Turkish army in Afghanistan
Comme nous l'avons annoncé ici, la base d'Inçirlik demeure encerclée depuis le putsch militaire raté contre le président Erdogan: plus de 7000 éléments d'élite de la police turque, dotés de véhicules blindés, de missiles antiaériens portatifs et de systèmes antichars assiègent la base aérienne d'Inçirlik (Adana) en Turquie méridionale.

Cette base stratégique utilisée par les États-Unis et leurs alliés de l'Alliance Atlantique dont la Turquie est un État membre joue un rôle de premier plan dans les opérations militaires de l'empire au Levant et l'ensemble du Moyen-Orient. Mais ce n'est pas tout: la base abrite près d'une centaine (estimations variant entre 60 et 95 unités) d'armes nucléaires tactiques d'une puissance évaluée par des analystes turcs à une douzaine de mégatonnes.

Des sources turques évoquent un incident qualifié d'assez sérieux intervenu une semaine auparavant aux alentours de la base lorsque des commandos non identifiés ont tenté de briser le siège de la police turque. Un double incendie de diversion suivi par un très intense échange de tirs ont abouti à un statu quo assez inquiétant.

Des snipers turcs positionnés à l'extérieur de la base recourent depuis jeudi à des tirs sporadiques de provocation. L'un de ces tirs de précision (utilisant un calibre 12.7 mm) aurait atteint le secteur utilisé par les militaires US, faisant monter d'un cran supplémentaire l'extrême tension prévalant désormais entre Ankara et Washington.

Ce qui est rapporté ci-dessus se passe dans un pays de l'Otan où est entreposé une impressionnante force de frappe nucléaire.

Ironie du sort, ces événements signent de façon irrévocable la fin de l'Otan, quelques jours à peine après son dernier Sommet de Varsovie, lequel s'est révélé de très mauvaise augure.

Il demeure totalement invraisemblable que les partisans du président Erdogan puissent convoiter les armes nucléaires à Inçirlik comme le laissent entendre certaines rumeurs folles en Turquie (colportées entre autres par la mafia, le PKK et ...Daech!) Cependant une chose est certaine: Erdogan semble être résolu à quitter l'Otan. C'est du moins ce qu'affirment ses partisans les plus proches. Reste à savoir quand et comment. Un véritable casse-tête technique, juridique et politique.

Dans les faits, la Turquie pourrait très bien demeurer au sein de l'Otan tout en se considérant en dehors de cette alliance. Or tous les échos en provenance de Turquie renforcent cette idée.

Nous sommes donc face à une Turquie nouvelle, en rupture totale avec celle ayant existé de 1924 à 2015. Les dirigeants de l'Union Européenne se sont tellement auto-intoxiqués en tentant se persuader que le putsch n'était qu'une énième machination d'Erdogan (ce qui est non seulement erroné mais non dénué d'une certaine perfidie) qu'ils ont oublié l'essentiel: un pays hautement stratégique à cheval entre l'Occident et l'Orient, entre le Nord et le Sud, ayant joué un rôle primordial dans la stratégie occidentale durant la guerre froide et bien au delà, est en train d'être perdu. Cela a un nom: c'est un désastre stratégique complet.

Finalement, ceux qui ont confectionné les révolutions de couleurs et autres ingénieries du chaos (dans le monde musulman et sur les marches historique de la Russie notamment) se sont révélés non seulement de bien piètres stratèges mais totalement à côté de l'histoire...

C'est une leçon d'histoire. Une autre.