Comme on pouvait s'y attendre, le Père Noël nous a apporté un autre Covid de Noël, avec les cadeaux habituels : masques, quarantaines, distanciation sociale, inoculations coercitives, passeports vaccinaux, campagnes de peur dans les médias et confinements. Deux ans plus tard, après des milliards d'injections de vaccins expérimentaux multiples et variés, la puissante pandémie est toujours là. Mais cette fois, elle est en prime accompagnée d'une inflation galopante qui, en dévaluant la monnaie, pousse de plus en plus de personnes vers l'endettement et la pauvreté. Et pour ajouter l'insulte à la blessure, les « experts » mettent maintenant en garde contre « l'inégalité de l'inflation ». Comme le diraient mes filles (via Homer Simpson) : duh !?
Pilule rouge ou pilule bleue
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En attendant d'entendre ce que nous devons faire pour « sauver Pâques », il est peut-être temps de prendre la pilule rouge et d'affronter la réalité : depuis le début de l'année 2020, un virus macroéconomique déguisé en virus pandémique a pris possession de nos vies, provoquant une dépression généralisée et consignant des populations entières dans des formes souvent extrêmes de discrimination légalisée.

Les injections monétaires et autres inoculations

La fonction fondamentale d'une « urgence sanitaire » légitimée par des programmes perpétuels d'inoculations obligatoires de vaccins ne peut être comprise que si elle est placée dans le macro contexte approprié, à savoir la crise ultime de notre mode de production. La séquence causale à garder à l'esprit est la suivante : implosion économique — simulation de pandémie — offensive autoritaire. S'il devait se concrétiser, ce changement de paradigme culminerait dans un modèle totalitaire de capitalisme implosif, peut-être encore à peine déguisé en démocratie, mais légitimé par la gestion despotique d'urgences mondiales grotesquement disproportionnées par rapport à toute menace réelle. Comme l'ont montré les campagnes d'endoctrinement sur le « vaccin Covid », avec leur cortège de boucs émissaires « anti-vax », le potentiel totalitaire de la propagande de masse est virtuellement illimité. Pour la première fois dans l'histoire, la responsabilité d'un traitement qui ne fonctionne pas — du moins pas comme on nous l'avait promis — a été rejetée sur ceux qui ne l'utilisent pas.

Nous devons toutefois garder à l'esprit que l'actuelle violence idéologique est une réaction à un effondrement socio-économique imminent dont l'ampleur est sans précédent. Le premier choc a été la crise du crédit de 2007 et la récession mondiale qui a suivi. À cette époque, le renflouement du secteur financier a conduit à la crise de la dette européenne (2010-2011), qui a fait de l'assouplissement quantitatif — les programmes d'achat d'actifs financiers par les banques centrales — la mère de toutes les politiques monétaires. Depuis 2008, la distorsion régulière des banques centrales par les injections d'assouplissement quantitatif a engendré un régime ultra-financiarisé avec une accumulation capitaliste contingenté par la création de bulles d'actifs dont la volatilité a refait surface à la mi-septembre 2019, avec la trappe à liquidités sur le marché des prêts repo — pensions de titres — de Wall Street. Ce qui a ensuite ouvert la voie à Virus et à la logique perverse du « capitalisme pandémique », lequel a permis aux 1 % les plus riches d'accroître leur richesse à une vitesse record, en parallèle de la disparition des classes moyennes.

Comme l'ont récemment détaillé Pam et Russ Martens, le 17 septembre 2019, la Réserve fédérale a lancé un programme extraordinaire de prêts repo à ses soi-disant « courtiers principaux » de Wall Street — dont JP Morgan, Goldman Sachs, Barclays, BNP Paribas, Nomura, Deutsche Bank, Bank of America, Citibank, etc. — il s'agissait de prêts au jour le jour ainsi que de prêts à 14 jours et même à plus long terme. Le 2 juillet 2020 (dernière date actuellement disponible dans la base de données de la Fed), la valeur cumulée de ces prêts, dont les garanties étaient principalement constituées de bons du Trésor américain et de titres adossés à des créances hypothécaires, s'élevait à 11,23 billions de dollars. En raison de la manière fragmentée dont la Fed publie ses données, il est impossible d'établir exactement quels prêts sont ou étaient en cours, et pour quel montant. Néanmoins, ce qui compte, c'est leur ampleur époustouflante, qui confirme que les sociétés de négoce de Wall Street étaient au bord d'un effondrement catastrophique avant l'arrivée de Virus. Une autre preuve de la fragilité persistante du marché des prêts a été apportée le 28 juillet 2021, lorsque la Fed a annoncé la création d'une « facilité de repo permanente », consistant en un crédit de soutien de 500 milliards de dollars par semaine pour les 24 courtiers principaux de la Fed et pour d'autres contreparties.

Comme je l'ai affirmé dans un récent article, les contre-mesures à un effondrement imminent ont été planifiées des mois à l'avance. Des documents officiels indiquent que nos seigneurs de la finance ne savaient que trop bien que l'expansion artificielle de la masse monétaire après 2008 devenait ingérable, notamment parce qu'elle s'accompagnait d'une contraction de l'économie mondiale qui, en 2019, avait poussé l'Allemagne, l'Italie et le Japon au bord de la récession, tandis que la Grande-Bretagne, la Chine et d'autres économies hoquetaient de manière sinistre. Il est donc raisonnable de supposer que, plutôt que de risquer un effondrement soudain et catastrophique, les élites ont choisi de contrôler l'accident tout en — pour ainsi dire — prévenant l'ambulance à l'avance. Comme nous l'avons vu, lorsque le marché repo de Wall Street a gelé à la mi-septembre 2019, la Fed a rapidement prescrit une dose plus élevée du même remède, c'est-à-dire une expansion sans précédent de la stimulation monétaire dans les prêts repo. Mais cette fois, placée sous la protection de la pandémie, elle a reculé, de manière décisive. Si nous avançons rapidement jusqu'en janvier 2022, la même logique s'applique : la « crise du Covid » continue de fonctionner comme un énorme doudou Linus [d'après Linus Van Pelt, un personnage du comic-strip Peanuts - NdT] destiné à protéger une économie mondiale qui s'enfonce sous des montagnes de déficits insoutenables et de dettes inutilisables.

Il est important d'être clair sur l'ampleur de l'expansion monétaire envisagée. En août 2019, un livre blanc publié par BlackRock — le fonds d'investissement tout-puissant déjà connu sous le nom de « quatrième branche du gouvernement » — avait montré à la Réserve fédérale la voie à suivre pour sortir du « ralentissement dramatique » à venir, exhortant la banque centrale américaine à mettre en œuvre une politique monétaire « sans précédent » par laquelle de grandes masses d'argent créées de toutes pièces devaient être livrées « directement dans les mains des dépensiers publics et privés ». Ce système de « financement direct », qui, selon BlackRock, devait être rendu « permanent », a été rapidement inauguré un mois plus tard en réponse à la crise du marché des pensions de titres. Depuis lors, et surtout après l'arrivée de Virus, le bilan de la Fed a augmenté de près de 5 000 milliards de dollars, une expansion absolument extraordinaire, même si on la compare aux renflouements par l'assouplissement quantitatif qui ont commencé à la fin de 2008. Et pour avoir une idée de la dimension mondiale de cette expansion, il faut ajouter les milliers de milliards créés par d'autres banques centrales dans le monde, ainsi que les programmes de relance budgétaire tels que « les hélicoptères monétaires ».

Comme l'explique John Titus, ce qui importe n'est pas seulement le caractère quantitatif mais surtout qualitatif de la manœuvre monétaire de la Fed. Dans toute l'histoire de la Fed (fondée en 1913), il n'y avait jamais eu de corrélation directe entre la création de réserves par la banque centrale et l'offre monétaire dans le circuit bancaire de détail. Cependant, depuis septembre 2019, les nouvelles réserves créées par la Fed ont commencé à être répliquées dollar pour dollar sous forme de dépôts au sein des 4 336 banques commerciales américaines existantes. En d'autres termes, l'expansion du bilan de la Fed en est venue à correspondre directement à la masse monétaire globale dans l'économie : l'exact remède monétaire ordonnée par BlackRock, qui est devenue un cas de force majeure quelques mois plus tard grâce à une « crise sanitaire mondiale », laquelle continue encore aujourd'hui de fonctionner comme une assurance-vie pour les marchés financiers. En fin de compte, la mesure dans laquelle la stratégie du « financement direct » et le programme massif de prêts repo renouvelables se chevauchent est de peu d'importance. Ce qu'il faut souligner, c'est que le château de cartes financier était déjà au bord de l'effondrement en 2019, et que Virus est arrivé au bon moment pour permettre et justifier le déluge monétaire assorti du changement de paradigme qui lui est associé.

Quelle que soit la pilule que nous décidons de prendre, il existe trois conséquences sociales immédiates et irréversibles à ce processus de centralisation monétaire orchestré par la banque centrale la plus puissante du monde en collusion avec le gestionnaire d'actifs le plus puissant du monde : 1) l'inflation, 2) un endettement supplémentaire, et 3) un modèle totalitaire de capitalisme de crise.

Les virologues de Wall Street

À quoi ressemble notre environnement macroéconomique ? Ses caractéristiques de base sont résumées ci-dessous :
  • Une dette mondiale de 300 000 milliards de dollars, en croissance exponentielle ;
  • Des déficits qui augmentent rapidement dans la plupart des économies avancées et en développement ;
  • Des bulles colossales sur les marchés des actions, des obligations — dettes — et de l'immobilier ;
  • Une bulle astronomique sur le marché des produits dérivés ;
  • Une inflation galopante avec un potentiel d'hyperinflation.
Dans ce contexte explosif, Virus et ses variants fonctionnent comme des écrans de fumée obscènes dont le but est d'accélérer la gestion autoritaire de la trajectoire implosive du capitalisme contemporain, qui ne peut être contenue par la seule politique économique. La fabrication incessante d'une « crise pandémique » est à la fois une stratégie défensive contre l'effondrement et une attaque agressive contre ce qui reste de la « société du travail », car elle permet aux élites d'utiliser l'inflation comme moyen d'appauvrissement et de domination.

Il me semble que l'objectif primordial est la démolition contrôlée de l'économie productive et de son infrastructure libérale-démocratique, ce qui permet notamment de détourner davantage de capitaux de l'économie réelle pour les canaliser vers les marchés financiers. Alors que le secteur spéculatif est consacré comme le centre absolu de la production de valeur (avec de nouveaux records pour les indices S&P 500, Nasdaq et Dow Jones à la fin de 2021), la société du travail se retrouve endettée et appauvrie. La disproportion entre l'euphorie du secteur financier et la chute libre de l'économie réelle suggère qu'il est bien plus commode pour les élites d'orienter le cours de la dépression vers une « crise sanitaire » grotesquement exagérée que de devoir rendre compte d'une chute socio-économique aux proportions bibliques.

En bref, la domination mondiale de Virus au cours des deux dernières années nous indique que le capitalisme est prêt à faire « tout ce qu'il faut » (comme le disait Mario Draghi en 2012) pour repousser son redde rationem [expression latine tirée de l'Évangile de Luc 16: 2 qui signifie « obligation de rendre des comptes » - NdT]. Il est donc illusoire de penser que les gouvernements, les autorités sanitaires et les médias agissent de manière indépendante. Au contraire, ce qui parle à travers eux est toujours le Pouvoir économico-financier, la Chose même dont on veut nous faire croire qu'elle n'existe que pour les théoriciens du complot ; comme si elle s'était soudainement éteinte comme les dinosaures, ou si elle avait muté en philanthropie.

Si nous voulons savoir comment naissent les « variants tueurs », nous devons interroger les marchés. Les meilleurs virologues opèrent à Wall Street. Il s'agit des traders qui, un mois avant l'apparition d'Omicron, savaient déjà qu'étant donné le prix des actions du panier de la ménagère, la série d'horreur Covid serait à nouveau diffusée. De manière encore plus flagrante que ses prédécesseurs, Omicron n'a rien de pandémique. En fait, comme l'affirme Geert Vanden Bossche, en fonctionnant comme un « vaccin vivant atténué », il constitue très probablement une « occasion unique de commencer à construire une immunité collective » — une occasion naturelle qui risque d'être détruite par une énième campagne de vaccination massive. Quoi qu'il en soit, le décalage grotesque entre l'impact du variant et les mesures répressives prises en son nom ne peut s'expliquer qu'en termes économiques : Omicron est un énième instrument de levier financier.

J'entends par là que son rôle immédiat est de contrôler la flambée inflationniste à court terme, puisque les campagnes de peur renouvelées sapent les dépenses et la consommation, ce qui empêche l'énorme masse monétaire injectée dans le secteur financier de circuler en tant que demande réelle dans l'économie. Cette situation permet aux banques centrales de poursuivre l'objectif désormais métaphysique de la planche à billets grâce à leurs bazookas proverbiaux, dont le but est de soutenir des marchés financiers remplis d'actifs toxiques (des titres adossés à des créances hypothécaires aux produits dérivés complexes), d'entreprises zombies et d'avoirs monstrueux de dette publique. En d'autres termes, les banques centrales inondent le système financier de monnaie numérique afin d'éviter des hausses importantes des taux d'intérêt. En effet, la simple idée de relever sérieusement les taux déclencherait sur ces marchés, dans lesquels tout tourne autour de la disponibilité de liquidités bon marché, diverses bombes à retardement.

Dans des conditions où le capitalisme fonctionne a minima, l'inflation est combattue précisément en augmentant le coût de l'argent. Mais cette solution est impossible dans un contexte fragile et hyper-endetté parce que les marchés maintenus dans une excitation perpétuelle par l'argent facile subiraient des conséquences dévastatrices. Une hausse des taux d'intérêt déclencherait des réactions en chaîne au sein d'un système mondial davantage mû par la spéculation à effet de levier que par le PIB. D'une part, la planche à billets doit donc rester allumée pour gonfler les marchés financiers ; d'autre part, l'inflation des prix qui en résulterait dans le monde réel doit être « gérée avec soin » pour éviter le chaos social.

Récapitulons :
  • Les variants de type Omicron sont, par essence, des mesures déflationnistes destinées à perpétuer les politiques monétaires laxistes des banques centrales et à empêcher les hausses des taux d'intérêt, qui atomiseraient les bilans de la plupart des entreprises financières tout en compromettant les dettes publiques et leur financement.
  • La dette publique et le capital monétaire spéculatif sont, bien entendu, étroitement liés.
  • Une dévaluation spectaculaire de la superstructure financière compromettrait la capacité de l'État à financer ses opérations.
  • Ceci est particulièrement évident dans le cas de pays comme l'Italie et la Grèce, qui ont rapidement adopté les mesures les plus draconiennes à l'égard d'Omicron, pour être en mesure de solliciter un soutien monétaire supplémentaire qui va de l'extension des aides d'État et du PEPP (programme d'achat en urgence en cas de pandémie de la BCE) à la révision du pacte européen de stabilité et de croissance.
Mais comme il n'existe pas de repas gratuit dans le capitalisme, cette fuite en avant insensée de la dette signifie nécessairement plus de pauvreté et de servitude pour — presque — tout le monde, les classes moyennes s'endettant jusqu'à la moelle dans une tentative désespérée de conserver leur statut. C'est dans cette optique que les variants sont déployés pour opérer un changement d'époque vers ce qui ressemble de plus en plus à un type néo-féodal de capitalisme sénescent, régi par le seigneuriage [droit qu'un seigneur battant monnaie, puis le roi, prélevait sur la fabrication de cette monnaie - NdT], dont la longévité pourrait bien dépasser toute attente optimiste de transformation radicale.

Inflation — Les vices privés et les vertus publiques

J'ai affirmé que le dernier épisode de la saga Covid trouve son origine dans une tentative concertée de contenir l'inflation, laquelle est désormais tellement réelle que même le président Powell, chef de la Fed, a récemment été contraint de démentir son propre récit mythologique quant à son caractère transitoire. Aux États-Unis, l'inflation atteint désormais 6,8 % sur une base annuelle, la plus élevée depuis 1982. Et si l'on ajoute les prix de l'immobilier, on passe facilement à deux chiffres. La solution ? Pour l'instant, un variant déflationniste — également déployé, bien sûr, comme arme de distraction massive — en y ajoutant des formules magiques bon marché comme le calcul de l'IPC — inflation des prix à la consommation — sur les données de 2019-2020, de manière à la maintenir artificiellement à la baisse.

La poussée actuelle de l'inflation atteint des records non seulement aux Etats-Unis, mais aussi en Grande-Bretagne (+5,1 % en novembre), et elle est la plus rapide de l'histoire de l'Euro. Cette dernière cause des maux de tête à la patronne de la BCE, Christine Lagarde, qui, à la mi-décembre, a décidé de ne pas relever les taux et d'interrompre le PEPP — en s'engageant à le rétablir si la « pandémie » devait continuer à sévir — uniquement pour augmenter l'assouplissement quantitatif traditionnel. Il s'agit essentiellement d'un autre exemple de plus ça change, plus c'est la même chose [en français dans le texte - NdT]. Dans la mesure où les banques centrales sont prises au dépourvu en ce qui concerne la politique monétaire, la gestion contrôlée de l'inflation semble être une composante essentielle du récit de la pandémie, en ce qu'elle permet l'affaiblissement progressif et la prise de contrôle de l'économie réelle. La dépréciation de la monnaie semble être une caractéristique, et non un défaut, de la banque centrale. Rappelez-vous le slogan du Forum économique mondial ? Vous ne posséderez rien, et vous serez heureux ! Pour faire court, cette situation ne se produit pas par accident mais à dessein.

En d'autres termes, l'inflation est utile pour gérer la transition autoritaire vers une société mondiale à deux vitesses, où très peu de gens contrôlent l'offre monétaire, tandis que la plupart sont soumis à la pauvreté, au contrôle et à la peur. C'est, en un mot, la trajectoire criminelle du capitalisme contemporain. Et l'inflation est également bien pratique contre la dette publique, puisque la masse de liquidités inflationnistes injectées sur les marchés supprime à la fois les taux d'intérêt et les rendements obligataires. Si le « tapering » de la Fed devient réalité, les obligations pourraient rapidement augmenter [le « tapering » correspond à la réduction progressive de la politique d'assouplissement monétaire menée par la Banque centrale américaine depuis fin 2010, laquelle réduit la stimulation économique en ralentissant le rythme de ses achats d'actifs - NdT]. Cependant, répétons le point essentiel : un tapering significatif serait catastrophique pour presque toutes les classes d'actifs, et serait donc de courte durée. C'est la raison pour laquelle on nous vend aujourd'hui un faux tapering, dans la mesure où le bilan de la Fed a en fait augmenté depuis que Jerome Powell a annoncé en novembre 2021 le retrait de l'aide aux pandémies. Voilà qui montre que la seule voie viable pour les élites consiste à prétendre de manière officielle être en train de lutter contre l'inflation tout en continuant à l'alimenter en coulisses.

Après deux ans d'assauts incessants contre notre intelligence, même les plus fidèles champions du récit officiel devraient trouver le courage de l'admettre : Covid-19 est le nom de la réponse coordonnée à une implosion systémique de plus en plus ingérable. La prolongation surréaliste de la pandémie nous indique que des sociétés entières sont otages de la reproduction de la valeur fictive dans le secteur financier, où, semble-t-il, le ciel est la limite. Mais le tribut à des marchés perpétuellement haussiers, ce sont des variants sans fin, des programmes de vaccination trimestriels, des vagues successives de terreur médiatique, et toute une panoplie de réglementations d'urgence kafkaïennes visant à
  1. faire tourner la planche à billets tout en déprimant l'économie réelle ;
  2. nous habituer à la soumission vis-à-vis d'une prétendue force majeure ; et
  3. nous distraire de ce qui se passe dans l'Olympe financier, le lieu où se joue la véritable partie d'échecs qui décide de nos destins.
Comme toutes les guerres, la « guerre contre le Covid » justifie la planche à billets et les taux bas, lesquels provoquent à leur tour l'inflation. Mais aujourd'hui, cette logique ne peut se résoudre que dans la centralisation du flux monétaire. En termes capitalistes, il n'existe pas d'autre issue. En effet, la pression inflationniste actuelle, qui signifie dévaluation de la monnaie et érosion du pouvoir d'achat, n'est pas une simple conséquence de la crise de la chaîne d'approvisionnement, comme on nous l'a affirmé. Il s'agit plutôt du résultat inévitable de la surabondance d'argent fictif, qui déferle désormais avec la force destructrice d'une avalanche.

Mais outre leur fonction déflationniste, les variants jouent également un rôle idéologiquement agressif : ils créent le terreau ad hoc pour un nouveau durcissement social. Si tout se passe comme prévu, la majeure partie de l'humanité pourrait bientôt être réduite à l'esclavage monétaire, que nos bienfaiteurs présenteront comme la seule solution à une Grande dévaluation qu'ils ne pourront plus camoufler. C'est la raison pour laquelle ils doivent nous formater à vivre dans la peur, en nous forçant à intérioriser la Nouvelle normalité comme une condition de précarité totale, d'anxiété de masse et de chaos. Dans la phase actuelle, aucune discussion sur les causes économiques ne peut exister.

Gérer l'ingérable

Soyons clairs sur le tableau d'ensemble : l'économie ne pourra jamais retrouver les niveaux de croissance nécessaires à la reproduction sociale [la reproduction sociale est un concept utilisé en anthropologie et dans les disciplines adjacentes pour donner un sens à la continuité de la société dans le temps en tant qu'entité reconnaissable - NdT] à moins que par un démantèlement contrôlé de la société du travail cette reproduction ne soit réduite à des conditions minimales. Nous avons, depuis des années maintenant, nourri une fausse économie enracinée dans les dépenses gouvernementales soutenues par l'achat d'actifs par les banques centrales et des taux d'intérêt bas. Cela n'a rien à voir avec la croissance réelle. Il faut donc oublier le passé : la belle époque [en français dans le texte - NdT] du capitalisme social-démocrate est définitivement révolue. Dans un contexte libéral, il ne peut plus y avoir de croissance réelle suffisante pour reproduire le système capitaliste de notre monde. Cela est dû à une raison immanente et objective, qui n'apparaît clairement que si l'on examine l'évolution historique de notre mode de production : depuis les années 1970, la valeur productive du travail a été progressivement écrasée par le capital lui-même grâce à sa sainte alliance avec la science et la technologie, soumises à la concurrence — un handicap auto-infligé que les fonctionnaires du « capitalisme de crise » refusent obstinément d'affronter.

En raison de ce que Keynes avait déjà appelé l'ère du « chômage technologique » (qui inclut le sous-emploi et tous les types de dumping salarial), le capital, dont la composition organique est de plus en plus élevée, est incapable de tirer une plus-value suffisante — tant relative qu'absolue — du travail salarié, et c'est la raison pour laquelle il se jette à corps perdu dans le monde magique de la finance, où l'argent lui-même est mis à contribution. Comme on le sait, Marx avait anticipé cette situation avec sa théorie de la « baisse tendancielle du taux de profit », exposée dans le troisième volume de Capital. Cependant, il ne pouvait pas prévoir les effets implosifs de l'augmentation exponentielle de l'automatisation, lesquels se manifestent aujourd'hui par la dépendance pathologique à des montagnes d'argent fictif destiné à une dévaluation ruineuse des économies, des États et donc de sociétés entières. L'effondrement financier est susceptible de se produire sous la forme d'un effondrement du marché de la dette (le moteur de l'ensemble du système), qui provoquerait une flambée incontrôlable des taux d'intérêt ainsi que l'évaporation du dollar et des autres monnaies fiduciaires dans le monde entier.

Pour l'instant, cette issue est repoussée par des moyens autoritaires. Comme nous l'avons vu, l'accélération du contrôle monétaire depuis septembre 2019 a été permise par le gel de l'économie réelle grâce à la simulation d'une pandémie. En hypnotisant les masses avec des doses incessantes de Virus-phobie, et en les assignant à résidence en attendant le sérum miracle (qui, comme on pouvait facilement le prévoir, s'est avéré miraculeux principalement pour Big Pharma), nos gouvernants politiques, dirigés par les élites financières, ont permis aux banques centrales de renflouer le secteur financier tout en gérant le monstre inflationniste.

Après les échecs des politiques néo-keynésiennes (dépenses publiques) et néo-libérales (austérité et déréglementation du marché), nous avons aujourd'hui atteint la phase du « capitalisme pandémique », qui sera bientôt suivie d'autres tentatives tyranniques de gérer l'ingérable. En termes capitalistes, l'arrogance financière est la conséquence inévitable de l'incapacité toujours plus grande du capital à créer une nouvelle plus-value — un symptôme aux conséquences si traumatisantes que nous faisons tout pour éviter d'y être confrontés. Mais la prolongation de l'état d'urgence ne nous sauvera pas du crash, qui nous frappera probablement sous forme d'un accident contrôlé depuis le sommet. Les élites savent qu'une soudaine surchauffe hyper-inflationniste de l'économie entraînerait des vagues incontrôlables de troubles sociaux. Mais elles savent également qu'elles peuvent espérer gérer la récession économique grâce à des scénarios de crise et à l'asservissement progressif des multitudes terrifiées.

Nous devons donc nous préparer. Par exemple, en construisant des réseaux et des communautés autonomes qui ne dépendent pas d'un modèle de reproduction sociale en voie de désintégration — et pour cette raison, de plus en plus violent. La politique, comme nous le constatons tous les jours, est désormais complètement soumise au dogme économique, et donc privée de tout élan émancipateur. La gauche politique a choisi de prendre la pilule bleue et, comme le résume Franco Berardi (Bifo), elle ne peut offrir que de fausses perspectives :
« Il n'existe pas d'issue politique à l'apocalypse. Depuis trente ans, la gauche a été le principal instrument politique de l'offensive ultracapitaliste, et celui qui investit ses espoirs dans la gauche est un imbécile qui mérite d'être trahi, car trahir est la seule activité dans laquelle la gauche est capable de faire preuve de compétence. »
Si nous voulons protéger ce qui reste de notre indépendance critique et de notre dignité humaine, et surtout préserver les espoirs d'un avenir meilleur pour nos enfants, nous devons nous libérer, à tout le moins sur le plan mental, des chaînes de cette servitude volontaire à une pseudo-pandémie soutenue par un type de scientisme aux mains des multinationales élevé désormais au rang de religion mondiale. C'est le premier pas fondamental vers l'émancipation face à l'actuelle impasse. Nous devons de manière simultanée réhabiliter une critique politique du capitalisme conçue comme une Weltanschauung, c'est-à-dire une vision du monde incarnée dans la relation dialectique entre l'argent et le travail visant à créer de la plus-value, des marchandises et du profit. Qu'on le veuille ou non, à l'ère de l'automatisation technologique accélérée, ce monde est un zombie qui ne peut se maintenir en vie qu'en devenant totalitaire. Si nous voulons éviter le prochain tsunami de barbarie sociale, nous devrons, à un moment donné, redéfinir au-delà de sa signification capitaliste la relation entre le travail, la communauté et la richesse sociale. Pour ce faire, nous devrons prendre une troisième pilule, qui ne sera toutefois disponible qu'après avoir organisé une résistance populaire significative contre la tyrannie socio-économique légitimée par le « capitalisme de crise ».
À propos de l'auteur

Fabio Vighi est professeur de théorie critique et d'italien à l'université de Cardiff, au Royaume-Uni. Ses travaux récents comprennent notamment Critical Theory and the Crisis of Contemporary Capitalism (Bloomsbury 2015, avec Heiko Feldner) et Crisi di valore : Lacan, Marx e il crepuscolo della società del lavoro (Mimesis 2018).
Source de l'article initialement publié en anglais le 3 janvier 2022 : The Philosophical Salon
Traduction et emphases : Sott.net