Traduction partielle : SOTT

Vietnam War An unidentified U.S. Army soldier wears a hand lettered “War Is Hell” slogan on his helmet, in Vietnam on June 18, 1965.
© Horst Faas/APGuerre du Vietnam, un soldat anonyme de l'armée américaine porte un casque sur lequel est écrit à la main « La guerre c'est l'enfer ». Vietnam le 18 juin 1965.

La fin de l'année 2012 est notablement marquée par la tension générale affectant diverses crises devenues endémiques tant elles semblent ne jamais recevoir de solution ni connaître une issue acceptable. Ces tensions sont évidemment d'ordre politique, stratégique, financier, économique, militaire lorsque des combats sont impliqués par ces crises. Elles s'inscrivent toutes, selon le schéma que nous favorisons, dans le contexte de ce que nous désignons comme la crise terminale du Système, et peuvent être regroupées dans un concept général que nous désignons comme une crise haute.

Il ne manque pas d'expressions opérationnelles de cette situation crisique générale (crise syrienne et ses diverses annexes, crise iranienne, Afghanistan, etc.), et pourtant aucune ne nous donne la moindre orientation permettant la moindre esquisse de prospective. Ces crises « tournent en rond » littéralement, en une sorte de spirale crisique, essentiellement parce qu'elles ne correspondent à rien dans le chef des conceptions de la politique extérieure auxquelles nous sommes accoutumés, notamment selon les stéréotypes de géopolitique, avec souvent des contradictions insolubles pour la raison. (On peut même citer le cas de la Russie, le pays le plus remarquable par la cohésion de sa politique extérieure. La Russie qui fait le fondement de sa politique du respect des principes de souveraineté, de la lutte contre le désordre engendré par la politique soi-disant expansionniste des USA, soutient de facto cette politique et sa méconnaissance des principes en soutenant l'OTAN en Afghanistan. Le « réalisme » n'est là qu'une explication par défaut, de piètre circonstance, qui ne désamorce absolument pas la contradiction fondamentale : « réaliste », la Russie l'est également en Syrie, où elle défend le contraire de ce qu'elle soutient en Afghanistan ; et le « réalisme » est un peu court s'il s'explique par la crainte du djihadisme, si par ailleurs, il se trouve en soutien d'un appareil qui organise la subversion ouverte sur le territoire russe, contre la société russe, directement et maintenant, dans l'« agression douce » menée par les USA contre la Russie.)

Comme nous le rappelons souvent, cette situation est essentiellement due à ce que nous nommons la politique-Système, avec sa définition opérationnelle comme sous-bassement de notre propos. (On observera que, si les exemples cités plus haut portent sur des crises extérieures, cette politique-Système, comme nous l'expliquons, concerne toutes les crises, et notamment intérieures, économiques et financières, sociales, etc. Ce qui importe, c'est la description de l'absurdité d'un mouvement par rapport aux conceptions politiques normales, y compris hégémoniques, etc., - mais apparente absurdité qui disparaît si l'on mesure les buts réels de cette politique-Système.) Pour rappel, quelques éléments de cette « définition opérationnelle », extraits du texte du Glossaire.dde référencé :
« D'un point de vue opérationnel, on dira que cette politique-Système se manifeste sous la forme d'une politique expansionniste et maximaliste, qui a perdu tout sens de son expansionnisme et qui n'est plus animée que par son maximalisme (sa surpuissance). Les effets de ce maximalisme se manifestent sous la forme exclusive de la déstructuration et de la dissolution. Aucune attention n'est portée à la situation intérieure des différents acteurs (des différents pays) participant à cette politique (en général les pays du bloc BAO), qui deviennent de plus en plus des figurants passifs, sans volonté et sans autre attitude qu'agréer à la poussée de la politique-Système. Cette occurrence est d'autant plus grave que ces acteurs-figurants (les pays impliqués) ont tous des situations intérieures catastrophiques dans la situation générale depuis l'automne 2008.

Si l'on veut schématiser cette politique-Système, nous dirions que c'est une flèche (figurant l'aspect expansionniste) qui a perdu tout sens tout en conservant sa dynamique exprimée graphiquement par sa pointe. La flèche, avec sa pointe au bout d'un fût normalement droit, et dirigée vers un but précis, - éventuellement la phase figurée par la première « politique de l'idéologie et de l'instinct » de GW Bush, de 2001 à 2007, - a donc changé de forme et s'est déformée (ou reformée, c'est selon) dans le chef de son fût, en une spirale, un tourbillon permanent, qui devient de plus en plus un trou noir en passant de la surpuissance à l'autodestruction, la phase à partir de 2008, où la politique-Système a dispersé violemment toutes ses attaches identitaires en se détachant, à notre sens décisivement, du seul support américaniste et en s'élargissant aux pays du bloc BAO qui forment la substance du Système. La pointe de la flèche constitue la dynamique initiale de la surpuissance expansionniste, mais sa forme (son fût) puis sa trajectoire changées en un chaos tourbillonnant l'entraînent irrésistiblement vers son autodestruction. »
Un aspect essentiel de cette politique-Système qui n'est pas envisagé dans l'article référencé, parce qu'il concerne un autre sujet de notre Glossaire.dde (à venir, non encore rédigé sous la rubrique « Psychologie »), concerne effectivement son effet sur la psychologie. Cet effet est essentiel, et l'on comprend qu'il soit traité à part car il est infiniment plus important pour l'objet qu'il touche que pour sa cause, bien entendu. A cette accélération de la politique-Système ces dernières années, et particulièrement en 2012 puisque l'évolution est exponentielle, correspond une accélération de la dévastation de la psychologie. Nous mentionnons ici quelques appréciations et nouvelles qui nous permettent d'illustrer notre propos.

Il y avait, le 21 décembre 2012 dans un article d'enquête et d'analyse sur la descente dans la dépression (psychologique) de la "Génération Y", arrivée à l'âge adulte avec le millénaire. Divers témoignages sont mentionnés, détaillant à la fois le désenchantement et la frustration de cette génération... (« Le rêve américain diminue pour les employés de la génération Y... [...] « J'avais beaucoup d'espérance dans le système, cette mythologie qui dit que si vous travaillez dur vous pouvez réussir n'importe quoi, et que le marché ne cessera de grimper, » disait Elizabeth Hallock en 2009, à l'issue de son diplôme d'avocate. « C'était plutôt naïf de ma part. » [...] « C'est une génération qui avait beaucoup d'attentes, en quelque sorte conduite par la voie qui avait élevée leurs parents du baby-boom, » dit Kathy Sheehan, directeur général de GfK Consumer Trends and Roper Reports, une filiale de la société de recherche allemande GfK]. « Alors même que dans les cinq dernières années, ils aient fait face à la réalité du chômage. » Enfin, nous signalons le jugement d'un professeur, chercheur d'un centre universitaire sur le développement du travail professionnel.
« Cette génération sera dépressive de façon permanente et aura un revenu inférieur durant probablement toute sa vie - et au moins pour les dix prochaines années. Les professionnels qui bifurquent dans des emplois autres que leur premier choix ont tendance à rester dans une voie alternative, ayant un revenu inférieur que celui qu'ils auraient autrement eu, rendant improbable la possibilité de recommencer plus tard dans des domaines professionnels de prédilection. »

~ Cliff Zukin, professeur attaché au Centre de recherches John J. Heldrich de l'université pour le Développement de la main-d'œuvre
Nous nous arrêtons également à de récentes statistiques portant sur la question des suicides dans les forces armées, - aux USA, où le sujet est déjà très largement débattu, mais aussi en Turquie et en Israël, brièvement, mais bien assez pour mesurer l'existence d'un problème psychologique colossal, avec les chiffres des suicides supérieurs à ceux des pertes en combat dans tous les cas, et ce problème que l'un des commentaires résume de la sorte :
« Puisque les statistiques de suicide sont plus importantes que les pertes au combat, beaucoup se demandent si le risque réel est dans la guerre extérieure ou dans la guerre intérieure. » Les trois statistiques, ou appréciations statistiques, sont les suivantes : - Le 20 décembre 2012, Antiwar.com publiait une revue de presse sur la dernière statistique des suicides dans les forces armées US en 2012 : « En 2011, l'armée américaine a perdu 165 de ses soldats qui se sont suicidés, un record qui a battu celui de 2009 avec 160 suicides. Cette année, les choses sont devenues beaucoup, beaucoup plus mauvaises puisqu'à fin novembre 2012, les suicides dans l'armée américaine sont montés jusqu'à 303. » - Le 21 décembre 2012 (PressTV.com), le Parlement turc rendait publics les chiffres des suicides dans les forces armées : 175 pour les deux dernières années, 934 pour les dix dernières années, alors que 818 soldats turcs ont été tués au combat durant la même période de dix années. - Des révélations ont eu lieu du côté israélien, par des voies complexes (un site Internet, Haaretz, etc.), PressTV.com donnent quelques indications, le 27 décembre 2012, elles-mêmes assez confuses. Il en ressort de toutes les façons que le nombre des suicides de soldats israéliens dans les dix dernières années est supérieur au nombre de soldats tués au combat (quelle que soit la source, y compris le ministère de la défense). Le chiffre de 237 suicides qui est « révélé » à partir de documents jusqu'ici secrets du ministère de la défense serait, selon le même site, largement inférieur au chiffre réel des suicides, lui-même censuré, voire ignoré, à l'intérieur du ministère de la défense.
On comprend aussitôt que ce qui nous importe ici est l'aspect symbolique, qualitatif, et nullement l'aspect statistique, évidemment quantitatif. (Nous tenons pour évident que l'aspect symbolique éclaire bien plus les effets essentiels sur la psychologie prise comme un domaine lui-même essentiel, que l'aspect statistique, qui est réducteur, absolument appauvrissant, comme toutes les démarches (et non les chiffres) des sciences sociales modernistes, enfants clonesques [enfants-clones] et spécifiques de la modernité.) Que dit cet aspect symbolique, ou plutôt vers quelle interprétation nous pousse-t-il ? Il y a le constat de psychologies désorientées, pulvérisées, martyrisées, non pas par les actes qu'elles doivent affronter mais par le sens, ou l'absence de sens, des actes qu'on les contraint d'affronter. Ainsi, les réactions psychologiques ne sont-elles pas le reflet de tensions naturelles de l'existence, mais de tensions dont le sens échappe complètement à la psychologie.

Les psychologies de la « Génération Y » sont soumises à une dialectique d'abondance, triomphaliste, à la fois de puissance et de vertu, suscitant nécessairement et irrésistiblement le bonheur, qui est celle de la narrative du bloc BAO à laquelle elle (cette génération) ne peut imaginer d'alternative, et pourtant confrontée à l'effet d'un recul permanent, catastrophique, absolument angoissant par rapport à ce bonheur qui lui est promis ; ainsi, le malheur insensé est-il proposé comme une conséquence qui n'a l'air d'alarmer ni d'étonner personne parmi les autorités et des inspirateurs du Système, - le malheur insensé comme conséquence naturelle en somme d'une narrative du bonheur nécessaire. Les psychologies des divers soldats sont elles aussi nourries de cette narrative triomphaliste, à la fois de puissance, de vertu de défenseurs et importateurs de la démocratie et du reste, suscitant nécessairement le bonheur des autres, - de ceux que les armes viennent protéger et défendre dans les divers pays et régions soumises à nos armes, et ceux-là même qui n'expriment pourtant, dans une sorte de réaction incompréhensible pour le soldat « libérateur », que peur, mépris, haine, etc.

On reconnaît là aussi les caractères complètement incohérents des guerres postmodernistes où l'on vient sauver des populations en se coupant complètement d'elles ; en se protégeant d'elles jusqu'à l'excès caricatural et hollywoodien alors qu'on serait prétendument venu les protéger ; en dévastant indistinctement ces populations puis en voyant surgir d'elles ces "terroristes" déterminés, que certains nomment résistants, dont on voulait les garder... Ces guerres sont celles où le technologisme donne des moyens de puissance dont l'effet est de rendre la « victoire » complètement inévitable et complètement inopérante en même temps, en ne suscitant aucun effet « victorieux » sur le terrain ; l'ensemble se transformant en une sorte de paralysie sanglante qui révèle rapidement son absence totale de sens. Les soldats du bloc BAO subissent cette situation sans aucun sens à la façon des soldats du Pacte de Varsovie en Tchécoslovaquie, en août 1968, mais d'une façon totalement, absolument différente, en étant placés dans une situation où c'est la circonstance privée de sens, celle de la « victoire », qui subsiste dans la situation qui leur est décrite, et qui est comme imposée à la réalité « autorisée ».

Dans les deux exemples proposés, il s'agit de psychologies nourries de constructions d'apparence puissantes et rationnelles (narrative), absolument nécessaires à la justification rationnelle de la conduite de la politique-Système, confrontées à des conditions réelles absolument étrangères, sinon opposées, antagonistes, hostiles. La puissance de la politique-Système et des narrative qui la relaient donne les moyens, en même temps que l'objurgation, de continuer à nier ces conditions de la réalité et à les repousser. La formule économique développée par la politique-Système, les conflits ou luttes engagées selon les mêmes doctrines, se poursuivent en exposant presque complaisamment leur absence de sens sans que rien ne soit fait pour pallier à cet étrange inconvénient, - qui s'avère être, finalement et évidemment, un caractère constitutif nécessaire et essentiel. Les divers autres domaines d'activité du Système offrent les mêmes contrastes, et le nœud même de l'intrigue se trouve dans la puissance complètement sans compromis de la politique-Système opposée à la réalité, que même les êtres victimes du Système (en même temps qu'ils en sont les complices et les "collabos" au nom de cette même infamie), persistent à défendre en tant que telle, contre la réalité, - parce qu'ils sont faibles, parce qu'ils n'ont guère de capacité et de penchant pour la lucidité.

Bien entendu, ces constats se renforcent très fortement d'un cadre général catastrophiste, pour ce qui concerne notamment et essentiellement les USA dans une période de communication qui a été mise en place avec l'épisode du « fiscal cliff ». Il s'agit d'un très fort sentiment d'effondrement de la puissance US, traduit par des articles extrêmement pessimistes (Simon Johnson sur Bloomberg.News le 23 décembre 2012, articles sur ce site les 28 décembre 2012 et 29 décembre 2012).

La psychologie devant l'insupportable contradiction

La question centrale qui importe est donc bien la question de la politique-Système et de sa « production », et plus précisément les relations entre la chose que produit cette politique-Système et, d'une part ceux qui servent et alimentent cette politique-Système, d'autre part ceux qui la subissent en croyant que c'est la leur, eux aussi en la servant et en l'alimentant indirectement d'une certaine façon. (Dire cela, c'est désigner les élites et les directions politiques pour ceux qui « servent et alimentent cette politique-Système », et la très grande majorité des populations, au moins des pays du bloc BAO, pour les autres.) Il est pour nous évident, sinon absolu dans la mesure de l'identité des deux choses, que la politique-Système est née du « déchaînement de la Matière », donc de la Matière elle-même. Cette origine, autant que les processus et les dynamiques qui l'animent dans cette période de crise terminale rendent effectivement cette politique-Système extrêmement proche des diverses occurrences où se manifeste ce « déchaînement de la Matière ». On sait, comme on l'a déjà vu et lu en général sur ce site, que nous considérons ce phénomène général comme producteur de néant, ou de tout ce qui peut s'y apparenter, essentiellement et l'on peut dire exclusivement au travers de la démarche générale de déstructuration et de dissolution du monde.

Nous avons observé le phénomène de cette « production » « de néant, ou de tout ce qui peut s'y apparenter » aussi bien au niveau de la physique (de la thermodynamique), avec le processus d'entropisation qui tend effectivement vers la production d'un équivalent du rien, ou tendant vers le rien, - qui est le processus d'entropisation... On pouvait lire dans notre texte du 11 octobre 2012 :
« Dans notre conception, l'entropie, et l'acte de produire de l'entropie ou de se produire soi-même en entropie qu'est l'entropisation, constituent les actes opérationnels des processus de déstructuration et de dissolution dans le sens où nous les entendons. Nous faisons allusion à la loi thermodynamique régissant ce phénomène (la MEP ou MaxEP, citée ci-dessus) qui est aussi appréciée de plus en plus comme la troisième loi de la thermodynamique. C'est dans le livre du scientifique et astronome François Roddier, Thermodynamique de l'évolution (Parole Éditions, mars 2012), que nous trouvons des indications très intéressantes, notamment à propos de cette troisième loi de la thermodynamique ; le cadre est celui d'un modèle d'évolution qui diagnostique l'effondrement de nos sociétés (« L'effondrement de nos sociétés paraît inéluctable »), cela dans la période historique actuelle, période métahistorique actuelle pour nous. »
A l'autre extrémité du spectre, on trouve l'appréciation métaphysique qui va parfaitement dans le même sens. Dans notre article-glossaire sur le « déchaînement de la Matière », nous écrivions :
« Ainsi le « déchaînement de la Matière » est-il, malgré sa puissance, son rythme, son souffle de forge de l'immense usine du monde, lui-même, par sa négativité évidente, sa bassesse qui ne l'est pas moins, un immense « rien », - quelque chose, - retenons bien le mot, - qui n'est pas vrai. Ce qui nous conduit à la métaphysique, toujours avec le comte Joseph (les soulignés sont de lui) : « Le mal n'a rien de commun avec l'existence ; il ne peut créer puisque sa force est purement négative : Le mal est le schisme de l'être: il n'est pas vrai. »
Toutes nos appréciations vont bien entendu dans ce sens lorsqu'il s'agit d'approcher la question du Mal et de sa représentation dans la Matière. Dans le dde.crisisnouvelle série (Les Cahiers), de janvier 2013, nous observons à nouveau :
« ... Dans son livre « Connais-toi toi-même », Lucien Jerphagon rappelle cette conception du philosophe Plotin : « Qu'il y ait du mal dans ce monde, ce n'est pas douteux, mais il n'est que privation du bien... » Et, pour ceux qui, essentiellement, identifient le Mal à la Matière (Plotin lui-même), ces observations de Joseph de Maistre conduisent à une conclusion similaire, par une autre voie, en caractérisant la substance de notre monde totalement investi par le Mal, ou « Rien » : « [O]n pourrait dire même, rigoureusement parlant, qu'il n'y a qu'un monde, car la matière n'est rien. Essayez, s'il vous plaît, d'imaginer la matière existant seule, sans intelligence, jamais vous ne pourrez y parvenir. » »
On comprend et on entend bien la logique générale de ce schéma, en fonction de ce que nous avons rappelé : les forces et dynamiques issues du « déchaînement de la Matière » ne pouvant produire dans leur finalité que du Néant et du Rien, se réalisent dans leur propre déchaînement, accouchant d'un Système puis d'une politique-Système unifiés à mesure de leur progression, qui seront nécessairement marqués par ces caractères et réaliseront effectivement cette sorte de production. Il s'agit bien des notions équivalentes ou proches du Mal, du Néant, du Rien, qui se réalisent dans un « déchaînement » (le « déchaînement de la Matière ») accouchant d'un Système puis d'une politique-Système nécessairement marqués par ce caractères. A la puissance du processus correspond la néantisation de sa production ; cela rejoint parfaitement et démontre la justesse de l'équation surpuissance-autodestruction. Au travers de ses aspects chaotiques, insensés (absence de sens), nihilistes, la politique-Système s'avère effectivement comme la productrice du « Rien » en matière d'objectif à poursuivre tel qu'on peut en envisager d'une façon rationnelle. Ce qui est insensé et nihiliste, et ce qui en découle comme désordres et absurdités, constituent la production logique, voire légitime (principe cité dans son inversion absolue) de la politique-Système, ce par quoi la politique-Système est elle-même.

C'est à ce point de rencontre que se situe la tragédie de la psychologie actuelle, qu'on a vue s'exprimer dans tel ou tel exemple parcellaire, dans tel ou tel domaine, et qui s'exprime d'une façon générale par des situations de dépression ou d'épisodes dépressifs d'une situation maniaco-dépressive... En effet, aux implications parcellaires (la « Génération Y », le suicides de soldats, etc.) suscitant des explications parcellaires et nécessairement liées à des circonstances que l'on prend soin de cloisonner pour interdire toute conclusion générale, il nous paraît impératif de préférer une explication générale, selon une démarche fondamentalement anti-Système puisque s'opposant au fractionnisme du Système. Outre la référence évidence à notre stratégie générale de résistance anti-Système, nous jugeons pouvoir et devoir procéder de la sorte à cause de l'ampleur du phénomène qui affecte notre contre-civilisation. Ce phénomène est d'une telle puissance qu'on a décrite avec cette marche vers l'entropisation, ou vers le « Rien »/« Néant », que l'on peut et que l'on doit estimer qu'il doit lui-même, évidemment et nécessairement, affecter tous les domaines d'une façon ou d'une autre. (On observera par exemple que même les militaires qui exercent une fonction opérationnelle absolument en-dehors des guerres postmodernistes, du point de vue « physiquement opérationnel », comme les pilotes de drones opérant par définition hors du champ des opérations, sont touchés par une pression psychologique génératrice de dépression. A côté de toutes les habituelles « explications techniques » sectorielles, relevant de la psychologie hospitalière courante et sanctifiée par le Système, on peut et on doit avancer le constat que l'activité du Système n'épargne pas plus leurs psychologies que celle des autres.)

Dans cette situation telle que nous l'avons décrite, il nous apparaît que ce phénomène de l'action de la politique-Système comme manifestation opérationnelle aigüe du Système dans sa crise terminale affecte, encore plus qu'aucun autre domaine, la psychologie prise comme un fait collectif, en plus d'affecter différemment, selon les circonstances et les caractères des individus, les psychologies individuelles et les « psychologies sectorielles ». Cette affection de « la psychologie prise comme un fait collectif » se fait dans un sens catastrophique, non pas comme une réaction au rythme normal de l'évolution structurante bienfaisante, disons selon une évolution civilisationnelle structurante, mais comme une réaction au développement du Système dans le sens de l'inversion (autodestruction). Nous faisons par conséquent l'hypothèse que la psychologie en général se trouve devant une contradiction insupportable ; elle perçoit inconsciemment et intuitivement la subversion et l'inversion du phénomène de la production de vide et de néant de la politique-Système, alors qu'elle se trouve elle-même dans le cours du développement du Système et de sa politique-Système, qui conduit comme on le voit le comportement des sapiens dont elle est elle-même (la psychologie) constitutive. Elle se trouve à la fois juge, sinon accusatrice de l'infamie, et en même temps complice, « collabo » de cette infamie. Comment pourrait-elle échapper à cette conséquence ? La psychologie est alors frappée d'une crise dont la profondeur et la vigueur ne peuvent être mesurées tant les pressions et les chocs contradictoires sont grands.

A notre sens , c'est à ce niveau principalement que se manifestent la crise générale du Système, et ce qui la rend à la fois irrésistible et incontrôlable (y compris et surtout par ceux qui sont soumis au Système, d'ailleurs eux-mêmes touchés). Pour cette raison, nous n'avons pas d'effet direct réel visible et identifiable d'une façon incontestable entre la crise et les événements terrestres, qui passent tous par les filtres des situations parcellaires dont le principal effet, et au fond la principale fonction, est de disperser cette possible perception du caractère général et terminal de la crise. Pour cette raison, et même en ne considérant que ces seuls éléments opérationnels que nous pouvons percevoir et identifier ou à propos desquels nous pouvons conjoncturer, cette crise est absolument, complètement eschatologique. Son expression finale nous est totalement inconnue et elle est complètement imprévisible par nous-mêmes. Elle est donc à la fois extraordinairement éloignée de nous dans sa manifestation, et extraordinairement inscrite en nous puisqu'elle touche prioritairement, à la fois, ce qui est en nous de plus intime et ce qui est en nous de plus ouvert sur le monde, - notre psychologie.

Les événements de ces quatre dernières années, de ces derniers mois, notamment de 2012, nous font penser que la tension autodestructrice du Système approche de son point de rupture. La rupture qui affecte notre psychologie, qui en est la conséquence, en est un signe que nous devrions juger convaincant.