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Le Dakota du Nord aura été l'un des premiers Etats américain à développer à grande échelle l'exploitation du pétrole de schiste par fracturation hydraulique. Il est en passe de s'imposer comme pionnier dans un autre domaine, tout aussi controversé : la mise à disposition de drones armés pour ses policiers.

Le Daily Beast rapporte comment un projet de loi soumis à l'assemblée législative de cet État du nord des États-Unis, frontalier du Canada, a été habilement détourné de son objet par un lobby pro-police. A l'origine, la loi 1328 élaborée par le représentant républicain Rick Becker se proposait d'encadrer le recours aux drones en imposant notamment que leur utilisation dans le cadre d'une opération de police soit suspendue à la délivrance d'un mandat par le juge. Le texte précisait aussi qu'il était interdit d'équiper lesdits drones d'un dispositif armé.

Or, après une efficace intervention du North Dakota Peace Officer's Association (NPDOA), qui entend défendre les intérêts moraux des policiers, l'interdiction d'armer les drones s'est retrouvée circonscrite aux armes létales. Dès lors, ils pourront transporter dans les airs Tasers, diffuseurs de gaz poivré ou encore tirer des balles en caoutchouc, voire utiliser des canons assourdissants... Ce virage sur l'aile n'a pas convaincu l'élu républicain ("Selon moi, il devrait y avoir une belle ligne rouge : les drones ne devraient pas être armés. Point barre", a-t-il fait savoir), qui a dû toutefois admettre qu'il lui fallait "vivre avec".

Du côté de ceux qui ont contribué à faire adopter cette loi, on tente d'en relativiser la portée. Un représentant du NPDOA a indiqué au site Quartz que l'armement de drones n'était envisagé que dans le cadre de "développements futurs", tributaires de l'évolution de la technologie. Cette brèche juridique fait quand même tousser beaucoup de monde aux États-Unis, où les récentes bavures ont relancé le débat sur la militarisation des forces de police. Depuis le début de l'année, estime The Guardian, les tirs de Taser ont provoqué la mort de 39 personnes dans le pays. Plus largement, entre 2001 et 2013, les armes dites "non-létales" ont été à l'origine du décès de plus de 500 personnes.

En pleine effervescence, au point d'avoir été comparée à un "Far West juridique", l'élaboration d'une réglementation relative aux drones souffle le chaud et le froid. Pendant que la Dakota du Nord autorise l'armement des multicoptères de ses policiers, l'Etat de Californie vient tout juste d'adopter un texte qui interdit aux drones de voler à une altitude inférieure à 350 pieds (106 mètres) au-dessus d'une propriété. Une contrainte instaurée pour des impératifs de protection de la vie privée qui risque de couper les ailes à la plupart des usages de loisirs, mais aussi commerciaux, aux États-Unis.