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La Cour constitutionnelle moldave a décidé que seule l'idéologie proeuropéenne était légale en politique étrangère, écrit mercredi le quotidien Kommersant.

Une décision prise en marge de celle sur la constitutionnalité de l'accord d'association entre la république moldave et l'UE. La cour a ainsi proclamé "a priori anticonstitutionnelles" toutes les autres orientations idéologiques, à la veille d'élections législatives perçues comme un référendum sur l'orientation de la politique étrangère du pays. Après cette décision de la Cour constitutionnelle, la Moldavie pourrait simplement ne plus avoir le choix.

C'est lundi, après la publication du verdict sur le site officiel de la Cour consitutionnelle, que son caractère scandaleux a été mis au jour: "Le processus d'intégration européenne de la République moldave correspond à l'identité constitutionnelle de la République moldave et toute orientation contraire est a priori anticonstitutionnelle".

La Cour a de facto établi l'intégration européenne comme l'idéologie étatique officielle, tout en proclamant l'intégration eurasiatique comme anticonstitutionnelle - sachant que la société moldave est divisée en deux camps presque égaux en ce qui concerne la politique étrangère. La question est d'autant plus pertinente en prévision des législatives moldaves du 30 novembre, qui devraient plus ressembler à un référendum sur la politique étrangère du pays. Les partis au pouvoir mènent une campagne à l'aide de slogans sur l'intégration européenne, alors que l'opposition de gauche promet de tourner le pays vers la Russie.

Après cette décision de la Cour constitutionnelle, la Moldavie pourrait ne plus avoir le choix et les partis prônant une orientation politique prorusse, proclamée anticonstitutionnelle, risquent d'être disqualifiés. "Si vous vous opposez à l'accord d'association et, qui plus est, êtes favorable à l'Union douanière, alors vous êtes déjà hors la loi!", s'indigne un candidat du parti d'opposition, Patria Grigori Petrenko.

L'ancien juge de la Cour constitutionnelle Viktor Pouchkach est également surpris par la formulation de cette décision. "Sur la constitutionnalité de l'accord d'association, la décision de la Cour est correcte. Mais conformément à la Constitution, la souveraineté de l'Etat appartient à la population. Et seule la population peut choisir la ligne de sa politique étrangère par référendum", a-t-il déclaré. La sortie du cadre constitutionnel de tout concept de politique étrangère autre que l'intégration européenne enfreint l'article 5 de la Constitution affirmant le principe de pluralisme politique en disant très clairement: "Aucune idéologie ne peut être établie comme étant l'idéologie étatique officielle". "L'époque des idéologies étatiques est révolue", affirme l'ancien juge.

Ce dernier rappelle également d'autres décisions scandaleuses de la Cour constitutionnelle. En décembre 2013, elle avait proclamé le roumain comme langue nationale, tout en sachant que dans la Constitution elle était mentionnée comme moldave et que la société était divisée à ce sujet.

Il est pratiquement impossible de contester les décisions de l'instance constitutionnelle moldave: elles sont définitives et sans appel. Les politiciens et les experts estiment que le sort du pays s'est retrouvé entre les mains de six individus, qui ne peuvent pas être remplacés et possèdent une totale immunité. Selon Viktor Pouchkach, le seul moyen de changer la décision de la Cour consiste à changer la Constitution elle-même, mais il n'y pas la majorité suffisante pour cela au parlement.