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Le Parti québécois, qui vient de former leur gouvernement, espère que la France reviendra à sa position traditionnelle de "non-ingérence, non-indifférence" sur l'avenir de la province, abandonnant le penchant pro-canadien de Nicolas Sarkozy.

"Maintenant que (Nicolas Sarkozy) est parti, je pense qu'on va revenir à une relation qui tire plus sur cet axe de l'accompagnement des décisions du Québec", a déclaré jeudi le nouveau ministre des Relations internationales, Jean-François Lisée, jugeant "essentielle" la relation France-Québec.

"Sarkozy était très proche de la famille Desmarais", l'une des plus riches et influentes du pays, "très favorable au fédéralisme canadien", souligne Stéphane Paquin, politologue. "Il avait adopté leur discours, mais c'était une position insoutenable."

Prenant de court les souverainistes québécois, Nicolas Sarkozy avait fustigé en 2009 "le besoin de division" et "l'enfermement sur soi-même" porté selon lui par le mouvement indépendantiste. Ces déclarations avaient mis fin à la position traditionnelle de la diplomatie française dans l'épineux dossier de l'indépendance de la Belle province.

Théorisée en 1977 sous la présidence de Valérie Giscard d'Estaing, la doctrine du "ni-ni" devait garantir une neutralité de l'Hexagone, tout en assurant que Paris allait accompagner les destinées du Québec.

Cette posture devait également permettre de réparer la brouille avec Ottawa, occasionnée par le fameux "Vive le Québec libre!" lancé dix ans plus tôt par Charles de Gaulle, alors en visite à Montréal.

Avec les indépendantistes à Québec et les socialistes à Paris, il ne fait aucun doute, croit Stéphane Paquin, qu'"on va revenir à la position traditionnelle française de non-ingérence et de non-indifférence, plutôt qu'à un appui inconditionnel au fédéralisme canadien".

"On pourrait s'attendre à une petite ouverture, à un mot particulièrement chaleureux montrant la sympathie" de Paris pour les indépendantistes, avance de son côté Stéphane Roussel, politologue.

Toutefois, souligne-t-il, il n'existe "pas beaucoup de pommes de discorde entre la France et le Canada (mais) plusieurs opportunités commerciales". Un juteux traité de libre-échange est notamment en préparation entre l'Union européenne et le pays nord-américain.

Dans ce contexte, "il n'y a pas de raison que Paris donne l'impression de soutenir la souveraineté", fait-il remarquer.

Ceci, d'autant que l'appui à la séparation du Québec et du Canada est faible dans la province: une personne sur trois voterait en faveur de l'indépendance si un référendum avait lieu actuellement.

"Un gouvernement du PQ n'a aucunement l'intention de demander à la France quoi que ce soit sur la souveraineté car pour le moment on ne sait pas ce qu'on fera", note ainsi Louise Beaudoin, ancienne ministre indépendantiste des Relations internationales.

Au Quai d'Orsay, on souligne ainsi que les "relations avec les gouvernements canadien et québécois sont complémentaires". "Nous approfondirons ces liens dans la transparence et l'équilibre", prédit la diplomatie française.

Proche de plusieurs dirigeants du Parti socialiste, Mme Beaudoin souligne que la formation présidentielle s'est engagée dès 2010 à revenir à la fameuse formule du "ni-ni".

Et selon une source gouvernementale française, une telle éventualité est bien à l'étude. Un retour au statu quo pourrait être annoncé dès la mi-octobre, lors de la rencontre à l'Elysée de la Première ministre québécoise Pauline Marois avec le président François Hollande.