sugar
Parce que la nourriture peut activer le centre du plaisir, comme le fait l'alcool ou la cocaïne, l'idée que le sucre pourrait être une drogue a fait son chemin. Une étude de 2008, devenue célèbre, avait même montré que les rats préferaient l'eau sucrée à la cocaïne. Cependant, d'après deux méta-analyses récentes (1, 2) le sucre ne serait pas rigoureusement comparable à une drogue car son potentiel "addictif" serait dû à son bon goût et non pas à ses effets neurochimiques en tant que tels (induisant un manque). D'après ces chercheurs, comme tous les autres aliments appétents, les aliments riches en sucre stimulent la libération de dopamine dans le cerveau, l'effet addictif ne serait donc pas spécifique au sucre. Néanmoins, ce point de vue n'est pas partagé par tous les chercheurs à l'instar de Serge Ahmed (CNRS, Paris) pour qui le fructose peut avoir des effets similaires à ceux des drogues (3). Sans mentionner le fait que les drogues "dures" ne provoqueraient pas systématiquement des symptômes de manque et de sevrage, l'environnement psychologique ayant également une part très importante dans l'apparition des addictions (4).

Cette nouvelle étude publiée dans le journal Diabetes confirme que le débat autour du potentiel addictif du sucre n'est pas terminé. Selon ses résultats, le glucose et le fructose, mais surtout ce dernier, auraient chez les obèses des effets semblables à ceux des drogues (5). Pour rappel, le saccharose, le sucre de table, est constitué d'une molécule de fructose et de glucose. Le fructose se trouve naturellement dans les fruits (d'où son nom) tandis que si le glucose libre est rare dans la nature, il est en revanche présent dans les produits transformés, souvent sous forme de sirop glucose-fructose, aussi appelé isoglucose.

Les chercheurs ont observé par IRM les effets sur le cerveau de 14 adolescents minces et 24 adolescents obèses de l'ingestion de glucose ou de fructose (pendant et après). Chez tous les adolescents, le fructose (constituant du sucre) stimulait l'activation du striatum ventral, encore appelé centre de la motivation. Cet effet n'a pas été observé avec le glucose.

Chez les adolescents minces, le glucose et le fructose activaient le cortex préfontal, impliqué dans le contrôle de soi mais sans agir sur la partie du cerveau qui gère l'appétit, située dans l'hypothalamus. Dans le même temps, le taux de ghréline (hormone de la faim) diminuait rapidement. En revanche, chez les adolescents obèses, le glucose et le fructose inhibaient le cortex préfrontal, et augmentaient l'activité des centres du plaisir ou de la récompense. De plus, le taux de ghréline diminuait plus lentement, ce qui était associé à une activation du thalamus, hypothalamus, et de l'hippocampe.

Ces résultats montrent que les adolescents obèses présentent des réactions métaboliques et cérébrales anormales après ingestion de glucose et de fructose. Selon les auteurs, ces réactions anormales seraient dues à leur sur-consommation chronique de glucose et de fructose. Mais cette sensibilité au sucre est-elle due à l'obésité en tant que telle ou à la surconsommation de sucre ?

En regardant les études, on s'aperçoit que de nombreuses études rapportent que la surconsommation de sucre est l'une des causes majeures de l'augmentation de l'obésité dans le monde, dont une étude récente faite dans 170 pays (6).

De plus, une étude publiée en 2016 (7) rapporte que la consommation régulière et abondante de sucre, provoquerait petit à petit une diminution des récepteurs à la dopamine de la même manière analogue à l'exposition aux drogues. Ce qui causerait ensuite des symptômes de manque ou encore une dépression.

Pris ensemble, ces résultats confirment que la surconsommation de sucre est néfaste, elle ferait grossir petit à petit et rendrait "accro" au sucre, ce qui créerait un cercle vicieux conduisant à l'obésité.

L'OMS recommande actuellement de ne pas manger plus de 50 g de sucres ajoutés par jour, mais souhaite baisser cette limite à 25 g. C'est l'équivalent de la quantité de sucre contenue dans un verre de coca de 220 mL (25 g). En comparaison, il faut savoir que les Français consomment près de 94 g de sucres totaux par jour en moyenne, ce qui est donc bien au-delà des recommandations.
L'avis de LaNutrition.fr : Cette étude confirme que la surconsommation de sucre peut induire une forme de dépendance chez certaines personnes. De plus, la surconsommation de sucre aurait également des effets néfastes sur la mémoire, le moral, le risque de diabète (foie gras), et peut-être même sur certains cancers. Cependant, le sucre n'est pas le seul aliment à avoir un potentiel addictif, la junk food et les aliments très riches en goût (riches en composés de Maillard, en gras, en sel, en glutamate, etc.) aussi, ainsi que les boissons light.
RÉFÉRENCES :

(1) Westwater ML, Fletcher PC, Ziauddeen H. "Sugar addiction: the state of the science." Eur J Nutr. 2016 Jul 2.

(2) Benton D. "The plausibility of sugar addiction and its role in obesity and eating disorders."Clin Nutr. 2010 Jun;29(3):288-303. doi: 10.1016/j.clnu.2009.12.001. Epub 2009 Dec 28.

(3) Ahmed SH, Guillem K, Vandaele Y. "Sugar addiction: pushing the drug-sugar analogy to the limit."Curr Opin Clin Nutr Metab Care. 2013 Jul;16(4):434-9. doi: 10.1097/MCO.0b013e328361c8b8.

(4) https://www.ted.com/talks/johann_hari_everything_you_think_you_know_about_addiction_is_wrong/transcript

(5) Jastreboff AM, Sinha R, Arora J, et al. "Altered brain response to drinking glucose and fructose in obese adolescents. "Diabetes 2016;65:1929 - 1939.

(6) http://www.medicalnewstoday.com/articles/312080.php

(7) http://www.independent.co.uk/news/science/sugar-has-similar-effect-on-brain-as-cocaine-a6980336.html