Mardi dernier, la Chambre des représentants des États-Unis, située dans l'aile sud du Capitole, a été le théâtre d'une abjecte expression de perversion compulsive. La Chambre, qui se distingue depuis longtemps par son aversion pour la vérité, la justice et ce qui était autrefois l'idéal américain, est complètement corrompue par des intérêts particuliers qui ont acheté une écrasante majorité de législateurs, y compris les dirigeants des deux principaux partis politiques. Dans le domaine de la politique étrangère, ainsi que dans de nombreuses questions nationales et constitutionnelles, il n'y a pas de lobby plus puissant que celui de l'État d'Israël, et son pouvoir a été pleinement mis en évidence mardi après-midi lorsque la député Rashida Tlaib a été censurée pour le crime d'être d'ascendance palestinienne et de s'élever contre le génocide actuel de son peuple par l'État juif. Presque tous les républicains ont voté pour la condamner, de même qu'un nombre considérable de ses collègues démocrates.
Le lendemain, la Maison Blanche a ajouté sa propre condamnation de Tlaib, en se concentrant spécifiquement sur la phrase « de la rivière à la mer » qu'elle a utilisée, un slogan qui, pour les besoins de la cause, a été assimilé, par des gens comme les membres de la fanatique Ligue sioniste antidiffamation (ADL), à un appel arabe à l'éradication d'Israël. L'infâme directeur de l'ADL, Jonathan Greenblatt, a crié à l' »antisémitisme » et l'ADL a répété que « « Du fleuve à la mer » est un appel du Hamas à l'anéantissement d'Israël », et affirmé que ce prétendu appel à la coexistence arabo-juive, était une couverture pour le terrorisme.
Mais le but de Tlaib était de raviver la souvenir de la Palestine d'antan. Elle a expliqué que la phrase était « un appel à la liberté, aux droits de l'homme et à la coexistence pacifique, et non à la mort, à la destruction ou à la haine ». Les manifestants pro-palestiniens utilisent également cette expression pour plaider en faveur de la création indéfiniment reportée d'un état palestinien, mais des groupes comme l'ADL préfèrent affirmer que leur militantisme constitue un « soutien matériel au Hamas » et, comme le Hamas est un groupe terroriste inscrit sur la liste des États-Unis, cela équivaut à une aide aux terroristes. Mme Tlaib a également particulièrement irrité la Maison Blanche en publiant récemment une vidéo en ligne accusant le président Biden de soutenir le génocide dans la bande de Gaza, une affirmation difficile à contester.
On pourrait arguer que les membres du Congrès sont protégés, comme les autres citoyens, par le premier amendement qui garantit la liberté d'expression, mais il devient de plus en plus évident que cette garantie ne s'applique pas lorsqu'il s'agit d'Israël, que ce soit dans les couloirs du Congrès ou sur les campus universitaires, où les groupes palestiniens sont harcelés et ostracisés. Le vote de censure contre Rashida Tlaib peut être considéré comme une expression de la volonté des deux partis de protéger l'État d'Israël de toute critique. Rashida Tlaib n'a enfreint aucune loi, n'a menacé personne et n'a pas appelé à la destruction d'aucun État, pourtant, elle a été accusée par pas mal de ses camarades à la Chambre de quelque chose comme un crime contre l'humanité, parce qu'elle a critiqué un état qui est considéré comme l'un des plus proches alliés de l'Amérique, un de ses meilleurs amis et la seule démocratie au Moyen-Orient, tout cela n'étant qu'une accumulation de mensonges. Israël n'est pas un allié, car cela implique un minimum de réciprocité, un mot qui n'existe apparemment pas en hébreu. Et dans la crise actuelle, le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahou a démontré qu'il ne tiendrait aucun compte de l'intérêt américain de limiter le massacre, même si Blinken-Biden le suppliaient. Quant à l'argument de la démocratie, Israël n'accorde la citoyenneté avec tous les droits qu'aux Juifs, ce qui n'est guère démocratique. Apparemment, il n'est même pas question d'interrompre l'aide massive des États-Unis, y compris les 14,5 milliards de dollars actuellement consacrés à l'extermination des Palestiniens. Israël obtiendra toujours tout ce qu'il veut et c'est lui qui posera les termes de sa relation avec Washington.
Les déclarations de Mme Tlaib s'inscrivent dans le contexte d'une Maison Blanche qui se croit en droit de fournir des bombes en Israël pour massacrer les enfants palestiniens, en gardant secret le nombre d'avions d'armes qui sont arrivés en Israël ou qui sont en chemin. Et puis il y a des membres du Congrès comme le sénateur Lindsey Graham de Caroline du Sud qui se croient en droit de prôner une « guerre totale » contre ce qu'il appelle « la population la plus extrémiste de la planète », c'est-à-dire les Palestiniens. Mais la critique verbale de ce qui est clairement un génocide et une violation massive du droit international qui rend le gouvernement américain complice d'un crime de guerre est interdite, et l'on peut même craindre que la censure qui s'est abattue sur Mme Tlaib ne devienne la norme et le fondement d'une forme de criminalisation de toute critique d'Israël, qui partirait du principe que tous les gens qui critiquent cet Etat sont ipso facto des antisémites et que les mots eux-mêmes constituent un « crime de haine ».
Considérons un instant les élus dont le comportement a posé problème avant que Mme Tlaib ne tombe en disgrâce mais qui sont toujours en fonction sans avoir été confrontés à la moindre procédure visant à définir ce qu'un député a le droit de faire. Au-delà de l'appel clair et net du sénateur Lindsey Graham à un meurtre de masse, il y a le sénateur Bob Menendez du New Jersey dont la tendance à accepter des pots-de-vin a fait l'objet d'un scandale particulièrement choquant, en partie parce qu'il avait accumulé un butin de 480 000 dollars en billets qu'on a retrouvés dans les poches de ses vestes, des placards et un coffre-fort, ainsi que 13 lingots d'or, dont deux d'un kilo d'une valeur de plus de 100 000 dollars. Les deux hommes se promènent toujours sans avoir eu à subir le moindre vote de censure !
L'amour d'Israël pour les États-Unis, si tant est qu'il en ait, est superficiel. Rappelez-vous un instant les déclarations des premiers ministres israéliens sur la nature de la relation. Prenons par exemple celle d'Ariel Sharon en 2001 : « Chaque fois que nous faisons quelque chose, vous me dites que les Américains feront ceci ou cela. Je veux vous dire quelque chose de très clair : ne vous inquiétez pas de la pression américaine sur Israël. Nous, le peuple juif, contrôlons l'Amérique et les Américains le savent... Je me fiche de ce que pense le peuple américain, le Congrès m'appartient ! » Ou encore la célèbre boutade de Netanyahou, également en 2001 : « L'Amérique est quelque chose que l'on peut très facilement circonvenir ! » Voilà donc ce que les dirigeants du « meilleur ami de l'Amérique » pensent réellement des États-Unis et de son peuple ! C'est une vache à lait que l'on trait et que l'on exploite à des fins de couverture politique avant de s'en débarrasser une fois qu'elle n'est plus utile.
Sharon a également déclaré : « Je jure que si j'étais un simple civil israélien et que je rencontrais un Palestinien, je le brûlerais et je le torturerais avant de le tuer ». Cette situation sans issue explique pourquoi les habitants de Gaza ont explosé de rage le 7 octobre. La Palestine était une seule nation, du Jourdain à la mer Méditerranée, lorsqu'Israël a été fondé en 1948. Cela fait trois quarts de siècle qu'Israël procède au nettoyage ethnique des Palestiniens, vole et pille leurs terres, remplace ou éradique des centaines de villages. Et depuis près de deux décennies, l'état colonial assiège Gaza, affame massivement les Gazaouis et se livre, en ce moment même, à un massacre génocidaire.
Au cours des combats qui ont précédé l'indépendance d'Israël, trois quarts de million de Palestiniens ont été chassés de leurs maisons et envoyés dans des camps de réfugiés par les milices israéliennes, sans compter les dizaines de milliers de personnes qui ont été purement et simplement tuées. Aujourd'hui, les camps de réfugiés de Gaza sont bombardés, de même que les églises, les hôpitaux, les écoles et les immeubles d'habitation, et nous venons d'apprendre que certains responsables israéliens envisagent d'utiliser une de leurs bombes nucléaires pour anéantir complètement la bande de Gaza. Il est surprenant que les Palestiniens aient fait preuve d'autant de retenue pendant si longtemps.
Le système politique américain s'est laissé corrompre par Israël, ce qui est très dommageable. Il est important de se demander ce que les relations avec Israël ont apporté à l'Américain moyen dont les impôts soutiennent l'entreprise sioniste et son plan d'élimination des Palestiniens. La réponse est que rien de bon n'est sorti de cette soi-disant alliance, qui a coûté aux États-Unis 260 milliards de dollars (en prix constants) d'aide directe depuis 1946. À cela s'ajoute la grosse somme de 14,5 milliards de dollars approuvée plus récemment et qui doit constituer une sorte de fonds de guerre pour permettre à Netanyahou d'écraser les Palestiniens. Israël reçoit régulièrement 3,8 milliards de dollars par an en aide directe du Trésor américain, un cadeau de Barack Obama, soit plus que ce que tous les autres pays reçoivent à eux tous. À cela s'ajoutent, plus ou moins officieusement, des sommes considérables provenant de projets militaires spéciaux et conjoints, d'organisations caritatives douteuses et de conseils en développement étatiques, ce qui porte le total à environ 10 milliards de dollars par an, sans compter les milliards d'aide financière qui sont en réalité des pots-de-vin versés à l'Égypte et à la Jordanie pour qu'elles restent en paix avec l'État hébreu. L'aide de l'Oncle Sam contribue à faire d'Israël un pays très riche qui peut se permettre d'offrir à ses citoyens juifs des soins de santé et un enseignement supérieur gratuits, ainsi que des logements subventionnés.
Le fait d'être lié charnellement à l'État juif présente un inconvénient considérable : cela oblige les Etats-Unis à recourir régulièrement à leur droit de véto aux Nations Unies, pour protéger leur état client ainsi que leur implication dans des guerres inutiles au Liban, en Irak, en Syrie et en Libye, l'Iran étant le prochain pays en ligne de mire. Israël n'a pas non plus hésité à tuer des Américains lorsqu'il estimait que les États-Unis ne soutenaient pas assez ses intérêts, et la Maison Blanche est tellement coincée dans son « alliance » qu'elle a couvert les crimes commis contre ses propres citoyens. L'assassinat par un sniper, l'année dernière, de la journaliste américano-palestinienne Shireen Abu Akleh, qui n'a arraché qu'un soupir au département d'État qui s'est empressé de corroborer les mensonges israéliens sur le meurtre, en est un excellent exemple. Et puis il y a les 34 marins tués et les 172 autres blessés sur l'USS Liberty dans les eaux internationales le 8 juin 1967. Ce navire de renseignement de la marine américaine, en grande partie non armé, surveillait les combats en cours avec l'Égypte lorsqu'il a été attaqué par des avions et des torpilleurs israéliens. Les sauveteurs envoyés des porte-avions américains pour aider le navire ont été rappelés par le président Lyndon B. Johnson, qui a également orchestré une opération de camouflage exonérant Israël de toute responsabilité. On espère que lui et son secrétaire à la défense Robert MacNamara brûlent aujourd'hui en enfer.
Le gouvernement américain est si peu enclin à remettre Israël en question que beaucoup pensent que des influences occultes sont en jeu, y compris peut-être l'affaire du trafic sexuel pédophile Jeffrey Epstein/Mossad. On sait depuis longtemps que les candidats à de hautes fonctions aux États-Unis sont approchés par des agents du lobby sioniste et contraints de signer un engagement de soutien à Israël. En retour, les candidats dociles reçoivent des contributions politiques substantielles et une bonne couverture médiatique. S'ils disent « non », ils risquent fort de perdre les élections et de connaître le sort de Cynthia McKinney, Charles Percy, William Fulbright, Pete McCloskey et Paul Findley.
James Traficant, membre du Congrès de l'Ohio, a peut-être été celui qui a critiqué le pouvoir d'Israël le plus agressivement dans les années 1980 et 1990, au Congrès. Il était forcément controversé et il a finalement fait sept ans de prison pour corruption, dans ce que beaucoup ont considéré plus tard comme un coup monté par le gouvernement. Il avait affirmé, entre autres, qu' « Israël a une puissante mainmise sur le gouvernement américain », expliquant qu'Israël « contrôle une grande partie de notre politique étrangère » et « influence une grande partie de notre politique intérieure ». Il a affirmé de manière tout à fait crédible que l'ancien fonctionnaire du Pentagone Paul Wolfowitz travaillait pour Israël et avait « manipulé » le président George W. Bush pour qu'il ordonne l'invasion désastreuse de l'Irak.
Dans les années 1990, Traficant a affirmé :
« Nous menons la politique expansionniste d'Israël et tout le monde a peur de le dire. Ils contrôlent une grande partie des médias, ils contrôlent une grande partie du commerce du pays et ils contrôlent puissamment les deux organes du Congrès. Ils possèdent le Congrès ».Si Traficant était encore parmi nous, il serait étonné de voir à quel point l'influence juive s'est en fait accrue, avec l'adoption par 35 États de règles ou d'une législation punissant les partisans du boycott d'Israël, et des projets de loi en cours d'examen au Congrès autorisant une guerre automatique contre l'Iran et même l'expulsion des Palestiniens des États-Unis. Le département d'État dispose d'un ambassadeur chargé de surveiller ce que l'on appelle l'antisémitisme et la Maison Blanche a récemment déclaré une guerre contre ce qu'elle décrit comme une « montée de l'antisémitisme ».
Actuellement, toute personne s'opposant à l'engagement des États-Unis aux côtés d'Israël dans son extermination de la population arabe dans la zone qu'il contrôle est qualifiée d'antisémite, et prendre la défense des Palestiniens devient un bon moyen de se faire renvoyer de l'université et de se retrouver au chômage. Les amis d'Israël dressent la liste des étudiants qui soutiennent les Palestiniens et font circuler leurs noms pour qu'ils ne trouvent pas d'emploi une fois qu'ils seront diplômés. Ce qui est arrivé à Rashida Tlaib n'est que le dernier affront à la dignité et à la sagesse de la Constitution américaine, mais elle ne sera certainement pas la dernière victime du lobby juif, qui doit être dénoncé pour ce qu'il est, c'est-à-dire un agent de l'État d'apartheid israélien, et empêché de décider unilatéralement de politiques dont nous tous, Américains, devons payer le prix au Moyen-Orient.
Source: The Unz Review. - 11 novembre 2023
Traduction: Dominique Muselet
Si c''est vrai alors c'est à la fois Redoutable et effroyable, car les USA sont alors comme un jouet entre leurs mains....
Mais quand on a 33.000 Milliards de $$ de Dettes comme l'ont les USA, peut on encore se prétendre "Libre"....