L'armée britannique a espionné plusieurs personnalités politiques, médiatiques et même des citoyens ayant exprimé leur opposition au confinement lors de l'épidémie de coronavirus. L'information a été dévoilée par le quotidien Daily Mail.
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Le journal affirme détenir les documents qui démontrent comment les autorités, tout comme ce fut dévoilé aux États-Unis par les Twitter Files, ont fait pression sur les réseaux sociaux pour censurer des contenus hostiles à la politique officielle de gestion de la crise du Covid-19.

Les opérations d'espionnage étaient menées par plusieurs bridages et cellules, militaires et gouvernementales. La plus réputée est sans doute la 77e brigade du ministère de la Défense. Le Daily Mail affirme que les documents, obtenus par Big Brother Watch, une association britannique qui milite pour la protection des libertés civiles et de la vie privée, font aussi état de la participation d'une "Unité de lutte contre la désinformation" affiliée au Département du numérique, de la culture, des médias et des sports et d'une Unité de réponse rapide, directement affiliée au Bureau du Cabinet du Premier ministre britannique.

Les révélations publiées par le Daily Mail proviennent également d'un lanceur d'alerte, un membre anonyme de la 77e brigade, la "machin de guerre d'information britannique", dont les soldats savent autant manier les armes que les équipements audiovisuels, les logiciels de montage, l'analyse des données, les réseaux sociaux et des techniques de marketing digital.

Des comptes surveillés, pression sur les réseaux sociaux pour censurer

Le quotidien a affirmé samedi 28 janvier 2023 que ces brigades ont rassemblé des dossiers contenant les opinions divergentes de personnalités comme David Davis, ancien ministre britannique, ou encore Peter Hitchens et Toby Young, journalistes. Des opérations éloignées de la mission première de cette brigade "qui est de cibler les ennemis étrangers", a regretté le lanceur d'alerte. "J'ai eu l'impression que le gouvernement était plus intéressé par la protection de sa politique que de découvrir toute ingérence étrangère potentielle. Je regrette d'en avoir fait partie... Franchement, le travail que je faisais n'aurait jamais dû avoir lieu", a-t-il ajouté.


Tout comme c'était le cas aux États-Unis, où les Twitter Files ont dévoilé les pressions et "l'omniprésence" d'institutions fédérales et sécuritaires sur le réseau social dans la modération de contenus, le Daily Mail affirme que des "ministres ont fait pression sur ces plateformes pour supprimer des contenus et promouvoir les versions officielles".

Les comptes de citoyen lambda étaient également passés au crible, contrairement aux affirmations du ministère de la Défense. Les documents démontrent que les personnes ciblées "pour contrer la désinformation" étaient qualifiées de "prétendus experts" qui publiaient "des récits nuisibles".

Des fonctionnaires, aidés par l'intelligence artificielle, menaient des opérations de "scraping" sur les réseaux sociaux (extraction de données automatique, ndlr). Les informations récoltées étaient ensuite utilisées pour adapter les réponses du gouvernement aux critiques visant leurs décisions et politiques.

Le Daily Mail, citant le lanceur d'alerte, écrit qu'il "est tout à fait évident que les activités de la brigade 77 ont abouti à la surveillance de la population, à surveiller les publications sur les réseaux sociaux de personnes lambda et effrayées". Des posts qui "ne contenaient pas d'informations fausses ou coordonnées".

Pas d'accord avec "l'opinion officielle "et "non pas avec les faits"

Des personnalités dont les noms figuraient dans les documents obtenus par Big Brother Watch ont vite réagi à ces révélations. "Il est scandaleux que des personnes remettant en question les politiques du gouvernement aient fait l'objet d'une surveillance secrète", a indiqué le membre du Parlement et du Conseil privé de Sa Majesté, le conservateur David Davis, au Daily Mail. "Ce qui se passait était simplement une attaque contre des personnes qui n'étaient pas d'accord avec l'opinion officielle, pas avec les faits", a-t-il également déclaré à TalkTv.

Le journaliste Peter Hitchens du quotidien Mail on SunDay a également fait l'objet d'une opération de surveillance, après avoir partagé un article se basant sur des documents fuités du National Health Service (système de santé britannique, ndlr) qui affirmait que les données utilisées pour justifier le confinement étaient incomplètes.

Dans un texte publié sur le Daily Mail, le journaliste se demande s'il n'a pas été "shadow-banned", c'est-à-dire subi une restriction de visibilité sur ses contenus sur les réseaux sociaux et les moteurs de recherche sans en avoir été informé. Une pratique utilisée par l'ancienne équipe de modération de Twitter que la journaliste américaine Bari Weiss avait dévoilé dans le cadre des Twitter Files.


"La chose la plus étonnante à propos de la grande panique lors de la pandémie de Covid était le nombre d'attaques que l'État a réussi à mener contre les libertés fondamentales sans que personne ne s'en soucie vraiment, sans protester. Il est maintenant temps d'exiger une enquête complète et puissante sur les éléments sombres que Big Brother Watch a courageusement dévoilés", a-t-il écrit.

Big Brother Watch a également réagi à ces documents : "Il s'agit d'un cas alarmant de mission creep (Détournement d'une mission, ndlr) où l'argent public et le pouvoir militaire ont été détournés pour surveiller les universitaires, les journalistes, les militants et les députés qui ont critiqué le gouvernement, en particulier pendant la pandémie".

Le porte-parole de l'association fait remarquer que le fait que "cette surveillance politique se soit déroulée sous le couvert de 'lutte contre la désinformation' montre à quel point ce concept est ouvert aux abus et est devenu un chèque en blanc que le gouvernement utilise pour tenter de contrôler les récits en ligne".

Le Daily Mail, citant une source proche du cabinet du Premier ministre, fait savoir que ces opérations ont "considérablement" baissé depuis la fin du confinement.