Jamais le risque d'arrêts de production et de défaillance des industries agroalimentaires n'aura été aussi réel, selon un communiqué du syndicat de la Coopération Agricole, qui regroupe 40 % de l'agro-industrie française. Le « mur est infranchissable », laissant présager des risques de pénurie alimentaire cet hiver dans les supermarchés.
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© Getty Images / JEFF PACHOUD/AFPDonnez-nous le pain de tous les jours…
Le secteur alimentaire est en train de connaître une crise inédite depuis plus de 40 ans, une crise qui touche l'ensemble des coûts de production agricole et agroalimentaire. La gestion de la crise Covid, les sécheresses et l'inflation ont déjà entamé l'appareil agricole français. Maintenant, la flambée des coûts de l'énergie frappe maintenant à la porte de son appareil alimentaire, pouvant contraindre définitivement les entreprises agroalimentaires à baisser leur production.

« La continuité de nos capacités à produire est en cause »

À cause de la flambée des prix des matières premières et de l'énergie, « la continuité de nos capacités à produire est en cause », explique Dominique Chargé, président de la Coopération agricole.

Il souligne qu' « il y a déjà des baisses de production et des mises en chômage technique ou partiel... Des entreprises qui conditionnent et préparent les produits alimentaires tournent à 50 % ou trois jours par semaine ». À présent, « un certain nombre d'entreprises vont limiter le nombre de références, il va y avoir une incidence et un risque de rupture qui est important sur la chaîne alimentaire ».

Selon le syndicat, « jamais le risque d'arrêts de production et de défaillance des industries agroalimentaires n'aura été aussi réel. Aucune entreprise n'est épargnée par cette crise d'ampleur touchant au prix et à la disponibilité des intrants (arrêt de 50 % de la capacité de production d'ammonitrates en Europe), des matières premières (-50 % de volumes de production de haricots et -4 % de volume de production laitière), de l'énergie (+350 % environ de hausse cumulée depuis 2021 pour le cours du gaz naturel et de l'électricité) et de l'emballage (+40 % pour les matières plastiques et le papier-carton). »


Les industriels laitiers avaient prévenu le 20 septembre : « Le risque est très élevé sur la bonne continuité de la collecte laitière, l'activité des industriels laitiers et par conséquent sur l'approvisionnement des Français en produits laitiers. » Selon Le Figaro, au-delà des prix de l'énergie, ces derniers craignent des délestages intempestifs, qui les contraindraient à jeter du lait, une denrée particulièrement sensible d'un point de vue sanitaire.

Parmi l'ensemble de ces augmentations, l'énergie constitue le poste de dépense le plus important, avec des augmentations de 300 à 400 % des factures d'énergie.

La question de l'intérêt général

La Coopération Agricole a appelé le gouvernement à reconnaître les activités agricoles et agroalimentaires d'intérêt général.

« Afin de pouvoir éviter les restrictions d'énergie, incompatibles avec les procédés de transformation industriels pour les produits alimentaires », en cas de tensions cet hiver. « Il faut nous aider aussi sur le coût même de l'énergie », insiste Dominique Chargé, qui demande un bouclier énergétique, et la possibilité de répercuter le coût vers les clients.

Le syndicat plaide, en effet, pour que les prix de vente des produits alimentaires industriels soient corrélés à leurs coûts de production, comme c'est le cas pour les produits agricoles. Les hausses des coûts de production (énergie, transports, emballages ...) que subissent les industriels ne sont, en effet, pas toutes répercutées sur leurs prix de vente à la grande distribution et, en bout de chaîne, aux consommateurs.

En d'autres termes, en plus d'une pénurie plus forte à venir, les prix vont continuer d'augmenter.

« Il en va de la sécurité alimentaire de notre Nation »

Pour Dominique Chargé, « l'heure est grave, la situation historique d'inflation de coûts de production que nous connaissons menace réellement la capacité des entreprises à maintenir leurs activités de production » et « il faut réagir en urgence, il en va de la sécurité alimentaire de notre Nation. »

La Coopération Agricole souhaite pousser le gouvernement à un Pacte de souveraineté entre les acteurs de la filière alimentaire, les pouvoirs publics et les consommateurs, qui « permettra d'assurer le maintien d'une chaîne alimentaire française qui soit résiliente, pérenne et durable. »