Jarry, un chef d'Etat, est abattu au cours d'une visite officielle, alors qu'il circulait dans une voiture décapotable. Son assassin, Karl Eric Daslow, est retrouvé mort dans l'ascenseur de l'immeuble d'où il a tiré. Après une année d'investigations, l'hypothèse du tueur psychopathe et isolé semble s'imposer.
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© InconnuI comme Icare
Cependant, l'un des membres de la commission d'enquête, le procureur Volney, refuse de se rallier à la version officielle et décide de poursuivre seul l'enquête, avec l'aide de ses assistants. Or, au fur et à mesure que ses investigations avancent, les témoins du crime meurent tous les uns après les autres, dans de troublantes circonstances...


La décennie 70 fut l'Age d'or du grand cinéma politique. Aux Etats Unis bien sur avec Coppola et Cérémonie secrète, Les hommes du président de Pakula, certains Sidney Pollack, Marathon Man ... En Italie avec Rosi et d'autres. Et en France nous ne fumes pas en reste. Costa Gavras, Yves Boisset, Mort d'un pourri de Georges Lautner avec Delon - à redécouvrir ! -. Et cet I comme Icare datant de 1979 et signé par Henri Verneuil, que la mémoire du cinéma retient comme un bon faiseur sans plus. Qui avec ce film puis le suivant, Mille milliards de dollars, dénonçant en 1981 le totalitarisme capitaliste, frappe extrêmement fort.

Parabole de l'assassinat de JFK située dans un pays imaginaire - et tournée à Cergy Pontoise, dans un no man's land fait de tours grises -, I comme Icare reconstruit l'enquête minutieuse d'un juge qui à partir d'une version officielle pleine d'incohérences parvient à rassembler pièce par pièce la vérité sur un assassinat. Et ainsi flirte dangereusement avec la ligne jaune des hommes de l'ombre.

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© InconnuI comme Icare
Tout est manipulé, tout est faux, tout est complot. L'état nous ment et ses services secrets sont à l'affut, ils espionnent le juge interprété magistralement par un Yves Montant au sommet de son art. Plus l'enquête avance et plus forte est la tension, les témoins disparaissent, les bureaux sont visités, les téléphones sont placés sur écoutes. Divulguer la véritable version des faits consiste à faire tomber un Etat tout entier. Alors paranoïa de rigueur, chacun surveille son ombre et tente d'effacer les traces.

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© InconnuI comme Icare
Vers la moitié du film, une séquence en apparence déconnectée de l'enquête pure, la meilleure, la plus inoubliable. Celle qui en laboratoire reconstitue la fameuse expérience de Milgram. Celle qui explique le mieux du monde le comportement du citoyen lambda face à une autorité posée comme telle. Et avec lui les techniques de manipulation de nos gouvernants. Le rapport à une autorité respectée et reconnue en tant que telle implique une obéissance aveugle et absolue, jusqu'à outrepasser et oublier sa propre éthique. J'exécute parce que les ordres de l'autorité l'exigent. Je fais et donc je crois ce qu'on me dit parce que si jamais je m'y refuse tout mon petit monde s'écroule. Le débat intérieur - mon éthique contre ma capacité à rester dans les clous - est littéralement exposé et justifie de part le consentement du lâche citoyen tous les abus de l'autorité à laquelle il s'est donné. La manipulation connaît là son socle, celui du Meilleur des Mondes et de 1984. Les citoyens sont par leur passive obéissance devenus les zélateurs de leurs bourreaux. De fait, le combat du preux chevalier ne peut qu'échouer.