L'Arménie et l'Azerbaïdjan étaient au bord de la guerre, dimanche 27 septembre, des combats meurtriers ayant éclaté entre les forces azerbaïdjanaises et la région séparatiste du Nagorny-Karabakh, soutenue par Erevan.
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Les belligérants ont fait état de victimes militaires et civiles. Selon la partie arménienne, une femme et un enfant ont été tués. L'Azerbaïdjan affirme avoir conquis une demi-douzaine de villages sous contrôle arménien.

Un conflit majeur impliquant l'Azerbaïdjan et l'Arménie pourrait entraîner l'intervention des puissances en concurrence dans la région du Caucase, la Russie et la Turquie. Le conflit autour du Nagorny-Karabakh, peuplée majoritairement d'Arméniens et qui a fait sécession de l'Azerbaïdjan avec le soutien arménien, nourrit les tensions régionales depuis trente ans.

Après l'annonce des premiers combats dimanche matin, le premier ministre arménien, Nikol Pachinian, a décrété « la mobilisation générale » et l'instauration de « la loi martiale », tout comme les autorités du Karabakh. « Soutenons fermement notre Etat, notre armée (...) et nous allons vaincre. Longue vie à la glorieuse armée arménienne ! », a-t-il écrit sur Facebook.

Si des victimes ont été annoncées par les deux parties, aucun bilan chiffré n'a été avancé. Le ministère de la défense du Karabakh a annoncé que l'armée de la région avait détruit quatre hélicoptères, quinze drones et dix tanks d'Azerbaïdjan au cours des heurts qui sont montés d'un cran dimanche matin. L'Azerbaïdjan avait auparavant fait savoir qu'un de ses hélicoptères avait été abattu mais que son équipage était sain et sauf. Il affirme avoir détruit douze batteries antiaériennes.

Moscou a appelé dès dimanche matin « à un cessez-le-feu immédiat » et à des pourparlers, alors que les deux camps se rejettent la responsabilité des hostilités. Le Kremlin, qui se positionne en arbitre régional, livre des armes aux deux pays.

La France, médiatrice du conflit avec la Russie et les Etats-Unis dans le cadre du Groupe de Minsk, a aussi appelé à « cesser immédiatement les hostilités ». Dans un communiqué du ministère des affaires étrangères, la France s'est dite « vivement préoccupée par les affrontements d'ampleur en cours au Haut-Karabakh », appelant les belligérants à « reprendre le dialogue ». Paris, « avec ses partenaires russe et américain, réitère son engagement en vue de parvenir à un règlement négocié et durable du conflit » dans cette région, « dans le respect du droit international ».

Le président du Conseil européen, institution représentant les Etats membres de l'UE, Charles Michel, a appelé à la cessation des hostilités et au « retour immédiat aux négociations ». « Les informations concernant les hostilités au Nagorny Karabakh sont la source des plus graves inquiétudes », a indiqué Charles Michel sur Twitter. « L'action militaire doit cesser, de toute urgence, pour empêcher toute escalade (de la violence). Un retour immédiat aux négociations, sans conditions préalables, est la seule voie possible ».

Un porte-parole du président turc, Recep Tayyip Erdogan, allié traditionnel de Bakou, a lui dénoncé sur Twitter une « attaque de l'Arménie ». Le ministre de la défense turc a affirmé dimanche qu'Ankara allait soutenir l'Azerbaïdjan « avec tous ses moyens » et appelé l'Arménie à « cesser son agression ».

Pourparlers de paix dans l'impasse

La région du Nagorny-Karabakh a été le théâtre d'une guerre au début des années 1990 qui a fait 30 000 morts, et, depuis lors, les autorités azerbaïdjanaises veulent en reprendre le contrôle, par la force si nécessaire. Des pourparlers de paix sont dans l'impasse depuis de longues années.

Des combats opposent régulièrement séparatistes et Azerbaïdjanais, mais aussi Erevan et Bakou. En 2016, de graves heurts avaient déjà failli dégénérer en guerre au Karabakh, et des combats meurtriers ont aussi opposé en juillet 2020 Arméniens et Azerbaïdjanais à leur frontière nord.

Les deux camps ont l'habitude de se rejeter la responsabilité de ces flambées de violence. Le président Aliev avait menacé vendredi l'Arménie de représailles, en raison de son « comportement agressif », et accusé Erevan de « faire échouer à dessein les négociations » de paix sur le Karabakh. Il avait estimé que l'Arménie préparait des « dizaines de milliers d'hommes » pour attaquer l'Azerbaïdjan.

Bakou a profité de ses réserves immenses de pétrole pour dépenser sans compter en matière d'armement. L'Azerbaïdjan peut aussi compter sur le soutien du président turc, qui considère l'Arménie comme une menace pour la stabilité du Caucase.

L'Arménie, bien plus pauvre, est par contre plus proche de la Russie, qui y dispose d'une base militaire. Erevan appartient aussi à une alliance politico-militaire dirigée par Moscou, l'Organisation du traité de sécurité collective.