

A Rio de Janeiro, au moins 62 blessés. Après un début de marche pacifique, des heurts violents ont éclaté devant la mairie de la ville entre un groupe de manifestants et la police qui a tiré des gaz lacrymogènes et des balles en caoutchouc. Au moins 62 personnes ont été blessées dont un journaliste de la TV Globo, touché au front par une balle en caoutchouc. Des manifestants ont brisé des vitrines, pillé au moins un magasin d'électroménagers et une grande confusion a régné tout la soirée. Une foule immense avait pourtant commencé à défiler joyeusement dans le centre administratif et commercial, aux cris de : «Le Brésil s'est arrêté ! Le Brésil s'est arrêté !» Les employés jetaient par les fenêtres de leurs buildings des pluies de confettis sur les manifestants et faisaient clignoter les lumières de leur bureau en signe de solidarité. «Nous sortons de Facebook !» proclamait une pancarte. «J'ai voté Dilma et je revoterai Dilma. Mais c'est un moment unique, on en a besoin pour accélérer les réformes du pays», a confié Ney, un ingénieur de 64 ans, à une journaliste.

A Brasilia, le ministère des Affaires étrangères préservé de justesse. Dans la capitale située dans le centre du pays, des manifestants ont attaqué le ministère des Affaires étrangères d'où ils ont été refoulés de justesse par la police. Un groupe de manifestants a réussi à briser une des portes vitrées d'entrée du bâtiment officiel et a été empêché in extremis d'y pénétrer par la police. 55 fenêtres ont été brisées ainsi qu'un vitrail de la cathédrale contrsuite par Oscar Niemeyer. 35 manifestants ont été blessés dont trois gravement.
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(Twitter). Des manifestants poussent des policiers vers la mer.
A Vitoria (sud-est), un groupe de manifestants a détruit les cabines de péage d'un pont qui relie la ville à sa voisine. Devant le tribunal de Justice, les forces de l'ordre ont dû intervenir avec des gaz lacrymogènes pour disperser un groupe radical.

A Salvador de Bahia, théâtre de la première manifestation dans l'après-midi, des affrontements violents ont également éclaté entre un partie des 20 000 manifestants et les policiers. Les manifestants ont incendié un bus et tiré des jets de pierres sur des minibus de la Fifa, organisatrice de la Coupe des Confédérations qui se dispute actuellement dans le pays et du Mondial dans un an.
Au moins un manifestant a été blessé par une balle en caoutchouc. Un policier a également été blessé lors de ces incidents survenus à deux kilomètres du stade où se jouait le match Nigeria-Uruguay de la Coupe des Confédérations.

Belem (nord) a connu des affrontements entre policiers et manifestants
refoulés par des gaz lacrymogènes, tout comme Campinas (Etat de Sao Paulo), où des manifestants ont lancé des pierres et cassé des vitres de la mairie. La garde municipale a réagi avec des gaz lacrymogènes et des sprays au poivre. Au moins sept personnes ont été blessées dont deux gardes et un journaliste. Des affrontements police-manifestants ont également eu lieu à Porto Alegre (sud), berceau du Forum social mondial anti-Davos.