Encombrée par un passé traumatisant, Marie, jolie Allemande d'une vingtaine d'années, débarque un jour à Tokyo. Elle y rejoint Moshe Cohen, le fondateur de "Clowns sans frontières". Ensemble, ils se rendent à Fukushima pour tenter de dérider les quelques habitants, âgés, qui ont décidé de rester sur place après le tsunami et la catastrophe nucléaire de mars 2011.
film
© Inconnu
Face à cette population désarmée, son compteur Geiger à la main, la jeune femme se demande ce qu'elle fait là. Un jour, alors qu'elle conduit une vieille dame dans la zone contaminée, elle décide de rester. Dernière geisha de Fukushima, Satomi a en effet décidé de revenir vivre chez elle. Dans les décombres, la Japonaise et sa protégée vont apprendre à s'apprivoiser, à retrouver le goût à la vie.

L'Allemande Doris Dörrie connaît bien le Japon, où elle a tourné son plus grand succès international, "Cherry Blossom" en 2008. Touchée par la catastrophe de Fukushima, elle a eu envie de retrouver le Pays du Soleil Levant pour un film douloureux, qui explore des thèmes qui lui sont chers, comme le deuil et la capacité à le surmonter.

Tourné en noir et blanc, avec peu de dialogues (Marie et Satomi communiquent entre elles dans un anglais de cuisine), "Fukushima mon amour" raconte sobrement le retour à la vie après le drame. Dörrie filme avec beaucoup de pudeur la zone dévastée de Fukushima, les immeubles délabrés mais aussi les centaines de milliers de sacs de terre contaminée entassés, futile tentative d'effacer les traces de l'apocalypse nucléaire. Mais ce n'est pas le passé qui intéresse Dörrie : "Fukushima mon amour" est tourné vers l'avenir, veut imaginer la vie après la catastrophe.

Porté par un rythme langoureux, d'une grande économie scénaristique, "Fukushima mon amour" parvient à se mettre au diapason de la culture nipponne. De quoi déconcerter un public non averti, certes, mais aussi permettre à l'Allemande de ne pas sonner faux, de ne pas imposer son point de vue occidental sur la réalité qu'elle filme. Même quand il s'agit de mettre en scène les rêves ou l'apparition des esprits de celles et ceux qui n'ont pas survécu au tsunami.

Avec une grande retenue, "Fukushima mon amour" réussit en tout cas à transcrire à l'écran la passion de son auteure pour le Japon, pour sa beauté, ses mystères et ses contradictions.